ALTERNANTES FM
Nantes, le 11 janvier 2015.

Guy,

Nous avons découvert la semaine passée sur Indymedia un texte signé de toi qui nous a quelque peu irrité tant il nous est apparu malhonnête et manipulateur.
Dans le chapeau introductif, par exemple, tu indiques que le Magazine libertaire a failli être menacé de suppression parce que « pas assez consensuel ». On t’a abusé ou ta mémoire (ou tes informations) ne sont pas bonnes. Le Magazine libertaire a été sanctionné un mois parce qu’il avait commis une faute inqualifiable : couper l’antenne après son émission, tout simplement ! Or, s’il y a une chose que tout animateur se doit de faire, c’est bien de vérifier que la radio émet toujours après son départ. C’est le B-a-ba ! C’est une preuve de respect à l’égard de la radio, des auditeurs et des autres animateurs, ni plus ni moins.

Tu laisses entendre que radio Erika serait victime d’une sorte de censure politique de notre part. Le seul problème, c’est que tu ne peux nullement le prouver. Il suffit de lire le courrier que le CA t’a adressé, courrier dans lequel il pointe trois problèmes :

– le défaut de cotisation. Il n’y a aucune raison que les animateurs de Radio Erika ne s’acquittent pas de leurs cotisations comme le font les autres animateurs. C’est une question de principe, et tu le sais bien, il y a toujours moyen de fractionner et différer les paiements.

– les lacunes techniques. Et quand nous disons lacunes, nous sommes extrêmement pondérés ! Nous n’avons jamais exigé des bénévoles qu’ils travaillent comme des professionnels ; mieux même, nous n’avons jamais songé à le faire. En revanche, nous avons toujours indiqué aux animateurs qu’il leur était possible de se former, d’acquérir un minimum de savoir-faire. Il suffit d’écouter Radio Erika pour se rendre compte à quel point, sans Olaf, la réalisation technique est catastrophique et à nos oreilles, inacceptable. C’est pourquoi nous avons exigé la présence d’Olaf à tes côtés, très conscients que nous sommes qu’il est toujours délicat d’être à la fois technicien et animateur.

– l’impréparation manifeste. Là encore, nous n’attendons pas des bénévoles (et nous en faisons partie !) qu’ils aient la facilité d’expression, de réaction des journalistes professionnels. Si Alternantes FM permet à des « citoyens », à des « acteurs sociaux » d’intervenir sur l’antenne et d’y faire leurs émissions, c’est bien parce que nous considérons important de faire entendre des voix différentes, des voix qui ont quelque chose à dire. Or, à de nombreuses reprises, nous avons eu le sentiment (le mot est faible) que tes émissions n’étaient absolument pas préparées, qu’en d’autres termes, tu meublais, et très maladroitement, ton créneau en sautant du coq à l’âne.

Tu le vois, il n’y a rien de très « politique » dans les remontrances que nous t’avons faites, et ce sont sur ces remontrances-là, sur ce constat, que nous attendions de ta part une réaction et des propositions. Mais si tu souhaites que nous parlions de « politique », parlons-en. La lecture d’Indymedia nous a fait découvrir que lors d’une émission de janvier 2014, Olaf avait défendu Dieudonné en qui il ne voyait qu’un humoriste corrosif. Es-tu solidaire des propos d’Olaf ? Parce que vois-tu, pour nous, Dieudonné n’est plus qu’un antisémite lié à l’extrême-droite, doublé d’un businessman avisé. Que nous conseilles-tu de faire ? Devons-nous nous « asseoir » sur notre charte (« Radio pluraliste, humaniste et multilingue, elle lutte contre toute forme d’exclusion, d’intolérance et de racisme ») ou trouves-tu légitime que nous nous inquiétions que l’on défende des antisémites à l’antenne ?

Enfin, il nous semble important de rappeler une chose très simple, tellement simple qu’on l’oublie souvent. Alternantes FM n’est pas une entreprise capitaliste qui loue des créneaux à tous ceux qui désirent s’exprimer ; les bénévoles ne sont pas propriétaires de leur créneau, n’ayant de comptes à rendre qu’à leur nombril (et Dieu sait qu’en trente ans de radio, nous en avons vu défiler des animateurs qui ne connaissaient de la radio que « leur » émission !). Non, Alternantes FM a des convictions, défend une certaine idée de la radio, et confie à son conseil d’administration le soin de veiller à la « bonne tenue » de l’antenne, dans tout ce que ce terme contient d’objectif et de subjectif : quand une émission est de manière répétée indigente dans son contenu et lamentable techniquement, il le dit parce qu’il le doit aux auditeurs.

Tu t’es étonné de n’avoir pas été avisé lors de l’assemblée générale de nos griefs à l’égard de ton émission. La raison en est simple : le conseil d’administration ne s’était pas réuni depuis le printemps 2014. C’est donc le nouveau CA, élu à cette dernière AG, qui a fait le point sur la grille (et ce faisant, sur Radio Erika), comme il le fait rituellement. Tu sembles étonné que l’ambiance de l’AG y ait été « sympa et convivial ». Mais pourquoi en aurait-il été autrement ? Le CA n’a rien à te reprocher en tant qu’individu, il juge seulement que tu t’es montré incapable d’animer de façon acceptable ton émission.
Ceci étant dit, si tu ne te reconnais pas dans ces valeurs et dans ce fonctionnement, ce qui est ton droit le plus absolu, si tu considères que le Conseil d’administration est une sorte de bureau politique faisant la chasse aux émissions dissidentes, alors, sois cohérent et courageux : mets fin à Radio Erika sur Alternantes FM, et va proposer ton projet aux autres radios libres de Loire-Atlantique qui, sait-on jamais, fonctionnent peut-être plus de façon plus conforme à tes conceptions.

Ton courrier nous a déçu parce que nous l’avons trouvé malhonnête et ce faisant manipulateur. Cette manipulation a-t-elle porté ses fruits ? Pour ta gouverne, nous avons reçu à l’heure où ces lignes sont écrites en tout et pour tout cinq e-mails (d’auditeurs ou de supposés tels) « défendant » Radio Erika ; certains ont cru bon de signer leur courriel d’un vibrant « Nous sommes Erika », faisant ainsi la preuve d’un pitoyable et abject sens de l’amalgame.
Nous commençons à avoir l’habitude des bénévoles qui hurlent à la censure dès qu’on leur fait la moindre remarque, comme si leur demander d’ouvrir les bons micros aux bons moments était une ingérence politique insupportable. Se poser en victimes est toujours plus facile que d’accepter de poser un regard critique sur ce que l’on fait. Tu l’as encore prouvé, et nous le regrettons.

Le Conseil d’administration