Mais que sont-ils donc (peut-on dire « qui »?) pour être traité ainsi ? Après avoir quitté le terrain du Pendule, à Trentemoult, juste avant d’être, là aussi, expulsés, ils avaient trouvé « refuge » sur un terrain en friche, à l’entrée des anciens abattoirs de Rezé. Une parcelle dont le propriétaire est Nantes Métropole. Un terrain sans électricité, sans eau, sans sanitaires, mais à l’écart de toute population. Un terrain abandonné, tout comme eux, inconstructible car situé dans le couloir aérien de l’aéroport de Bouguenais. Mais pourtant, même là, leur présence était encore insupportable. il fallait s’acharner, s’acharner encore, dénigrer, flatter les instincts les plus méprisables, donner de la crédibilité à la haine, la diffamation, les éternels fantasmes sur ces gens qui ne peuvent être que délinquants, parasites, mafieux, proxénètes en faisant appel à des statistiques éthniques non officielles sur la délinquance, etc… Quand la misère dérange, elle doit alors faire peur et rien n’est plus facile que de susciter et d’alimenter la peur.

Lorsque les familles vivaient sur le site du Pendule, situé au cœur d’un quartier touristique et bourgeois de la commune, plusieurs adjoints au maire socialiste, Mme Coutant, M. Landier, M. Quénéa, venaient régulièrement sur place, ne serait-ce que pour procéder à un décompte des caravanes et de leurs occupants. Des sanitaires, certes peu entretenus, avaient même été installés. Des raccordements à l’eau et à l’électricité avaient été facilités. Des poubelles ont même été prêtées avant d’être retirées au profit d’une benne à ciel ouvert. Rappelons que ce terrain de Trentemoult n’était pas un terrain municipal puisqu’il appartient au Port-Autonome Nantes-St-Nazaire et est loué à la société Le Voyage à Nantes. Mais depuis l’arrivée de ces familles sur le site des abattoirs, les préoccupations de la mairie semblaient manifestement tout autres. Jamais aucun de ces mêmes élus n’est venu s’enquérir de leurs conditions de vie.

Mais depuis la prise de fonction de Jean-Marc Ayrault à Matignon , Gilles Retière, maire de Rezé, s’est retrouvé propulsé président de Nantes Métropole : à ce titre, il n’a pas hésité longtemps à demander, une fois de plus, l’expulsion qu’il ne pouvait pas solliciter en tant que maire.

Mais qui sont donc ces gens que M. Retière, au mieux, ignore, mais plus communément, sur lesquels il s’acharne ?

Des familles, parents, grands-parents, oncles, tantes, enfants, qui « résident » depuis des années sur la commune de Rezé, ballotés au gré d’expulsions qu’ils anticipent pour en éviter le traumatisme. La plupart d’entre eux n’ont qu’un souhait : avoir un bout de terrain et pouvoir y vivre comme tout le monde, rechercher et trouver du travail, permettre aux enfants de poursuivre leur scolarité sans les angoisses de l’expulsion, bénéficier du « minimum » sanitaire qui, malgré les engagements de la mairie devant les médias, leur est refusé, s’insérer, vivre comme tout le monde, tout simplement.

Gilles Retière dans ses voeux de « belle année 2013 » en tant que maire de Rezé parlait pourtant de « Soutien aux publics fragiles ». Depuis longtemps, il n’en finit pas d’ailleurs, à longueur de bulletins municipaux, de promouvoir son action en direction des plus défavorisés.

Les paroles sont une chose. Les actes en sont une autre. Ainsi au mois de novembre dernier, Nantes Métropole a fait appel de la décision du tribunal de Nantes de ne pas expulser le terrain des abattoirs ( le juge se référant notamment à la publication de la circulaire inter-ministérielle). Dans le « plaise à la cour » produit alors par l’avocat de Nantes Métropole, il est fait mention de la limite d’ordre matériel de la collectivité locale : « Les ROMS représentent une population d’environ dix millions de personnes en Europe centrale, dont un à deux millions en ROUMANIE, ll est évident que les collectivités de I’agglomération nantaise dont les moyens et les budgets sont limités, ne peuvent intégrer l’ensemble des ROMS présents en EUROPE ». Sans commentaire…

Qu’il soit maire ou président de communauté d’agglomération, M. Retière ne connait qu’une seule voie, celle de l’expulsion. Il n’a aucun sens du dialogue. C’est en outre un irresponsable qui fait peu de cas du coût important de ces expulsions pour les deniers publics. Que penser d’un élu qui ne parvient à envisager d’autre solution que de renvoyer la résolution d’une difficulté à la commune voisine ou à la communauté de communes d’à côté ?

Que peut-on dire d’élus qui bafouent la trêve hivernale, passent d’une stratégie du découragement en n’apportant même pas le minimum vital à des familles dans le plus grand dénuement, à celle du tout répressif en pourchassant, expulsant, sans solution de relogement préconisée par les directives ministérielles, alors qu’ils se revendiquent de la même majorité politique ? Alors que des fonds européens existent pour aider les collectivités territoriales qui le souhaitent.

Certes conformément à la circulaire ministérielle d’août dernier, concernant les terrains illicites, un « diagnostic » social a été effectué auprès des habitants du terrain des abattoirs. Mais quand ces mêmes familles ont appris qu’elles allaient être expulsées, personne n’est venu le transmettre la moindre information quant aux conclusions de ce fameux diagnostic. Dispositif fantoche ? Poudre aux yeux ? Sans doute la mairie de Rezé (ou Nantes Métropole), annoncera-t-elle prochainement qu’elle compte reloger une famille, en enrobant sa démarche d’un beau discours vantant la « bonne volonté » des élus.

Alors, tant pis pour tous les enfants scolarisés, tant pis pour les personnes malades, fragilisées encore plus, tant pis pour la précarisation qui s’ajoutera à la précarisation, peu importe où ils iront du moment qu’ils aillent ailleurs, le plus loin possible de Rezé et de l’agglomération nantaise.

Ce week-end, suite aux menaces verbales de la police leur indiquant que leurs caravanes seraient détruites lundi, ils se sont déplacés une nouvelle fois, la septième en trois ans.

Est-ce bien étonnant ? Sous la gouvernance de Mr Valls, jamais il n’y a eu autant d’expulsions de Roms en France et notre pays vient, une fois de plus, d’être condamnée par le Comité européen des droits sociaux, le 2 février 2013, pour le traitement qu’il réserve à la population Rom.

Collectif Arta vs Om