Conspiracy Watch : Valérie Igounet, vous publiez ces jours-ci une biographie du négationniste Robert Faurisson aux éditions Denoël (ci-contre). En quoi le parcours, la vie et les écrits de Robert Faurisson justifiaient-ils qu’on y consacre un ouvrage de près de 500 pages ? Qu’est-ce que la trajectoire personnelle de Faurisson dit de notre société actuelle ?

Valérie Igounet : En 2007, Faurisson a poursuivi en justice Robert Badinter qui l’avait qualifié de « faussaire de l’histoire ». J’étais une des témoins de ce procès au cours duquel Faurisson a, une nouvelle fois, déclaré que jamais personne n’avait « prouvé » qu’il était antisémite, d’extrême droite, etc. C’est là que j’ai décidé d’écrire sa biographie.

Robert Faurisson peut être considéré comme l’idéologue du négationnisme. Par lui et avec lui, cette idéologie a évolué et s’est adaptée aux contextes national et international. Elle a surtout, à la fin des années soixante-dix, été médiatisée en France. Robert Faurisson est celui qui a fait sortir le négationnisme de son confinement. C’est donc un homme central. Aussi, je pense qu’il était nécessaire de mettre au jour des faits concernant cet homme. Car il faut savoir autre chose : Robert Faurisson occulte certains aspects de sa vie. Cette attitude s’explique facilement. Des informations peuvent nuire à cette sorte d’autobiographie qu’il dresse à son propos.

C. W. : Vous l’écrivez : « depuis une quarantaine d’années, Robert Faurisson officie dans le négationnisme. Il est payé pour cela. Il vit pour cela ». Mais qu’est-ce que la trajectoire personnelle de Faurisson dit de notre société actuelle ?

V. I. : La trajectoire de cet homme montre à quel point – et de quelle manière – il a voulu laisser son nom dans l’histoire. Elle expose aussi le renouveau d’une idéologie, « l’antisémitisme », sous une autre dénomination. Elle lie l’histoire de ce propagandiste avec d’autres. Enfin, elle expose les différentes réactions françaises face à Robert Faurisson et au négationnisme.

C. W. : En lisant, en écoutant, en rencontrant Robert Faurisson et en recueillant les témoignages de ceux qui l’ont rencontré, vous êtes-vous demandé s’il croyait réellement à ce qu’il disait ? Quelle est la part d’aveuglement volontaire, de mauvaise foi, de sincérité ?

V. I. : C’est une question qu’on se pose. C’est évident. Comment est-il parvenu à ce résultat ? Pourquoi des hommes nient un des événements les plus douloureux du XXème siècle ? Pour quelles raisons ? Et est ce qu’ils y croient réellement ?

Robert Faurisson est un homme à part dans l’histoire du négationnisme car c’est un des seuls qui réfute autant son passé. La raison en est simple : les négationnistes affirment que leur discours est apolitique alors qu’il est une construction idéologique. Lorsqu’on lit le livre, je pense qu’on est convaincu que la mauvaise foi de Robert Faurisson stimule sa négation. Je considère qu’il n’y a aucune sincérité dans ce discours. Une part d’aveuglement volontaire ? Oui. Croit-il à ce qu’il dit aujourd’hui ? Je ne le pense pas. Comme vous pouvez le voir, Robert Faurisson s’était illustré avec d’autres sujets pour tenter de se faire connaître en France. Il faut également voir le négationnisme comme un moyen de devenir un homme « célèbre ». Lorsqu’on étudie l’itinéraire de Robert Faurisson, cet aspect de sa personnalité s’impose : l’homme ne voulait pas passer inaperçu. C’est un provocateur depuis de longues années.

Beaucoup de personnes rencontrées le décrivent comme un homme jusqu’au-boutiste. Certains parlent de « savant fou » : un autre de « petit prof » mais « grand fou ». Une ancienne élève salue son talent. Vous voyez, Robert Faurisson a une personnalité complexe. Son itinéraire personnel stimule sa négation. C’est évident. Mais d’autres facteurs entrent en jeu.

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