Les grèves
http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4788

et les suicides de ses agents rappellent que Pôle emploi fabrique, des deux cotés du guichet, angoisse et incertitude. Lorsque le nombre de fin de droits à venir est livré à la publicité, on se souvient que l’Unedic n’indemnise qu’une minorité de chômeurs (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=2586).

Alors que, chaque semaine, la police intervient pour fermer des Pôle emploi et en évacuer des précaires qui réclament le respect et leurs droits, les discours officiels se chargent de faire oublier l’expérience concrète de millions de précaires, de chômeurs et d’intermittents de l’emploi. L’opacité des institutions de gestion de la population (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4023) doit à tout prix être préservée…

Ce qui de l’Unedic doit demeurer caché est parfaitement mis en lumière par l’exemple des recalculés des congés maladie et maternité. En avril 2009, des centaines d’intermittents on vu du jour au lendemain et sans aucune explication, le montant de leur allocations amputé voire réduit à zéro durant plusieurs mois.

Leur point commun ? Tous ces salariés avaient été en congé maternité, congé maladie ou en formation en 2008 ou 2009 et s’étaient vu attribuer par l’Unedic une allocation que celle-ci a ensuite considéré comme erronée avant de récupérer l’argent versé « par erreur » sans autre forme de procès, comme dans d’innombrables autres cas d’« indus ». L’absence de notification de ces décisions ? Illégal. Des notifications après-coup ? Illégal. Des notifications rédigées sans « motivation en fait et en droit » ? Illégal. Des diminutions d’allocations qui ne respectent pas la quotité de revenu insaisissable au regard de la loi ? Là aussi, qu’importe… Face à la mobilisation d’une partie des concernés, on se contentera de concéder de simples réductions partielles de dette tout en continuant à la réclamer et à la prélever.

Combien de temps faut-il pour ouvrir des droits ? Combien de temps faut-il pour obtenir même un rejet de demande d’allocation spécifique de solidarité (ASS : http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4775) lorsque l’on a épuisé ses droits ? Comment savoir qu’existe, pour certains précaires, une maigre prime de 500 euros distribuée par Pôle emploi (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4411) ?

Pourquoi tant d’intermittents du spectacle qui réunissent les conditions pour être indemnisés selon les annexes VIII et X de la convention d’assurance-chômage se voient-ils ouvrir des droits pour des durées plus brèves et des montants inférieurs ? Et qu’en est-il de ceux qui pourraient être indemnisés selon la règle commune et se voient basculés en « catégorie saisonnier » parce qu’à l’instar de millions de salariés leurs pratiques d’emploi sont discontinues ? Pourquoi l’utilisation dans les Pôle emploi de panneaux d’affichages attribués par la loi aux collectifs de chômeurs, d’intermittents de précaires doit-elle, selon [une instruction Pôle emploi du 27 janvier dernier , proscrire « les messages à caractère militant » ?

D’aucuns trouveront inacceptable un trop irréfutable constat : l’arbitraire ne constitue pas l’exception mais l’une des modalités structurantes du fonctionnement de ces institutions de gestion des salariés.

Le Mouvement ouvrier avait progressivement conquis un droit du travail qui assurait des garanties au-delà des entreprises, du poste de travail. Or ce sont précisément ces retraites, ce chômage, ces droits sociaux qui constituent depuis longtemps déjà les enjeux d’une restauration, celle de la souveraineté que l’on voudrait incontestée – en fait et en droit – de la concurrence de tous contre tous. Ce n’est pas pour rien que l[a « refondation sociale » patronale (http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=3184) de la fin des années 90 s’est d’abord appliquée à l’Unedic avec le Pare…

Face à cela, peu de recours des premiers concernés par ces décisions infondées en droit qui les spolient et les brisent ; moins encore de procédures juridictionnelles, une fabrication jurisprudentielle quasi inexistante. Le droit social est bien ce « droit diffus » dont seuls ceux qui l’ordonnent paraissent en mesure de se saisir. Face à cela, peu de conflits ouverts et, si ce n’est aux forceps, aucun espace public pour les mouvements collectifs qui savent ce que peuvent ces institutions et en font, plutôt que rien, quelque chose, une cause.

Comme ce fut le cas à une plus large échelle en 2004, suite à l’amputation rétroactive de doits ouverts, nous, recalculées par l’Unedic, nous préparons à porter plainte. Comme ce fut le cas durant les années 80, avant l’obtention d’un bien insuffisant RMI interdit aux jeunes, puis durant les 90, lorsque les mouvements de chômeurs et de précaires étaient réunis par le mot d’ordre « un revenu c’est un dû », puis, de nouveau, lors de la lutte des intermittents entamée en 2003, il n’y a pas d’autre choix que d’agir ensemble contre ce qui nous détruit.

Il est temps que les chômeurs, les intermittents et l’ensemble des précaires se rencontrent et agissent pour leur compte :

http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4863

Des recalculées Unedic : http://intermittentsrecalcules0809.over-blog.com/
Recalcules0809(at)cip-idf.org

Coordination des intermittent et précaires (Idf)
http://www.cip-idf.org/article.php3?id_article=4413

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Quand des chômeurs interpellent l’Unedic

Dans l’enceinte du palais de justice de Paris, des précaires dénoncent l’assurance chômage comme une « zone de non-droit ».

« Mais vous voulez nous endormir ou on va parler de la réalité maintenant ? » Vendredi soir, dans la salle des Criées du tribunal de grande instance de Paris, sur l’île de la Cité, Jean-Paul Domergue, directeur juridique de l’Unedic, disserte depuis un gros quart d’heure devant l’Association française de droit du travail (AFDT); : il a refait l’histoire de la fusion ANPE-Assedic, il a défendu « l’activation des dépenses passives », justifié le recours aux opérateurs privés de placement des chômeurs pour « stimuler l’opérateur public jugé trop inefficace »… Mais dans le public, une voix non autorisée, celle de l’un des animateurs de la Coordination des intermittents d’Île-de-France (CIP-IDF), vient de l’interrompre : « La réalité, c’est quoi ? L’Unedic est une zone de non-droit : on se fait menacer, on vit dans la peur, on a les banquiers, les huissiers qui viennent chez nous, et monsieur Domergue nous endort… Mais qu’est-ce que vous croyez ? Le cauchemar ne s’arrêtera pas en nous endormant ! »

Dans l’assistance, à l’heure où les ombres des fins de droits hante l’arrière-ban de la scène politique, d’autres se lèvent et témoignent. Certaines, des chômeuses qui ont été en congé maternité ou en congé maladie ces deux dernières années, décrivent une assurance chômage où « l’arbitraire ne constitue pas l’exception, mais l’une des modalités structurantes »: l’administration leur a attribué une allocation, ensuite considérée comme erronée, et elle a, selon ce groupe de recalculées, décidé de récupérer « l’indu » sans notification, ni prise en compte de la quotité insaisissable, privant des centaines de chômeurs d’indemnisation pendant des mois. « Comment se fait-il que l’Unedic prélève des montants sur nos comptes sans même prendre la peine de nous avertir ? » lance une des recalculées. Un peu plus tard, le directeur juridique de l’Unedic se contente de répondre que l’affaire ne concerne pas son organisme, « qui n’est plus opérationnel » dans le système, mais Pôle emploi. « Normalement, on ne peut pas recouvrer dans n’importe quelle condition », concède-t-il. « Vous êtes dans votre bunker et vous ne respectez pas le droit le plus élémentaire », rétorque un militant. Une plainte va être déposée à la Halde et, surtout, l’affaire sera portée prochainement devant les tribunaux compétents.

Thomas Lemahieu, L’Humanité