Il est toujours plus aisé d’expliquer le monde sur des bases essentialistes, plutôt que d’en dire le réel et ses contradictions bien concrètes. Plus facile de jouer sur des « civilisations » antagoniques, pour faire oublier les antagonismes tangibles ; pour faire oublier que l’histoire, c’est toujours l’histoire de la lutte des classes.

Il est très utile, en période de crise profonde du capitalisme, de pratiquer cette diversion vieille comme l’histoire. Plutôt que de montrer la face de l’impérialisme occidental, brutal, colonial, raciste, au service des exploiteurs les plus féroces, on sort du fourreau l’arme idéologique affûtée par des siècles de mensonges, celle de la « civilisation » supérieure, « universelle », pleine de promesses pour les peuples, et si tendre envers les femmes. S’ensuivent en général massacres, pillages, camps de concentration, bombardements, ingérences, propagande de guerre, élan humanitaire, tout ce que le monde entier, plongé dans les ténèbres, nous envie et nous réclame.

Au nom même de cette suprématie blanche et toutefois humaniste, on fait la chasse, en métropole, aux indigènes désormais trop nombreux, à cette minorité encore trop visible. En première ligne sur le front de la lutte des classes, les humiliés et opprimés expérimentent dans une abrupte violence, les subtilités jésuitiques du modèle républicain. Il faudrait que les classes populaires se divisent là où toute leur vie réelle les appelle à s’unir : sur les vieilles lunes idéologiques d’une bourgeoisie prête à tout pour perpétuer sa domination.

Sans complexe, les fils de Pétain endossent le costume républicain qui, orné de son passé colonial et de sa fermeté contre le parti de l’étranger, sied désormais à merveille aux gros bras fascistes. De son côté, la droite républicaine-quand-ça-l’arrange, jette des passerelles vers ses prolongements naturels. Et ce n’est pas spécialement choquant : la mécanique, ce n’est pas choquant…

C’est que nous sommes dans une saison qui s’y prête. Ce que Samir Amin nomme l’automne du capitalisme. Egyptien, il pourrait nous parler du haut de « sa » civilisation et nous contempler avec quelques siècles d’histoire bien sentis. Marxiste, il se contente d’analyser, de différencier aussi, les situations nées de ce qu’on a appelé le « printemps arabe ». Avec une certitude, oui, c’est que le capitalisme est à son automne. Et que ce qui s’ensuivra dépend de nous.

En relisant les évènements de cette façon, nous trouvons des frères : partout il existe des mouvements et des combats qui sont les nôtres. La volonté d’étouffer dans l’œuf réactionnaire les révoltes populaires est universelle. Nous y répondrons par un internationalisme conséquent. Ou nous serons condamnés à revivre l’histoire.

C’est, de notre point de vue, ce qu’il faut retenir de la conférence donnée par Samir Amin lors de l’Université d’automne du M’PEP, à Sommières dans le Gard, en octobre dernier. Que nous diffuserons.

Nous nous entretiendrons ensuite avec une militante du Comité Solidarité Georges Lille. Georges, c’est Georges Ibrahim Abdallah… Prisonnier politique en France depuis près de 30 ans, victime d’un acharnement d’Etat, Abdallah n’est pas le « terroriste » qu’on nous a présenté, foi de DST… Voir ici :

http://liberonsgeorges.over-blog.com/article-jeudi-9-fe….html