Fraternisation de tous les Sans-Papiers !

La direction confédérale termine le grand combat orchestré pour s’achever au 49ème congrès de la CGT.

A compter du 7 décembre, des délégations réjouies (et sélectionnées) de sans-papiers régularisés dans le cadre de la loi instituant l’immigration choisie, viendront à Nantes témoigner du triomphe d’une stratégie pourtant aisément critiquable.

Le combat syndical, avouons-le, a connu de meilleures mises en scène pour n’obtenir que le simple perfectionnement d’une loi scélérate…

La 13ème résolution de notre 48ème congrès (mars 2006) affirmait que la CGT était pour la régularisation de tous les sans-papiers. Cette résolution n’a cessé d’être violentée et détournée à des fins opportunistes. Sinistre exploitation que celle de la misère des centaines de milliers d’en dehors, citoyens irréguliers en France.

Le montage théatral réalisé par quelques personnages douteux à la direction confédérale aura permis :
– de contribuer à une régularisation massive des patrons voyous,
– la fourniture d’un personnel dévoué et gratuit : des militants transformés en supplétifs de la préfecture, sélectionnant en ses lieux et place les dossiers acceptables !
– en surmédiatisant ce bricolage de lutte, de dissimuler tous les combats sociaux qui n’ont pas été favorisés par la direction confédérale ;
– en contradiction avec nos principes, les sans papiers grévistes n’auront jamais été les acteurs de leur propre lutte. Ils ont été très lourdement encadrés par un appareil qui a empêché toute velléité d’autonomie. Jusqu’à voir certains délégués sans-papiers “mis à pied” et virés des réunions organisées à Montreuil, parce que trop critiques !…

En deux ans : que de mensonges de la part de l’appareil confédéral et notamment de Mme Blanche et de Mr Chauveau

On a parlé d’une première vague de grévistes en 2008, puis d’une deuxième et d’une troisième qui n’aura jamais lieu. En vérité, la deuxième vague aura été donnée par la Préfecture qui expliquera dans un communiqué de presse qu’il s’agissait en fait de dossiers de substitutions accordés en remplacement de dossiers irrecevables.
Montreuil et ses relais parisiens arrêteront le mouvement sans qu’on s’en rende compte, en affichant un score relativement médiocre : 2000 régularisations, pour une population sans papiers de 200 à 400 000. Il est d’ailleurs intéressant de noter que, dans la même période, des petits patrons, en dehors des grands circuits de syndicats patronaux, ont réussi eux aussi à faire régulariser des sans papiers (environ 2500).

On apprendra, début décembre 2008, que le ministère de l’immigration avait accepté d’envoyer une circulaire de régularisation dans toutes les préfectures.. Circulaire au demeurant très peu favorable aux sans papiers, puisqu’elle imposait des conditions quasiment inaccessibles pour la majorité des étrangers en situation irrégulière..
On cherchera vainement pendant un an le texte de ladite circulaire, que toutes les préfectures interrogées nient avoir reçu et dont on constate bien au fil de l’année qu’elle n’est pas appliquée, et pour cause !

En effet, au moment du lancement du second mouvement soit un an après, on apprendra comme d’aucuns le supposaient et le dénonçaient, que cette circulaire n’a jamais existé en que c’était un mensonge grossier de la CGT destiné à faire taire ceux qui, à la rentrée 2008, voulaient continuer, voire étendre la lutte.

Sans aucune logique on nous parlera ensuite d’un “second acte” sans véritable lever de rideau. Constitué par les déboutés de la première vague, récupérant un bon tiers des occupants de Baudelique (les Sans-papiers de la CSP 75 qui occupaient la Bourse précédemment), ce deuxième acte fait dans le spectaculaire mais perd rapidement de son énergie et reste strictement cantonné à Paris, petite couronne.
Pas de dépôt de dossiers, la mise en place d’une carte de gréviste, et bien sûr la menace bidon d’une généralisation à toute la France… En fait : il leur faut tenir jusqu’au congrès de Nantes, le 7 décembre.

De même que pour la première vague, ce nouvel épisode se construit sur un préalable avec le nouveau ministre de l’immigration : mille à 1500 dossiers acceptés en échange d’une amélioration de la régularisation dans le cadre de l’immigration choisie. Côté respect absolu de la “légalité”, on n’aura jamais fait aussi fort de la part de prétendus soutiens aux sans-papiers !

Avortée l’an passé par une indiscrétion dont un blog s’était fait écho, la direction confédérale tente à nouveau son “offensive” spectaculaire agrégeant quelques signataires croupions (plus l’UNSA et la CFDT habituellement invisibles dans le soutien aux sans papiers). C’est la fameuse lettre à Mr Fillon demandant l’harmonisation des pratiques préfectorales sur le territoire national !
On ne met surtout plus en cause la loi Sarkozy/Heurtefeux.

Pendant qu’en Ile de France, le mouvement d’occupation de sites s’essouffle à force d’expulsions policières, la confédération continue à ne pas chercher la généralisation du conflit. On demande aux seuls travailleurs sans-papiers parisiens de se battre pour les travailleurs sans-papiers de toute la France : un comble !

Par ailleurs, la Coordination des Sans Papiers 75 ne comprend pas que ce mouvement est largement nourri par ses adhérents et s’enferme dans l’occupation symbolique d’un “ministère de la régularisation de tous les sans papiers” qui, à l’instar du “ministère de la crise du logement”, finira par une évacuation. Elle avait pourtant vocation à permettre la généralisation du conflit !

Avec encore quelques capacités à mobiliser, l’Ucij (Unis contre l’immigration jetable) surenchérit sur les manifestations organisées par la CSP 75 (où l’on a noté la très faible présence de soutiens) et rameute ses troupes le 29 novembre. Elle met en tête de manif les travailleurs encadrés par la CGT et refoule la CSP bien loin derrière, provoquant le désengagement de celle-ci. L’Ucij œuvre clairement en soutien à la lettre adressée à Mr Fillon par la CGT et ses partenaires. Elle contribue par là-même à casser le mouvement autonome de la lutte des sans-papiers et à ne l’inscrire que dans des perspectives d’immigration choisie. Un comble !

-Conclusions provisoires-

Après avoir obtenu « de haute lutte » l’accord évident d’hortefeux, lors d’une réunion, des critères de régularisation répondant point par point à la politique mise en place par ce dernier, la confédération s’est engagée dans une lutte sans merci…contre tous ceux qui feraient obstacle à cet accord pour un résultat envisageable de 1500 régularisations.

Lutte sans merci y compris contre des organisations de sans papiers, comme en témoigne l’agression violente des sans papiers à la bourse du travail de Paris, occupée par ceux qui dénoncaient à juste titre l’enrôlement de la cgt comme force de remplissage de dossiers en lieu et place de la préfecture de police, et avec les critères de celle-ci…

Lutte sans merci, y compris au moyen de la démobilisation avec l’invention d’une fausse circulaire soit disant adressée aux préfectures en 2008…

La cgt s’apprête à faire un triomphe en congrès aujourd’hui à ces nouvelles orientations nous ne pouvons nous y résoudre.

Ainsi, en deux ans de “lutte”, la CGT a fait un grand pas en arrière :

1 – en diminuant l’ampleur de la revendication, elle est passée de la régularisation de tous les sans-papiers à celle des seuls travailleurs sans-papiers dans le cadre des métiers sous tension. Capitulation doublée de la collaboration active de laCGT à la mise en place de l’immigration choisie.

Il est amusant de constater que la “circulaire Besson” est quasiment similaire à celle dont la CGT s’est prévalue pendant plus d’un an, comme dit plus haut.
Cinq ans de présence, 1 an de fiches de paie, un contrat de travail : c’est un véritable échec qui ne donnera des papiers qu’à à peine 1500 des 6000 grévistes annoncés ! Ce qui est proprement scandaleux c’est d’avoir marché dans ce marché de dupes.

2 – en cassant la capacité de lutte autonome des sans-papiers dont le mouvement est pour un temps devenu un vivier instrumentalisable à ses seules fins.

La CGT a fait un grand bond en arrière dans le soutien aux sans papiers.
De même, malheureusement, que dans tout un grand tas de domaines : remise en cause du rôle des Unions locales, des syndicats, du fédéralisme, du rapport de force…

Il est grand temps que les sans papiers organisent leur grève générale, maintenant et pas dans un trimestre !
Que les sans papiers, dans toute leur diversité, se mobilisent et montent avec leurs propres revendications, avec le dossier de leurs souffrances et de leur peurs, avec leurs espoirs de vivre avec nous, ici !

Qu’ils montent vers les préfectures pour demander, par dizaines de milliers, le décret de régularisation massive et non les quelques dossiers que Besson offrira à la direction confédérale de la CGT !
Qu’ils sachent que nous serons à leurs côtés, comme nous l’avons toujours été…
Il faut que la CGT maintienne sa 13ème résolution du 48ème congrès pour la régularisation de tous les sans papiers !

C’est le message que nous porterons aux délégués du 49ème congrès de la CGT et que nous lançons vers tous les sans papiers.

Parmi les premiers signataires :

GURFINKIEL Jacques – Secrétaire Général du Syndicat CGT de l’OPH de Paris
RIOU Françoise – Ex-Conseillère Confédérale ayant charge du dossier Immigration
DAVY Jeanne – Syndicat CGT INSTN
GIMONT Lionel – Syndicat CGT Préfecture 93