Droits collectifs des salarié-e-s
Les patrons en rêvaient, désormais l’accord leur donne les coudées franches pour limiter les informations économiques au CE, imposer leur confidentialité et fixer dans un laps de temps restreint la consultation des IRP (Instances Représentatives du Personnel). Cette partie de l’accord signé par la CFDT, La CFTC et la CGC est une concession historique faite au Medef. C’est casser l’outil CE (Comité d’Entreprise) en limitant le droit des salarié-e-s à une seule et unique information sociale et économique, censurer l’expression des élu-e-s en décrétant la confidentialité de certaines informations, réduire le contre pouvoir des salarié-e-s en contraignant leur droit à l’expertise.

L’information unique :
Une information de base de données économiques et sociales unique revêtant un caractère prospectif sur les 3 années suivantes sera mise en place dans l’entreprise. Elle remplace l’ensemble des informations données aux IRP sous forme de rapports ou autres.
Un accord collectif de branche ou d’entreprise peut adapter le contenu des informations en fonction de l’organisation et/ou du domaine d’activité. Le contenu et les modalités d’utilisation du document unique devront être opérationnels au plus tard un an après l’entrée en vigueur de l’accord avec des adaptations aux entreprises selon les seuils d’effectifs fixés à 300 salariés.

La confidentialité :
L’employeur pourra estimer la durée et le caractère confidentiel des informations que les élu-e-s seront tenu-e-s de respecter. Les IRP auront désormais un délai préfix (délai accordé pour accomplir un acte dont l’expiration est sanctionné par la forclusion) pour donner leur avis sur les informations données aux élu-e-s. L’absence d’avis vaut avis négatif.

L’expert, comment réduire sont intervention ?
L’accord prévoit l’instauration de délais préfix pour la désignation de l’expert sans aucune dérogation possible. Dans un deuxième temps, limitation des coûts, le recours à un expert comptable se fera sur la base d’un barème établi par le conseil de l’ordre des experts-comptables, en fonction de l’effectif de l’entreprise. Il sera financé à hauteur de 20% sur le budget de fonctionnement des Instances Représentatives du Personnel. En clair les employeurs pourront en toute légalité racketter les CE. Pour les CHSCT, si plusieurs établissements sont concernés par le même projet, mise en place d’une « coordination » des CHSCT. Toujours dans un délai préfix, il est ainsi prévu une seule et unique expertise avec communication à l’ensemble des CHSCT concernés. C’est un pan entier de la jurisprudence qui disparaît au grand dam des salarié-e-s .
Les patrons pourront aussi jouer la montre, avec un délai d’un an pour la mise en œuvre des obligations liées au seuil des effectifs (11 salarié-e-s et plus de 50 salarié-e-s pendant 12 mois consécutifs au cours des 36 derniers mois) et un délai de 3 mois pour organiser les élections professionnelles.

Comment se désengager des obligations légales et conventionnelles du licenciement économique ?
L’employeur, par un accord majoritaire ou par une procédure d’homologation de l’administration, établit un document préalablement transmis à la Direccte (regroupement unique des services administratifs) qu’il soumet à l’avis du CE. L’administration a 21 jours pour se prononcer sur le document et le projet du PSE (Plan de Sauvegarde de l’Emploi). A défaut d’une réponse expresse, les licenciements sont ainsi homologués. Le salarié peut saisir la justice dans un temps plus court (12 mois), si le motif du plan social n’est pas valable.
L’employeur peut aussi déroger aux dispositions du code du travail concernant la consultation du CE dans les entreprises de moins de 50 salarié-e-s, avec un «délai préfix », non susceptible de suspension ou de dépassement. A défaut d’accord de branche ou d’entreprise, l’ordre des licenciements pourra aussi être modifié. L’employeur pourra privilégier le critère de compétence professionnelle, critère totalement subjectif qui ne tient pas compte de la situation personnelle des salarié-e-s.

Limitation des recours devant les tribunaux :
L’accord donne entière satisfaction à Laurence Parisot, présidente du Medef, qui va enfin pouvoir « réduire l’insécurité liée aux aléas judiciaires » qui pèse sur les entreprises.
En limitant le recours possible au TGI lors de licenciements économiques au profit d’un contrôle administratif, le Medef contourne le rôle de contrôle des juges car en matière de licenciement économique, ils peuvent ordonner l’annulation du PSE et le versement de Dommages et Intérêts pour Rupture Abusive en faveur des salarié-e-s spolié-e-s.
Au niveau des Prud’hommes, les organisations syndicales signataires ont trahi les salarié-e-s qui ont recours à cette juridiction pour contester leur licenciement et faire reconnaître leurs droits.
En permettant lors de l’audience de conciliation de verser une indemnité forfaitaire minime, selon l’ancienneté, censée couvrir l’ensemble des préjudices liés à la rupture du contrat de travail, sans recours possible, c’est donner toute liberté aux employeurs de licencier à moindre frais et de brader les intérêts des salarié-e-s.
Les mauvais coups continuent pour les salarié-e-s avec un délai de prescription actuel de 5 ans ramené à 24 mois concernant l’exécution ou la rupture du contrat de travail, et à 3 ans concernant le paiement des salaires.
Le raccourcissement des délais de saisine des prud’hommes est un cadeau de plus donné au patronat afin de réduire le nombre de procès dans cette juridiction.
Maintien dans l’emploi ou de compétitivité :
Comment le Medef recycle les accords «compétitivité emploi» présentés sous l’ère Sarkozy ?
Afin de maintenir l’emploi, en cas de graves difficultés conjoncturelles rencontrées dans l’entreprise, il est possible de conclure par accord majoritaire d’entreprise, la baisse de salaires, l’augmentation ou la réduction du temps de travail. Tout est possible dans un laps de temps de 2 ans, dans l’attente d’un retour à une éventuelle « bonne fortune » décrétée par l’employeur.
Le patronat obtient la remise en cause de la hiérarchie des normes et du principe de faveur, qui dit qu’un accord ne peut qu’améliorer le code du travail ou la convention collective. Ce cadeau fait aux patrons complète la loi Fillon du 4 mai 2004 qui permettait déjà de déroger par accord l’adoption de dispositions moins favorables aux accords de branches.
« En cas de refus du salarié-e la rupture de son contrat de travail qui en résulte s’analyse comme un licenciement économique dont la cause réelle et sérieuse est attestée par l’accord précité. »
« L’entreprise est exonérée de l’ensemble des obligations légales et conventionnelles qui auraient résulté d’un licenciement collectif pour motif économique ».
L’accord « compétitivité des entreprises et sécurisation de l’emploi » signé entre le Medef, CFDT, la CFTC et la CGC est une régression sociale historique.

Pour que cet accord soit validé, il doit être transposé en dispositions législatives d’ici fin mars, le gouvernement veut accélérer la procédure. D’ores et déjà le Medef fait pression pour que le texte soit voté in-extenso.

Exigeons des député-e-s et sénateur-trice-s
qu’il-elle-s ne transposent pas dans la loi
la régression sociale !

Le 5 mars et après, unité pour gagner !