RAPPEL DES FAITS

Tout comme à Calais, Mardi 22 Septembre la préfecture d’Indre et Loire et
sa petite armée de fonctionnaires et de flics Tourangeaux se sont de
nouveau distinguées par leur savoir-faire irréprochable et leur tact,
tout compte fait très professionnel.
A 6h, ils débutaient la journée à grands coups de pompes pour expulser le
squat des « glycines », jetant à la rue une bonne vingtaine d’occupants,
dont pas mal d’enfants, et bazardant toutes leurs affaires avec, sur le
trottoir.
Ce lieu réquisitionné devait permettre de faire face aux marasmes des
autorités politiques dites « compétentes », qui ont toutes jusque là
refusé de satisfaire à leurs obligations légales en matière de logement
des demandeurs d’asiles. Toutefois le Préfet a fini par se réveiller,
découvrant avec encore un bon train de retard cette initiative de
différents collectifs, associations, demandeurs d’asiles et squatteurs…
Tous ces occupants qu’ils soient D.A. ou non, se sont rencontrés autour
du même sentiment d’étrangeté face à ce monde qui se maintient de toutes
ses forces et sa violence dans une gestion infinie de sa propre déroute.

Une fois jetés à la rue, nous nous sommes tous directement retrouvés,
pour que soit au minimum dégagée une solution de relogement pour les
familles, sur le parvis d’une de ces autorités « compétentes ». Devant
les portes de la mairie, s’est alors interposée une rangée de flics et de
vigiles, nous refusant toutes possibilités de négociation et de rencontre
avec un élu. N’importe lequel aurait pourtant fait l’affaire.
Comme à leur habitude, ils nous affirmèrent protéger un bâtiment vide.
Pour en être sûr nous avons donc insisté, frappant dans nos mains et
toquant aux vitres de la forteresse socialiste. Peut être certains d’entre
nous, les éléments les plus « incontrôlables » dira-t-ON, ont ils
dans la confusion des évènements osé chanter? Nous n’en sommes plus très
sûrs…
Néanmoins, arrivèrent précipitamment de nombreux renforts évidemment
indispensables, nous arrachant un mégaphone pour l’exploser au sol. L’un
des flics tenta alors de nous agripper, mais gêné par le zèle de ses
coéquipiers, il tomba plutôt maladroitement dans les escaliers. Faut-il
ici préciser que nous retrouvions une bonne partie des mêmes troupes, qui
lors de l’expulsion des « glycines », et en maintes occasions déjà,
s’étaient permis très ouvertement et en public de nous menacer
individuellement de représailles. Bref, tout congestionné de colère, le
policier se relevant se mit à décocher des coups, frappant l’un d’entre
nous en plein visage, lui éclatant les lunettes et lui ouvrant l’arcade.
Arrêté, il sera ensuite conduit à l’intérieur de la mairie. Il aura au
moins fallu ça, pour que l’un de nous pénètre les murs de cette enceinte
fortifiée. Une autre personne se fit rattraper dans un coin de la cour par
le même flic. D’autres policiers vinrent alors en faction devant, masquant
ainsi les conditions d’interpellation plutôt violentes.
Souhaitant cessez-là le massacre, les familles et leurs soutiens
partirent par l’une des artères les plus fréquentées de Tours. Mais la
B.A.C., tout de noir vêtu et sans que rien ne permette de les identifier, se jeta de nouveau sur le groupe, tazer à la main, matraque
et coups de tonfa dans les genoux, raflant ainsi deux nouvelles personnes
au milieu de la cohue.

Les 4 interpellé-e-s seront gardé-e-s 25h en garde à vue, leurs auditions
n’ayant pris respectivement qu’un quart d’heure chacune. Leur seront
reproché entres autres, rébellions, violences sur agents, incitations à
l’émeute, et le plus magistral de tous: vol d’une casquette de flic.
Surement s’imaginent-ils que tout comme eux, nous partageons un certain
fétichisme pour les attributs républicains. Toutefois il y a de quoi
s’inquiéter, car cette fois-ci, c’est une casquette qu’ils ont glissée
dans les poches de nos sacs, mais qu’inventeront-ils la prochaine
fois…?
Entre les blagues vaseuses des policiers et leurs propos habituels sur la
fameuse « préférence nationale », l’un d’entre eux s’est tout de même
permis de dire, à un camarade entrain de se rhabiller devant lui, suite à
une fouille obligatoire:  » rhabille-toi vite avant que je te pète la
rondelle « .
Leurs rapports sont aussi extravagants que maladroits, faisant état de
coups de mégaphone portés au visage, etc… Le montage fantaisiste des
faux témoignages et des fausses preuves relevant d’un bricolage hasardeux
(jusqu’à quand ?), le procureur a du abandonner une partie des chefs
d’inculpations, mais afin de ne pas désavouer complètement ce tabassage
en règle, les poursuites judiciaires demeurent.

MORALITE

SI T’ES FLIC EN 2009,

blanc, mâle et catholique, t’as carte blanche :
tu peux t’amuser sans limite avec tes copains, par exemple à écraser les
petits gamins des quartiers sur les passages cloutés (cf. par exemple en
juin 2007 à Marseille, Nelson, 14 ans, fauché par une voiture de police
alors qu’il traversait la rue sur un passage piéton. Verdict : un an avec
sursis pour Yohan Bensadoun, le chauffeur, stagiaire à l’époque et
désormais titularisé).
Plein d’autres activités ludiques t’attendent (par exemple, organise des
« tournantes » avec ta jeune collègue, comme au commissariat de
Joué-lès-Tours il n’y a pas si longtemps…), sans oublier les grands
classiques (Street Fighter, Happy Hours etc.), tout dépendra de ton
imagination.
Si t’es arabe, ce sera un brin plus compliqué et il te faudra franchir
quelques épreuves éliminatoires avant d’entrer dans la grande famille (cf.
les témoignages édifiants sur http://regardeavue.com/,
http://regardeavue.com/sans-casque-ni-bouclier-temoigna…lice/
& http://regardeavue.com/paroles-de-policiers/)
Et si tes fins de mois sont un peu raides, paye-toi quelques outrages, ça
mettra du calva dans le café !

SI T’ES MANIFESTANT EN 2009 :

Mieux vaut pour toi être aux Jeunes Populistes ou faire une cyber-action
et militer à coups de clics derrière ton PC.
Mais si jamais l’idée saugrenue te prend d’aller dans la rue à plusieurs
(« en bandes organisés », donc…), ne serait-ce que pour réclamer
l’application de la loi, du droit d’asile et porter assistance à des
personnes vulnérables mises en danger, ton humanisme radical n’est pas
tolérable, pour toi, ce sera la double, voire la triple peine : coups,
insultes, séquestration et enfin, racket légalisé et séjour tout compris à
l’ombre des barreaux.
« Le pays des droits de l’homme », c’est bon pour le folklore républicain,
faire venir les touristes et se refaire une santé à la tribune de l’ONU.

Si les tonfas étaient en mousse, si les uniformes étaient juste sortis
pour Carnaval, toutes ces représentations grandguignolesques des forces du
désordre, ce 20 septembre à Tours comme d’autres jours et ailleurs,
prêteraient à rire, tant ces spectacles de rue, au déroulé bien rôdé,
s’inscrivent dans la grande lignée du comique troupier de tradition
française, entre le gendarme de St Tropez et les Charlots.
Hélas, les figurants de ces représentations s’y croient beaucoup trop, les
metteurs en scène manquent de légèreté comme d’inspiration, et une
certaine lassitude gagne le public. Hélas, les coups, les insultes, les
humiliations et les condamnations sont bien réelles.
Hélas, ces gesticulations pathétiques d’un pouvoir aux abois tentant
vainement de faire oublier son discrédit de plus en plus absolu ont des
répercussions bien réelles, faites d’humiliations, de douleur et de
colère. Mais ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort, et une fois de
plus, le pouvoir sème les graines de son effondrement.
Loin de voir dans ces événements l’expression singulière de conceptions
spécifiquement sarkozystes du pouvoir, nous voyons au contraire, ici comme
ailleurs, derrière son règne, le glissement continu, le dérapage sourd
d’une société malade, sans avenir, dont tout ce qui constitue « l’élite »
lui intime de courir encore plus vite vers l’abîme. Nous refuserons
toujours cette course absurde.

Ces événements illustrent à nouveau que la machine d’Etat ne sert que les
intérêts d’une minorité possédante, confortablement assise sur le cadavre
de l’égalité républicaine.
Ils rappellent également l’utilité universelle de boucs émissaires, quand
partout l’échec des « réformes » est patent.
Après l’étranger, l’ultra-gauchiste. Après le migrant, le simple quidam
qui ose encore s’offusquer que des gamins dorment à la rue, quand tant de
maisons sont laissées closes.
Ces catégorisations que tente d’établir l’Etat et qui sont allègrement
reprises dans les médias, visent à marginaliser nos luttes pour une
société plus égalitaire, en y distillant la peur et la division. Ce genre
de politique qui justifie la recrudescence et la banalisation des
violences policières, conduit à nous cloisonner toujours plus, à nous
enfermer et parfois pire à dénoncer notre voisin.
Dés lors, la violence et la répression ne s’arrêtent plus même aux murs
des commissariats, on les retrouve partout, que ce soit dans le silence
citoyenniste du plus grand nombre, ou dans les foyers de micro-fascismes
qui parcourent la société.

Explosion des classes dangereuses ou avènement d’une société carcérale ?

Si la population française ne croît que légèrement, il n’en est pas de
même du nombre de gardé-e-s à vue (plus de 577 000 gardes à vue en 2008,
soit une hausse de 35 % en 5 ans !), du nombre de détenus (31 000 en 1981,
plus de 50 000 en 2001, plus de 63 000 en 2008) comme de la durée des
peines (doublement entre 1975 et 2000, triplement des très longues peines
depuis 1996). La population française est-elle devenue si dangereuse ?
Il est plus probable que nous nous orientons vers une société carcérale,
une société de contrôle, une société totalitaire que l’on voit chaque jour
s’esquisser davantage.
On ferme les hôpitaux, les postes et les écoles, conspués comme les
vestiges d’une conception « soviétoïde » de la France, mais à la place, on
bâtit des nouvelles prisons high-tech. Qui a dit qu’il n’y avait plus de
projet de société dans ce pays !

Collectif de soutien aux demandeurs d’asile et aux sans papiers de Tours
csdasp37@no-log.org
http://csdasp37.free.fr
06 34 19 64 98