Les catholiques, jaloux

Le terme « islamophobie » est devenu tellement populaire que l’extrême droite catholique, qui voit dans l’islam à la fois une « fausse religion » et une concurrence inacceptable, tente de s’emparer du concept. Dans les manifestations contre certaines pièces de théâtre mettant Jésus en scène de manière non conforme au droit canon et dans les défilés contre le mariage pour tous, on a entendu des slogans dans lesquels était dénoncée la « cathophobie ». Comme il y a une islamophobie et des islamophobes, pourquoi en effet n’y aurait-il pas une cathophobie et des cathophobes ?

Pour avoir mis de très nombreuses fois Jésus, le pape, les saints et tout le matériel liturgique en images, Charlie Hebdo a été poursuivi une bonne douzaine de fois par une association de catholiques intégristes qui a longtemps été proche du Front national : l’Alliance générale contre le racisme et pour le respect de l’identité française et chrétienne. L’AGRIF se bat contre le racisme… Le racisme antiblanc et antichrétien. Charlie Hebdo a été accusé par cette association, entre autres choses, de racisme antifrançais. Comment se manifeste le racisme antifrançais pour des catholiques intégristes ? C’est simple : en dessinant la Sainte Vierge dans des positions qui n’avaient jamais été évoquées dans sa biographie officielle, nous insultions la France. En effet, depuis que Louis XIII a consacré sa personne et son pays à la Mère de Dieu, la France et la Vierge sont indissociables. Se moquer de la Vierge, c’est se moquer de la France et de tous les Français.

C’était avant l’invention de l’islamophobie. Aujourd’hui, les dessinateurs et les rédacteurs deCharlie Hebdo sont moins des racistes antifrançais que des cathophobes. Si ça marche avec les musulmans, on ne voit pas pourquoi ça ne marcherait pas avec les catholiques et, plus généralement, avec les chrétiens. Oui, la christianophobie est un des maux qui rongent la « fille aînée de l’Église » (pas vraiment, puisque ce n’est pas le royaume de France qui le premier devint chrétien, mais celui d’Arménie).

Lorsque, le 29 octobre 2011, les catholiques intégristes de l’association Civitas ont fait aboutir leur manifestation nationale contre la christianophobie devant le Théâtre de la Ville, à Paris, pour protester contre la représentation de la pièce de Romeo Castellucci, Sur le concept du visage du fils de Dieu, jugée par eux blasphématoire, ils ont été rejoints par une poignée de musulmans solidaires. Il était amusant de voir (j’y étais) les nombreux catholiques de Civitas chanter à genoux et dans les gaz lacrymogènes « Je vous salue Marie, pleine de grâce » à gauche du théâtre, tandis que sur le terre- plein de la place du Châtelet des barbus les encourageaient avec des banderoles réclamant notamment qu’on ne « touche pas à Issa », le nom de Jésus en arabe. Si pour les musulmans Jésus n’est pas le fils de Dieu, il est tout de même un prophète important. Le problème, c’est que les militants de Civitas étaient séparés de leurs amis musulmans par un cordon de CRS, ce qui empêchait tout contact. Une vague inquiétude s’est emparée des chrétiens priant lorsqu’ils virent ces barbus musulmans. Beaucoup n’ont pas compris qu’ils étaient là pour soutenir leur action et se sont interrogés à haute voix sur les raisons de la présence de ces « bougnoules ». N’étaient-ils pas hostiles ? Non, ils ne l’étaient pas. Mais les propos entendus ce jour-làde la part de certains catholiques intégristes étaient moins « islamophobes » que tout simplement racistes. Passons. L’extrême droite catholique n’a pas besoin du soutien des musulmans intégristes, elle a juste besoin de leur vocabulaire. Si l’islam a récupéré quelques figures du christianisme pour asseoir sa légitimité, les catholiques intégristes, des siècles plus tard, récupèrent les astuces propagandistes de leurs pendants musulmans.

Toute victoire des musulmans intégristes dans leur lutte contre l’islamophobie est attendue à la fois avec gourmandise et jalousie par les catholiques intégristes. Lorsque, les 7 et 8 février 2007, s’est tenu à Paris le procès que trois associations musulmanes intentaient à Charlie Hebdo pour avoir republié les caricatures danoises, un seul témoin a été cité par les plaignants : un prêtre catholique. Des alliances sont possibles.

Les catholiques intégristes, mais aussi d’autres, réputés plus modérés, ruminent depuis 1905 l’adoption de la loi de séparation des Églises et de l’État et rêvent d’une revanche. Ce qu’une jurisprudence accorderait aux musulmans, elle l’accorderait également aux autres croyants.

Les termes « cathophobe » et « christianophobe » n’ont pas encore le succès médiatique de celui d’« islamophobe », parce qu’il y a une réelle différence entre les actes antimusulmans et les actes qui seraient antichrétiens. Les actes antimusulmans sont beaucoup plus nombreux, alors qu’il y a moins de musulmans que de chrétiens en France. Et il est difficile de citer des discriminations à l’encontre de chrétiens en raison de leur appartenance religieuse… Mais il ne faut pas désespérer, c’est à force de rabâcher des mensonges qu’on finit par imposer une vérité.

Et la judéophobie ?

Il ne manque plus aux juifs intégristes que d’entrer dans la danse. Il existe bien « judéophobie », mais le terme est trop ambigu. On ne sait s’il désigne la haine du Juif en tant qu’il est né de parents juifs, qu’il est de culture juive ou qu’il appartient au peuple juif, et le juif, en tant qu’il est un adepte de la religion juive. Oui, les Juifs/juifs font chier. Les juifs n’ont qu’un mot pour désigner deux choses. Si tous les Arabes ne sont pas des musulmans, si tous les Européens ne sont pas des chrétiens, tous les Juifs ne sont pas des juifs… Alors, comment se foutre de la gueule des extrémistes religieux juifs sans créer de confusion avec l’ensemble du peuple juif ? En les désignant précisément. Ce n’est pas très compliqué. Pas plus compliqué que de distinguer djihadiste et musulman, musulman et immigré, musulman et Arabe, Arabe et Maghrébin, etc.

Pourtant, le grand projet des pourfendeurs de l’islamophobie, c’est de placer sur le même plan l’antisémitisme et la critique à l’encontre de personnes se réclamant de l’islam. Se moquer d’un terroriste islamiste serait la même chose qu’affirmer que les Juifs seraient des êtres inférieurs ou nuisibles. Les réseaux sociaux sont infestés de ce genre de commentaires qui insinuent que ce que les caricaturistes se permettent avec les musulmans (encore une fois, ce n’est pas parce qu’on représente un musulman avec une kalachnikov que tous les musulmans en portent une), ils ne se le permettent pas avec les Juifs. Eh bien, non. Pas s’il s’agit du peuple juif. Pas plus qu’on ne ridiculise le peuple arabe parce qu’il est arabe, on ne ridiculise le peuple juif parce qu’il est juif.

En revanche, oui, nous mettons sur le même plan les religieux juifs extrémistes qui, par exemple, chassent les Palestiniens de Cisjordanie à coups de bulldozers et de fusils-mitrailleurs que les djihadistes qui chassent les infidèles en Irak ou en Syrie. Nous ne représentons pas un Arabe en costume de musulman si nous voulons représenter un Arabe et nous ne représentons pas un Juif en costume de rabbin si nous voulons représenter un Juif. Il n’y a pas de correspondance entre le racisme ou l’antisémitisme et la critique d’extrémistes religieux. Mais rien n’y fait, les inventeurs de l’islamophobie veulent absolument que l’islamophobie soit considérée comme un racisme antimusulmans équivalent à l’antisémitisme, ce racisme antijuifs.

Et il n’y a pas que des imbéciles qui prêchent pour cette reconnaissance. L’excellent journaliste Alain Gresh publiait dans Le Monde diplomatique du 20 septembre 2012 un long texte où « l’irresponsabilité » de Charlie Hebdo était fustigée. Selon lui, Charlie Hebdo, journal antiraciste et de gauche, ferait le jeu de la droite et de l’extrême droite. En voici un extrait : « Imaginons, en 1931 en Allemagne, en pleine montée de l’antisémitisme, un hebdomadaire de gauche faisant un numéro spécial sur le judaïsme (la religion) et expliquant à longueur de colonnes, sans aucune connotation antisémite, que le judaïsme était rétrograde, que la Bible était un texte d’apologie de la violence, du génocide, de la lapidation, que les juifs religieux portaient de drôles de tenues, des signes religieux visibles, etc. Évidemment, on n’aurait pas pu dissocier cette publication du contexte politique allemand et de la montée du nazisme […]. Nous vivons en Europe la montée de forces nationalistes, de partis, dont l’axe de bataille n’est plus, comme dans les années 1930, l’antisémitisme, mais bien l’islamophobie. » Charlie Hebdo aurait en effet pu dire tout ça du judaïsme (la religion) à cela près que nous l’aurions dit des extrémistes religieux juifs et non de l’ensemble des juifs croyants. Mais, en 1931, existait-il un terrorisme international qui se réclamait du judaïsme orthodoxe ? Des djihadistes juifs menaçaient-ils d’instaurer l’équivalent de la charia en Libye, en Tunisie, en Syrie, en Irak ? Un rabbin Ben Laden avait-il envoyé un biplan s’écraser contre l’Empire State Building ? Je ne suis pas historien, mais je ne pense pas… En 1931, l’intégrisme juif n’était pas ce qu’est au XXIesiècle l’intégrisme musulman. Et, non, l’islamophobie n’est pas le nouvel antisémitisme. Il n’y a pas de nouvel antisémitisme, il y a ce vieux, hideux et immortel racisme. Un racisme dont sont victimes des populations d’origine musulmane, oui. Aujourd’hui, en France, le racisme le plus violent s’exerce à l’encontre des populations roms. Doit-on dire qu’il y a une « romophobie » ? Ridicule. Il y a un racisme à l’encontre des Roms.

Pourquoi vouloir absolument jumeler antisémitisme avec islamophobie ? La seule conséquence d’une telle association serait la disparition du mot « racisme ».

Bien avant la publication du texte d’Alain Gresh, le 16 mars 2007, Plantu, notre confrère dessinateur duMonde, très engagé dans la lutte contre la censure, était invité à un débat organisé à Genève par l’ONU. Il y a réclamé « une trêve des blasphèmes », rapportait alors l’AFP. Une telle trêve, selon Plantu, devrait être également observée par « les dessinateurs moyen-orientaux qui dessinent des Juifs ou des Israéliens avec des nez crochus ». À la lecture de ce genre de déclaration, on se prend la tête à deux mains et on se demande s’il ne faut pas changer de métier… Pour Plantu, la critique de la religion serait donc à mettre sur le même plan que le racisme. Plantu renvoie dos à dos les caricaturistes qui mettent en scène Mahomet et les dessinateurs qui ont participé au concours de dessins sur la Shoah organisé à l’époque par l’Iran… Puisque, selon Plantu, les dessinateurs moyen- orientaux confondent antisémitisme et blasphème, emboîtons-leur le pas, prétendons que la Shoah est une religion et que c’est pour cette raison qu’on ne peut pas remettre en cause son existence ! Et,

pendant qu’on y est, disons qu’il y a autant de preuves de l’existence de Dieu qu’il y en a de l’existence de la Shoah. Le bruit qu’on entend ? Les négationnistes qui se frottent les mains.

Il n’y a pas de blasphème antirépublicain !

Hélas, les propagandistes religieux qui essaient d’imposer un délit de blasphème en France ne sont pas seuls. L’État donne parfois le mauvais exemple. Même si le mot « blasphème » n’apparaît pas dans les textes, ni « francophobie » ou « républicanophobie », il existe des lois qui instaurent et punissent le blasphème antirépublicain ou antifrançais.

C’est pour protester contre le décret du 21 juillet 2010 qui réprime l’outrage au drapeau français, et contre la loi du 18 mars 2003 qui réprime le fait d’outrager publiquement l’hymne national ou le drapeau tricolore, que Charlie Hebdo a appelé en janvier 2011 tous les citoyens à résister à la censure. Il s’agissait de tourner en ridicule, de détruire ou de souiller le symbole de la République. Il ne s’agissait pas d’inviter à détruire un bien matériel appartenant à autrui, mais de montrer qu’une République laïque ne peut décider pour ses citoyens quel symbole est sacré ou non.

Souvenez-vous. Le 6 mars 2010, la Fnac de Nice donne le résultat d’un concours de photo amateur. Pour illustrer le thème « politiquement incorrect », un concurrent a réalisé un cliché montrant un homme en train de s’essuyer le cul avec le drapeau tricolore. Cette image, primée par le jury, a été publiée le 19 mars dans le journal gratuit Metro. Protestations de la part du préfet, du président UMP du conseil général et d’anciens combattants. Michèle Alliot-Marie,garde des Sceaux, et Brice Hortefeux, ministre de l’Intérieur, s’indignent à leur tour.

Le 25 mai 2010, Louis Nègre, sénateur UMP des Alpes-Maritimes, révèle qu’il a déposé une proposition de loi qui vise à sanctionner les outrages aux emblèmes nationaux.

Le 1er juillet 2010, on apprend par la presse que deux salariés de la Fnac font l’objet d’une procédure de licenciement pour faute grave. Selon la direction de l’entreprise, ils sont responsables d’avoir « validé » le scandaleux résultat du concours photographique.

Le 23 juillet 2010, le décret réprimant l’outrage au drapeau est publié au Journal officiel.

« De l’outrage au drapeau tricolore

«Art. R. 645-15. Hors les cas prévus par l’article 433-5-1, est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe le fait, lorsqu’il est commis dans des conditions de nature à troubler l’ordre public et dans l’intention d’outrager le drapeau tricolore :

«1° De détruire celui-ci, le détériorer ou l’utiliser de manière dégradante, dans un lieu public ou ouvert au public ;

«2° Pour l’auteur de tels faits, même commis dans un lieu privé, de diffuser ou faire diffuser l’enregistrement d’images relatives à leur commission.

«La récidive des contraventions prévues au présent article est réprimée conformément aux articles 132-11 et 132-15. »

Le 27 septembre 2010, la Ligue des droits de l’Homme (LDH) annonce avoir déposé devant le Conseil d’État un recours contre ce décret. La LDH considère que ce décret est « en violation de la Constitution et du principe de liberté d’expression ». La LDH n’a, semble-t-il, reçu aucune réponse.

Pour la première fois, le 22 décembre 2010, un homme est condamné en vertu du décret réprimant l’outrage au drapeau français. Une première fois qui ne coûte pas trop cher : M. Saïdi écope de 750 euros d’amende avec sursis pour avoir brisé la hampe d’un drapeau tricolore dans une préfecture. La veille, M. Saïdi, un Algérien venu renouveler son titre de séjour à la préfecture de Nice, a pété les plombs lorsqu’on lui a demandé une fois de plus de repasser. Il s’est emparé du drapeau qui était dans le hall du bâtiment, l’a cassé en deux et l’a jeté sur le fonctionnaire sans l’atteindre. Deux policiers l’ont maîtrisé, paraît-il difficilement.

La préfecture des Alpes-Maritimes a logiquement déposé plainte pour « dégradation de biens publics et détérioration d’un symbole de la République française ». Et, comme elle en a maintenant la possibilité, pour « outrage au drapeau tricolore ». Les fonctionnaires ont aussi porté plainte. Et M. Saïdi, en prime de sa condamnation pour outrage, a écopé de quatre mois de prison avec sursis pour rébellion.

Ce décret sur l’outrage au drapeau national était-il nécessaire pour condamner l’excité ? Évidemment, non. La dégradation de biens publics et la rébellion suffisaient. Mais vu le climat dans lequel nous a sciemment plongés le gouvernement de l’époque en lançant le débat sur l’identité nationale, faire condamner un étranger, algérien qui plus est, pour outrage, c’était trop bon. La préfecture, relais de la politique discriminatoire de l’État sarkozyste, se devait d’expérimenter cette nouvelle arme, qui sera tôt ou tard employée aussi contre les mauvais Français.

Tiens, que le FN se soit emparé des couleurs nationales pour en faire son logo, personne ne trouve ça outrageant. Amis blasphémateurs, faites vite, si vous voulez rire un peu ! Dans cette France rabougrie, peureuse, congestionnée, méchante, aigrie, pisser sur la flamme du Front national sera bientôt un outrage au drapeau qui vous coûtera 1 500 euros.

Charlie Hebdo n’a pas été poursuivi en vertu de la loi qui réprime l’outrage au drapeau. Cette loi n’a,semble-t-il, plus été appliquée depuis l’affaire Saïdi, mais elle existe toujours et les fachos s’en

serviront un jour, puisque aucune loi ne les empêche de se présenter aux élections et d’être élus… En effet, prendre le risque de laisser les clés de l’Élysée dans les mains potelées de l’extrême droite, ce n’est pas manquer de respect à la République…

Un autre exemple tout aussi absurde peut illustrer la tentative d’instauration en France d’un blasphème républicain calqué sur le blasphème religieux.

Le 17 septembre 2010, quatre islamistes vêtus de noir haranguent la foule dans le centre de Limoges. L’un des hommes est équipé d’un mégaphone, tandis que deux de ses amis tiennent un drapeau noir sur lequel est inscrite en blanc et en arabe la profession de foi musulmane. L’homme barbu à calotte blanche qui parle brandit un Code pénal français et dénonce le contenu de « ces trois mille pages » censées protéger les individus. En effet, dans ces trois mille pages, « pas une ligne qui protège le droit des musulmans ». « En France, être islamophobe est un droit », conclut-il, indigné, en jetant le Code pénal au sol. « Ce livre ne nous défend pas, donc, ce livre, nous ne le respectons pas. C’est ce livre qui doit être brûlé, pas un autre ! Tant qu’il n’a pas été modifié. » Et, plutôt que le brûler, il shoote dedans. La scène, qui a été filmée, traîne certainement encore sur YouTube.

Qu’est-il arrivé à l’excité ? Il s’appelle Mohamed Achamlane, il est le leader d’un groupuscule islamiste baptisé Forsane Alizza (« les Cavaliers de la fierté »), dissous en février 2012. Il a commis des actes bien plus graves que de jeter un livre au sol et a été condamné. Mais pour ce manque de respect au Code pénal ainsi que pour l’envahissement d’un restaurant McDonald’s (le 12 juin 2010) et l’appel au boycott de la marque, qu’il accuse de soutenir Israël, il a été jugé le 9 juin 2011 pour « provocation publique à la discrimination nationale, raciale ou religieuse ». Il a été condamné à quatre mois de prison avec sursis et à 2 000 euros d’amende. Certes, sa condamnation n’est pas uniquement due au fait qu’il a jeté un Code pénal au sol, mais il a été condamné également pour cela, sans que l’on puisse dire précisément quelle peine vaut le blasphème à l’encontre du Code pénal.

 

 

Comment peut-on sérieusement condamner quelqu’un pour avoir shooté dans un livre, quel qu’il soit ? Que ce soit le Coran, la Bible, la Torah, le Code pénal, le Code Rousseau, les Pages jaunes ou bien le deuxième tome des aventures de Valérie Trierweiler, il ne s’agit que de quelques feuilles de papier noircies d’encre. Il est particulièrement crétin de brûler un livre, mais il n’est pas très sain de sacraliser des symboles, qu’ils soient républicains, religieux ou autres.

En octobre 2010, un homme demeurant à Bischheim, dans le Bas-Rhin, s’est filmé en train de faire un avion avec des pages du Coran, puis de le lancer sur des verres censés représenter les tours du World Trade Center. Il a finalement brûlé ce qui restait du Coran avant d’uriner dessus pour éteindre les flammes. La scène a été diffusée sur le Net par l’auteur. Lui aussi a fait l’objet de poursuites pour provocation publique à la discrimination nationale, raciale ou religieuse. L’homme a été relaxé, le tribunal considérant que la vidéo n’excédait « pas les limites de la liberté d’expression » et que son auteur avait stigmatisé des « actes terroristes auxquels la communauté musulmane ne peut être assimilée ». Ouf.

 

 

Si la justice parvient à distinguer les musulmans des terroristes qui se réclament de l’islam, pourquoi la plupart des anti-islamophobes n’y arrivent-ils pas ? De la même façon, ce serait bien que la justice comprenne que, lorsque le drapeau français est brûlé ou souillé, ce n’est pas toute la France qui est visée… Et quand bien même elle le serait, pitié, halte à la chasse aux blasphèmes !