Il y a un an, Philly BDS créait le premier groupe de Philadelphie se consacrant à faire avancer le mouvement en faveur du boycott, du désinvestissement et de sanctions contre Israël. Cette création répondait à l’appel du 9 juillet 2005 de 171 organisations de la société civile palestinienne pour faire rendre des comptes à Israël jusqu’à ce qu’il se conforme au droit international et aux principes universels des droits humains pour les Palestiniens dans les Territoires occupés, pour les citoyens palestiniens d’Israël, et pour les réfugiés palestiniens.

Aujourd’hui, à notre premier anniversaire, notre réflexion porte au-delà des grandes étapes de notre boycott consommateur de l’houmous Sabra et de l’houmous Tribe, et va jusqu’aux initiatives éclatantes du mouvement BDS dans le monde au cours de l’année écoulée. Le mouvement BDS n’a pas arrêté de prendre de l’ampleur, et des défis importants se sont aussi présentés d’eux-mêmes.

Mondialement, il y a un certain nombre de succès concrets remarquables. Pour en mettre quelques-uns en évidence :

De novembre 2007 à novembre 2010, Adalah NY, basé aux États-Unis, a lancé une campagne mondiale contre le milliardaire israélien, magnat du diamant et constructeur de colonies, Lev Leviev. La campagne a conduit à son reniement par l’UNICEF, sa dénonciation par Oxfam, au retrait d’une rubrique promotionnelle de son site qui mettait en vedette des acteurs comme Salma Hayek, Drew Barrymore, et Halle Berry, et à une décision du gouvernement britannique de ne pas louer l’espace ambassade de son entreprise. En novembre 2010, la société Africa Israel de Leviev annonçait qu’elle ne s’impliquerait plus dans la construction dans les colonies.

Répondant aux appels de la société civile après l’agression d’Israël contre la flottille humanitaire vers Gaza, en juin 2010, les dockers d’Oakland, de Californie, de Suède et de Norvège ont refusé l’accostage et le déchargement de navires israéliens, imposant un blocus, si l’on peut dire, sur les marchandises israéliennes. Une action similaire historique avait été lancée par les dockers sud-africains en février 2009.

Courant de l’été 2010 également, le conseil d’administration de la coopérative Food Co-op à Olympia, capitale de l’État de Washington, a décidé de boycotter les marchandises israéliennes. La Olympia Food Co-op a maintenu le boycott face à un tollé d’oppositions, y compris une plainte récemment déposée dans laquelle des responsables du gouvernement israélien sont probablement mêlés, au moins dans les coulisses. (Voir notamment : Soutien des Affaires étrangères d’Israël aux procès contre BDS aux États-Unis – Richard Silverstein – 19 sept 2011)

Des coups déterminants ont été portés aussi à Carmel Agrexco, le plus gros importateur d’Israël, et à Veolia, la multinationale française opérant dans le domaine des services de l’eau, de la gestion des déchets, de l’énergie et des transports. Agrexco commercialise 60 à 70 % des produits agricoles des colonies israéliennes et joue un rôle clé dans le développement de l’industrie agroalimentaire israélienne et à un haut niveau, elle a exploité sa relation intime avec les autorités de l’occupation israélienne pour s’assurer un statut de quasi-monopole dans l’exportation des produits palestiniens de la bande de Gaza. Agrexco a été confrontée à une activité massive de boycott en Europe, son principal marché pour l’exportation, qui l’a obligée à déclarer faillite. Veolia, mêlée à un certain nombre de projets israéliens, dont le tristement célèbre projet de tramway visant à relier les colonies de Cisjordanie à Jérusalem, a perdu nombre de contrats importants en Europe grâce aux campagnes BDS, et elle a annoncé des baisses surprenantes de ses profits.

Ce qui est très positif, c’est que toujours plus d’organisations et initiatives recommandant le BDS continuent de surgir partout dans le monde, et notamment sur les campus. Philly en est un bon exemple, où un groupe BDS à l’université de Pennsylvanie est maintenant actif. Une même initiative a été signalée à l’université DePaul du Michigan, et à celle de Columbia et d’autres. Même si ces actions ont connu des réussites plus ou moins grandes, leur prévalence croissante démontre qu’un vent fort pousse en avant le mouvement BDS.

Une réussite importante a été enregistrée en mars 2011 avec un boycott universitaire et culturel par l’université de Johannesbourg qui a voté la rupture de ses liens avec l’université Ben Gourion d’Israël, en raison du rôle de cette université dans l’occupation israélienne.

La liste grandissante de personnalités reconnues qui adoptent le BDS comprend des légendes de la musique comme Roger Wateers de Pink Floyd. En 2006, Waters avait programmé un spectacle à Tel Aviv. Mais des militants palestiniens et des militants pour les droits des Palestiniens à travers le monde lui ont demandé de ne pas y aller. Et en réponse, il s’est rendu en Palestine, expérience qu’il décrit lui-même comme transformatrice. Il a annulé son spectacle à Tel Aviv et il est même reparti du pays en soutien au boycott, écrivant « Quand les gouvernements refusent d’agir, les gens le doivent, avec tous les moyens pacifiques dont ils disposent ».

D’autres personnalités ont choisi d’observer le boycott et de ne pas se produire en Israël, tels que les Pixies, Elvis Costello, le regretté Gil Scott-Heron, le guitariste Santana, et le rappeur Snoop Dog. De même que les Yes Men ont retiré leur film du festival du film de Jérusalem et que le réalisateur, scénariste et critique de film, Jean-Luc Godard, a annulé son projet de participer à celui de Tel Aviv.

Des victoires importantes aussi dans les désinvestissements méritent notre attention, plus qu’on pourrait le faire ici. Pour en citer quelques-unes : en février 2009, le College Hampshire, qui devint un pionnier dans les années soixante-dix en étant la première l’université américaine à se désinvestir de l’apartheid sud-africain, a décidé de se désinvestir des 200 entreprises qui « violent les normes du College relatives à la responsabilité sociale », dont 6 entreprises qui ont d’étroites relations avec l’occupation par Israël.

En juin 2010, les étudiants du Collège d’État Evergreen, à Olympia, État de Washington, ont voté le retrait des fonds de la Fondation du collège des entreprises qui tirent profit de l’occupation illégale israélienne. Et en juillet 2010, les militants de la Voix juive pour la Paix ont présenté plus de 15 000 signatures de pétitions et cartes postales à l’attention de l’un des fonds de pension les plus importants du monde, TIAA-CREF, lui demandant de se désinvestir des entreprises réputées profiter de l’occupation par Israël des territoires palestiniens.

Ces évolutions ont montré que les populations, partout dans le monde, y compris aux États-Unis, sont de plus en plus conscientes de la nécessité d’une pression véritable, populaire, sur Israël pour mettre fin à sa politique d’apartheid, et se lèvent pour agir. Considérant que le mouvement BDS n’a, en lui-même, qu’une dizaine d’années à peine, les réalisations à ce jour sont remarquables et encourageantes. Et la tendance pointe vers des actions plus grandes dans le futur.

Rien ne montre mieux l’importance et le succès grandissants du mouvement BDS mondial que toutes les focalisations et les attaques dirigées contre lui. Toutefois, le mouvement est confronté à des défis importants pour les années à venir. Le gouvernement israélien et les groupes et institutions pro-israéliens dans le monde ont multiplié leurs efforts pour combattre le BDS. Défrayant la chronique récemment, le vote par le parlement israélien d’une loi anti-BDS. Le projet de loi était présenté par le député Ze’ev Elkin, du Likoud, et a été voté le 11 juillet 2011.

Cette loi permet aux citoyens d’engager des poursuites civiles contre les personnes et organisations qui appellent au boycott économique, culturel ou universitaire d’Israël et des institutions israéliennes – y compris des sociétés et universités. Elle empêche aussi le gouvernement de faire travailler des entreprises qui initient ou se conforment à de tels boycotts. D’après Elkin, la mouture définitive du projet de loi qui a été votée est « végétarienne », parce les dispositions qui criminalisaient le boycott en ont été supprimées. La loi a provoqué une grande controverse tant à l’intérieur qu’à l’extérieur d’Israël. Elle a été dénoncée partout dans le monde. En effet, même de nombreux parlementaires israéliens se sont exprimés publiquement contre cette loi.

Cette loi n’est pas le seul cas de « retour de bâton » contre BDS. L’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) intervient de plus en plus ouvertement sur la question du BDS. En mars de cette année, des organisations ont fait passer l’information que les Renseignements militaires israéliens avaient créé une nouvelle unité chargée de localiser les groupes à l’étranger, comme en Cisjordanie et dans la bande de Gaza dont l’objectif était de « délégitimer l’État d’Israël ». L’unité va surveiller, parmi un panel apparemment illimité de cibles possibles, les militants de BDS.

Plus inquiétant peut-être encore, le mois dernier, 11 étudiants de l’université Irvine de Californie, les « Onze d’Irvine », ont été déclarés coupables de complot visant à perturber, et de tapage lors d’un discours de Michael Oren, ambassadeur d’Israël aux États-Unis. Certains peuvent voir dans ces réactions comme un présage inquiétant de ce qui est à venir dans ce pays comme à l’étranger. D’autres, dont Philly BDS, voient les choses autrement, comme un signe sans équivoque que le mouvement BDS est au premier rang, et ne peut plus être ignoré. Il devient général.

La direction israélienne a manifesté sa crainte du mouvement BDS de la façon la plus claire possible, en l’interdisant. Et si nous ne minimisons pas les difficultés véritables auxquelles sont confrontés nos courageux alliés, comme les Onze d’Irvine et les nombreux militants BDS en Palestine qui ont été emprisonnés pour leur militantisme, nous préférons voir dans ces réactions la certitude que nous faisons la différence, que nous construisons un mouvement irrépressible et durable pour la justice en Israël/Palestine.

Liste de travail de la campagne BDS France

Pour écrire : bds-france@googlegroups.com

(merci d’envoyer peu de messages – pas de hors sujet svp)

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