… Nos relations tribales, notre engagement avec le monde, mais aussi les nouvelles techniques de surveillances et de communications nous informant à tout moment de la montée et de la chute de toutes choses, font que nous avons besoin d’une nouvelle expérience du réel…

… Le carcan étroit et idéologique qui maintenait nos idéaux dans un firmament hypothétique et toujours étincelant, hors de ce monde et loin de nos vies, s’est depuis longtemps brisé. Leurs substances se répandent désormais non plus en tant que promesse éternelle et incongrue de liberté, mais comme le miel : En Abondance…

… La révolution est dors et déjà permanente et présente. Elle se construit et se nourrit de la multiplicité. Elle s’échappe et nous traverse parfois le long d’une ligne de front. Mais déjà partout, l’on recommence à se heurter au sens commun…

… Nous sommes tous des personnages en transitions, tenant peut-être trop au passée pour être de l’avenir. Certes nous pourrions comme bon nombre de nos concitoyens nous accorder un petit moment de répit et nous réfugier dans le confort de la délégation, partageant ainsi un maigre sentiment de devoirs bien accomplis. Après tout pourquoi pas… Si c’est leur choix…

… Mais même la conscience la plus épurée et la plus repliée sur elle-même, semble déjà complètement embrouillée. « À espérer, à conspirer sa mort tout vivant est contraint. Non par la nature qui le parfait, mais par l’art et l’éducation qui le parfont. » Tout de même, quel odieux meurtre en soi est-ce de ne pas se défendre. Nous voyageons parmi des Êtres rendus indifférents, étrangers à eux-mêmes, que l’on achève peu à peu en les séparant de leur richesse passionnelle et créative…

… Ce monde s’est enivré de sa propre cruauté et nous empoisonne en nous contraignant depuis trop longtemps au seul choix impossible: le Conflit ou la Résignation. Nous sommes tout à la fois dépositaires de l’histoire et historiquement dépossédés. La contestation de la société dans son ensemble est donc le seul critère d’une libération envisageable…

… Cette aversion quasi capricieuse que nous éprouvons à nous définir, nous offre une liberté grandiose. Nous savons fort bien, un sourire au coin des lèvres, que si la société venait à nous comprendre, tout serait fini… Nous serions déjà paralysés. Ne pas communiquer est encore un moyen de communiquer, certes plus hostile mais plus efficace aussi…

… Nous agrégeons d’un exil à l’autre un ensemble de lignes de force, un maillage diffus que nous jalonnons de quelques signes imperceptibles. Les portes des squats ne sont-elles pas de ces gigantesques trous béants, que nous maintenons ouverts par-delà l’infini des nouveaux territoires paradisiaques…

…La discontinuité de notre présence a de quoi déconcerter en vérité, mais nous participons à tout cela comme en toute chose, avec un sérieux goût de la démesure. L’angoissante question de la possibilité ne se pose plus. Il est désormais de ces moments, où le fonctionnement de la machine devient si odieux, si brutal, qu’on ne peut plus la nier, ou feindre d’avancer quoi qu’il en coûte…

… La fête insurrectionnelle se propage partout, assaillant, dispersant et rebondissant aussitôt. Les techniques, les moyens et les limites se confrontent, se projètent et se réadaptent ailleurs. Il y a en apparence du romantisme à occuper ainsi la rue, à voler dans les magasins, se battre la nuit et faire l’amour le reste du temps. Pourtant ne meurt-on pas également dans le monde sensible ou sensiblement en-dehors du monde ?…

… L’ordre et son parti-pris sinistre en appellent à la Raison d’État. Le monstre contrôle nos identités jusque dans notre ADN. Et du néant surgissent et se multiplient ces horribles désirs de sacrifice. Nos menottes ne sont plus uniquement faîtes de métal, mais elles sont aussi en forme de cellules neurologiques, de petites pensées névrotiques qui nous glacent le sang et nous anesthésient…

… Nous avons longuement appris l’art de jouer et de nous déjouer des conflits, afin de faire apparaître ces réalités sous-jacentes. Par la critique en acte, nous nous découvrons de nouvelles complicités. Chacun se révélant tant dans son rôle de gardien que de prisonnier…

… Certes, nous forçons parfois dangereusement le monstre à se manifester dans son dispositif. Mais en toute vraisemblance, parti-pris et déterminismes mis à part, ne devenons-nous pas tout simplement ce que nous sommes ?…

… S’il nous faut courir le risque de l’idée d’un délire propre à la raison, alors autant planter son regard dans celui du monstre. Comme si nous eussions voulu plonger une lame encore chaude et fumante dans un grand baque d’eau froide… Peut être cette fois-ci encore, y trouvera-t-on de quoi disséquer la bête et son imposante imposture…

… La société de l’abondance et de la propriété privée trouve sa réponse naturelle dans le pillage. Rien d’humain ne sera réalisé tant que les individus libres et agissant ne se seront pas décidés à reprendre radicalement en main leurs volontés de vivre…

… Par leurs intensités collectives, nous vivons et faisons croître les mondes que nous habitons jusqu’à leurs rencontres… Notre grand projet, c’est celui d’une évasion généralisée… Si nous osons penser l’impensable, il nous sera plus facile de faire l’infaisable…

… Narguant l’évidence en bout de course, les plus prudes s’interrogeront : « s’agissait-il finalement d’un banquet ou du faste somptueux d’un buffet à volonté? » Nous aurions eu tort de nous priver…

… À qui possède jalousement son bonheur contre celui des autres, je le prierai instamment de ne pas parler de la pomme dont il n’a encore gouté la saveur. Si à bout de souffle, vous ne pouvez suivre, alors ne jugez pas…

… « Thanks For The Future » …

… fin des transmissions …
… reprise normale du cour de nos émissions…