Goizeder TABERNA

Entretien avec Me Julien BREL / Avocat de la partie civile dans le dossier Jon Anza

Un an est passé depuis que le corps de Jon Anza avait été retrouvé «par hasard» à la morgue du CHU de Toulouse, le 11 mars 2010. Disparu en avril 2009, ce militant basque avait fait l’objet de recherches infructueuses diligentées par la procureure de Bayonne. Recherches criblées de «dysfonctionnements» selon le parquet. Repris en mains par une juge d’instruction toulousaine, l’enquête suscite de nombreuses interrogations à l’avocat de la partie civile, Me Julien Brel.

De manière générale, où en est l’enquête sur la disparition et la mort mystérieuse de Jon Anza ?

L’enquête avance très très doucement, trop doucement en tout cas à notre goût. Nous avons fait beaucoup de demandes d’actes. Nous avons reçu certaines réponses, mais nous n’avons pas reçu de réponse pour toutes les demandes formulées. Nous avons donc le sentiment que ce dossier n’avance pas autant qu’on le voudrait, autant qu’il le faudrait compte tenu de la gravité des faits.

En un an, nous avons pu avoir plus d’information sur ce qui avait pu se passer, mais aucun élément déterminant sur les raisons pour lesquelles il est décédé.

Que diriez-vous sur la communication avec la juge d’instruction toulousaine ?

Les contacts avec la juge d’instruction nous semblent être beaucoup trop irréguliers. Surtout, nous avons du mal à comprendre quelle n’ai pas encore reçu la famille de Jon Anza. Il nous aurait paru intéressant de la recevoir de manière formelle pour lui expliquer quels étaient les éléments du dossier, où en était l’enquête… Enfin, ce sont des choses qui se font habituellement avec des personnes qui se portent partie civile.

Avez-vous des éléments d’explication sur les «dysfonctionnements» constatés entre les différents services, hôpital, police judiciaire… ?

On continue à nous parler de dysfonctionnements à tous les étages. Au niveau du procureur de Toulouse, on nous explique qu’une enquête avait été diligentée [pour élucider la disparition inquiétante de Jon Anza, ndlr] ; un fax avait été envoyé au commissariat. Fax qui est manifestement arrivé mais qui n’a pas été traité. Sans nous donner plus d’explications. Le procureur ne s’était pas, par ailleurs, inquiété du devenir de cette enquête. Les problèmes de communication entre le CHU de Toulouse et la police de Bayonne ne sont pas non plus élucidés. A chaque fois qu’on soulève un lièvre, soit on nous offre des explications plus alambiquées les unes que les autres, soit on n’en a pas. Cela nous laisse un goût amer sur ce dossier.

Où en est l’expertise médicale sollicitée par la juge d’instruction ?

Nous n’avons encore reçu aucune conclusion. Cette expertise devait prendre en compte l’état de santé originel de Jon Anza, et essayer d’envisager, par rapport aux constatations médicales intervenues après son hospitalisation le 30 avril 2009, les causes de sa mort.

Quelle est l’hypothèse officielle ?

Pour la police, la mort de Jon Anza est naturelle, due à une embolie pulmonaire qui a provoqué une crise cardiaque. Mais nous, nous voulons savoir qu’est-ce qui a pu provoquer l’embolie pulmonaire.

Qu’est-ce qu’il en est de la saisine du ministre de la Justice pour une enquête interne du parquet de Bayonne ?

Silence radio. On avait relancé les services du ministère au mois d’octobre, mais sans réponse. Le ministère ne juge même pas utile d’interroger ses services pour savoir qu’est-ce qui a pu dysfonctionner, face à une demande légitime de la famille d’un disparu qui est retrouvé presque un an après.

S’ils n’ont rien à cacher, qu’ils assument au moins les dysfonctionnements en faisant une enquête. Le silence est lourd de sens. Manifestement, la transparence n’est pas du côté du ministère de la Justice. Il semblerait que toute l’artillerie habituellement déployée par les policiers dans le cas de disparitions inquiétantes, telle que l’affichage d’avis de recherche, ne l’ait pas été pour la disparition de Jon Anza.

Avez-vous le sentiment que l’on freine volontairement l’enquête ?

En tout cas, en une année, nous n’avons pas appris grand-chose. Manifestement, certaines personnes ne veulent pas que toute la vérité soit faite sur ce dossier.