ARTICLE PUBLIE DANS RACAILLES n°64 (oct-nov 2012)

Les affaires successives du film (que dis-je un film, un étron !) « L’innocence des musulmans » et des caricatures de Mahomet dans Charlie Hebdo ont provoqué un regain de tension anti-occidental dans le monde musulman, et un regain de tension anti-arabe dans le monde occidental, ramenant sur le devant de la scène la fameuse et non moins fumeuse histoire du « conflit de civilisation » qui opposerait monde arabe et monde occidental.

Regain de tension arrivant à point nommé, pour détourner des pays en crise de leurs véritables ennemis, de leurs véritables problèmes. En effet, le système capitaliste occidental nécessite un ennemi cristallisant ses angoisses, ses peurs et ses errements pour pouvoir se perpétuer en toute quiétude, sans que personne ne reproche à ses thuriféraires leurs exactions financières et sociales. Il en allait ainsi pendant plusieurs décennies de guerre froide ou l’ennemi de la liberté était : « le Rouge », aujourd’hui (malheureusement ?) disparu. Son successeur est arrivé bien vite après la chute du mur, dans une montée en puissance atteignant son paroxysme le 11 septembre 2001 : l’Islam.
L’Islam nouvel ennemi du libéralisme, de la liberté d’entreprendre et d’exploiter à sa guise, ennemi de la liberté de commerce, de la liberté morale (la liberté peut-elle être morale, d’ailleurs ?)… La ficelle est un peu grosse, mais s’est imposée en une décennie de discours fascisant, car discours stigmatisant une religion (l’Islam) assimilée à une population (les Arabes) considérés bien souvent comme race inférieure. On peut voir dans cet amalgame récurrent entre musulman et arabe un signe de développement de théories fascisantes, comme nous l’avons connu en d’autres époques avec d’autres religions : porter la confusion pour stigmatiser est un signe qui ne trompe pas !

La chasse aux sorcières est ouverte
Les sorcières contemporaines ne sont plus marxistes, mais islamistes. Il ne s’agit plus de guerre idéologique, mais de guerre morale (d’où le fait que certains illuminés y voient le retour des guerres de religion médiévales). L’étendard du
monde occidental est toujours la liberté, (bien qu’il fasse peu de frais de la sacrifier pour prétendre la défendre) mot patamodelé dont on peut faire dire n’importe quoi pourvu que la défense de ses intérêts propres soit assurée.
L’ennemi est toujours conspué : ici, il est déshumanisé, traité de sauvage, d’anti-civilisé, d’obscurantiste, d’arriéré, de kabbaliste… et cet ennemi permet de forger une identité opposée, qui tombe à pic, car elle s’était un peu effritée ces derniers temps, voire était quelque peu remise en cause par les effets néfastes conjugués de la mondialisation et du libéralisme annihilant certaines formes de cultures collectives. Cette identité occidentale se met alors à revendiquer ce qui fait sa différence du monde musulman, elle est alors prête à entrer dans le conflit de civilisation qu’on lui a imposé.

En face, il y a l’Islam, toujours présenté comme s’il agissait d’une entité homogène et unie, « l’axe du mal », car les médias ont cette faculté de simplifier des phénomènes très complexes et diversifiés, ce qui malheureusement, contribue à amplifier le problème.
Car l’Islam est multiple, et complètement différent, qu’on soit à Rabat au Maroc, ou à Jalalabad en Afghanistan, que le musulman soit un insurgé Libyen ou un habitant des quartiers populaires français. Mais pour nous spectateurs, il devient le même fanatique voulant voiler nos jeunes filles et appliquer la charia partout ou il est en mesure de le faire. Cette vision est une déformation totale de la réalité, il y a des centaines de pratiques différentes de L’islam, avec des courants philosophiques et progressistes, ou bien des courants certes traditionalistes mais certainement plus humanistes que notre monde occidental. C’est ainsi que l’on a pu voir récemment des révolutionnaires Libyens, pourtant bien musulmans, s’insurger contre les milices salafistes et leurs diverses exactions – refusant leur pratique radicale de l’Islam – et leur reprendre des casernes par les armes.
Ce qui semble d’avantage unifier le monde musulman aujourd’hui résulte plus certainement de conditions géopolitiques que d’une appartenance religieuse commune.

L’Islam est-elle devenue la religion des damnés de la terre ?
L’islam représente aujourd’hui à la fois un refuge et un moyen de lutte pour beaucoup de jeunes déclassés ou ayant toujours vécu dans la misère. N’ayant aucune alternative, ils se réfugient dans une religion apportant un sens à l’existence et une dialectique répondant souvent à leurs souhaits. L’Islam radical intègre une morale profondément anti-occidentale, bienvenue aux oreilles d’oubliés de la mondialisation, d’habitants du Tiers-Monde, tout simplement d’êtres humains défavorisés : les damnés de la Terre. L’expression virulente de…
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