Depuis décembre 2013, quatre jeunes gens (Chiara, Claudio, Mattia et Niccolo) sont incarcérés en Italie pour avoir participés, il y a un an, à une attaque nocturne du chantier de la ligne TGV devant relier Lyon à Turin. Ils sont accusés d’« acte de terrorisme à l’aide d’engins pouvant entraîner la mort ou explosifs, dégradations par voie d’incendie, violence contre agents de police, détention et transport d’armes de guerre ». Si les chefs d’inculpation ne changent pas, ils risquent une vingtaine d’année de prison. Leur procès s’ouvre ce 22 mai 2014. La solidarité s’organise.

  •  Un appel natio­nal à se soli­da­ri­ser avec les quatre inculpés du mou­ve­ment No-Tav.
  • Un texte de sou­tien de l’écrivain Eri de Lucca (mis en examen depuis le 24 jan­vier pour avoir déclaré à la ver­sion ita­lienne du Huffington Post que le chan­tier du TAV devait être saboté).
  • Un texte qui revient sur les arres­ta­tions et la qua­li­fi­ca­tions ter­ro­riste des faits.
  • L’appel des famil­les des quatre inculpés.
  • Un vieil arti­cle, déjà publié sur Rebellyon, revient sur les impas­ses de la cri­ti­que contre le projet TAV.
  • Un appel à sou­tien finan­cier.

« Vous cons­truire chan­tier. Vous contents. Vous détruire nos forêts. Nous en colère. Quelqu’un détruire vos machi­nes. Vous en colère. Nous pré­fé­rer vous en colère. Nous contents »

Le 22 mai 2014, quatre cama­ra­des ita­liens, Chiara, Claudio, Niccolo et Mattia pas­se­ront en procès pour « acte de ter­ro­risme à l’aide d’engins pou­vant entraî­ner la mort ou explo­sifs, dégra­da­tions par voie d’incen­die, vio­lence contre agents de police, déten­tion et trans­port d’armes de guerre ». Cette qua­li­fi­ca­tion cor­res­pond en fait à un acte de sabo­tage col­lec­tif mené en mai 2013, dans la lignée des mul­ti­ples atta­ques de chan­tier du Lyon-Turin. D’ailleurs, le mou­ve­ment No-Tav en Italie assume depuis plu­sieurs années le sabo­tage comme un des moyens de la lutte.

Chiara, Claudio, Niccolo et Mattia ont été arrê­tés en décem­bre 2013, sur les bases d’une reconnais­sance vocale, et sont tou­jours incar­cé­rés en sec­tion AS2 (haute sécu­rité maxi­mum). Ils sont en iso­le­ment quasi total. Ils ne peu­vent rece­voir la visite que de leurs parents, et seu­le­ment deux heures par mois. Leur cor­res­pon­dance est sys­té­ma­ti­que­ment lue et versée au dos­sier.

Leur procès aura lieu dans l’Aula-Bunker, une salle d’audience spé­cia­le­ment cons­truite à l’inté­rieur de la prison de Turin. Cette mise en scène vise évidemment à appuyer la figure du ter­ro­riste No-Tav. Les jour­naux et les médias en géné­ral par­ti­ci­pent à cette cam­pa­gne d’assi­mi­la­tion des No-Tav aux Brigades Rouges et au ter­ro­risme en géné­ral. Ainsi que les pro­cu­reurs Padalino et Rinaudo, en charge des dif­fé­rents procès No-Tav, et qui cons­trui­sent leur car­rière sur le har­cè­le­ment judi­ciaire des oppo­sants à la ligne Lyon-Turin. Les inculpés ne pour­ront même pas être pré­sents dans cette salle d’audience : ils par­ti­ci­pe­ront au procès chacun.e depuis leur cel­lule, par visio­confé­rence, et ceci à la demande des pro­cu­reurs.

Si la qua­li­fi­ca­tion de ter­ro­risme avec ten­ta­tive d’atten­ter à la vie d’autrui est main­te­nue, Claudio, Mattia, Niccolo et Chiara ris­quent au moins 20 ans de prison.

En France, un appel à la soli­da­rité autour de la date du 22 mai est sorti. Il est pos­si­ble d’écrire aux cama­ra­des en prison : Chiara ZENOBI, Casa Circondariale Rebbibia via Bartolo Longo, 92 000156 ROMA – Claudio ALBERTO, Casa CIrcondariale Via Arginone, 327 44122 FERRARA – Mattia ZANOTTI et Niccolo BLASI, Casa di Reclusione Via Casale San Michele, 50 15100 ALESSANDRIA.

Et d’envoyer direc­te­ment de l’argent à la caisse de soli­da­rité No-Tav :

Intestazione : Francesca CAMICIOTTOLI – IBAN : IT 27A0316901600CC0010722513 – BIC/SWIFT : INGDITM1

Quelques dates impor­tan­tes à venir :

  • Le 10 mai, manif natio­nale de sou­tien aux inculpés à Turin, départ 14h piazza Adriano [plu­sieurs mil­liers de per­son­nes ont mani­festé à Turin sous haute sur­veillance poli­cière].
  • Le 15 mai, Rendu de la cour de cas­sa­tion sur la demande de liberté condi­tion­nelle des quatre.
  • Le 22 mai, début du procès pour anti­ter­ro­risme et cam­pa­gne de sou­tien inter­na­tio­nal.
  • Manifestation à Rennes (départ sur le parvis sud de la gare de Rennes) à 15h, samedi 24 mai.

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Elargir la focale

[…] ce monde ne manque pas, dans son aber­ra­tion, d’une cer­taine cohé­rence. Au moment où la pro­cé­dure contre ceux de Tarnac touche à sa fin et promet de donner lieu, envers et contre tout, à un procès anti­ter­ro­riste, Manuel Valls res­sus­cite comme si de rien n’était la rhé­to­ri­que de l’ « ultra-gauche » contre une mani­fes­ta­tion des oppo­sants au projet d’aéro­port de Notre-Dame-des Landes – et les arres­ta­tions que cette rhé­to­ri­que a géné­ra­le­ment pour tâche de pré­pa­rer. Dans le même temps, en Italie, l’arse­nal anti­ter­ro­riste est déployé contre le mou­ve­ment Notav. Cette fois, c’est l’une des innom­bra­bles atta­ques du chan­tier par le mou­ve­ment qui en four­nit le pré­texte. Quatre cama­ra­des – Nicco, Mattia, Claudio et Chiara – sont accu­sés d’avoir par­ti­cipé au sabo­tage d’un géné­ra­teur du chan­tier hau­te­ment mili­ta­risé du Tav. Ils sont incar­cé­rés dans les condi­tions les plus dures depuis décem­bre der­nier, dans l’attente de leur procès qui com­men­cera le 22 mai pro­chain à Turin. Ils encou­rent vingt ans de prison. Le ter­ro­risme, ici, consiste d’après l’accu­sa­tion dans ce qu’une telle action aurait « porté atteinte à l’image de l’Italie ». La boucle est bou­clée. Manuel Valls, à peine nommé minis­tre de l’Intérieur, n’avait-il pas pré­co­nisé dans un sommet d’Interpol à Rome davan­tage de coo­pé­ra­tion face « aux formes de vio­lence pro­ve­nant de l’ultra-gauche, de mou­ve­ments d’anar­chis­tes ou d’auto­no­mes » en citant des « grou­pes vio­lents » gra­vi­tant autour de pro­jets comme la ligne à grande vitesse Lyon-Turin ou l’aéro­port de Notre-Dame-des Landes en France ?

Le recours de plus en plus dément à l’anti­ter­ro­risme ne cons­ti­tue pas une démons­tra­tion de force de l’Etat, mais témoi­gne de l’état de déli­ques­cence de son fon­de­ment – la loi. Les dia­tri­bes extré­mis­tes des minis­tres de l’Intérieur contre le Black Bloc et l’ « ultra-gauche » expri­ment seu­le­ment leur niveau de lévi­ta­tion par rap­port aux situa­tions réel­les. Ce que nous vivons, c’est l’implo­sion géné­rale de tous les cadres connus de la vieille poli­ti­que natio­nale. Les grands pro­jets d’infra­struc­tu­res euro­péens, la bana­li­sa­tion des opé­ra­tions de police anti-ter­ro­riste, les rema­nie­ments à la hus­sarde des ins­ti­tu­tions ter­ri­to­ria­les qui assu­raient jusque-là les appa­ren­ces de la démo­cra­tie sont autant de mani­fes­ta­tions de cette implo­sion, que cer­tains se plai­sent à nommer « métro­po­li­sa­tion ».

Face à cela, il y a les ter­ri­toi­res qui subis­sent encore et les ter­ri­toi­res qui entrent en dis­si­dence. Le décro­che­ment plus ou moins vio­lent d’avec le pro­ces­sus de métro­po­li­sa­tion peut pren­dre la forme d’un bef­froi anar­cho-punk sur une dépar­te­men­tale de la ZAD, d’une mani­fes­ta­tion de 200 000 per­son­nes dans le Val de Suse ou d’une assem­blée popu­laire sur le pla­teau. Ce qui se joue là, ce n’est pas une simple rup­ture avec le vieux cadre natio­nal. Car plus nous nous en affran­chis­sons, plus nous nous auto-orga­ni­sons, et plus les cir­cu­la­tions s’inten­si­fient entre ter­ri­toi­res dis­si­dents. C’est en fait tout une nou­velle géo­gra­phie qui se des­sine pour nous, et qui fait fi des dis­tan­ces comme des fron­tiè­res, tant admi­nis­tra­ti­ves que socia­les. Ne peut-on se lais­ser aller à penser que dans les temps qui vien­nent il ne soit ques­tion de « contre-som­mets » que dans la mesure où les pas­se­rel­les entre nos contre-mondes auront réussi à cons­ti­tuer une contre-force, capa­ble elle aussi d’avoir ses stra­té­gies pro­pres, de par­ta­ger ses moyens, de s’appuyer mutuel­le­ment, de pro­pa­ger en temps réel les nou­vel­les de tel ou tel front ?