« La révolution dans le monde européen moderne n’a pas été seulement un projet politique, elle a été aussi une forme de vie »

« Je crois donc que cette idée de la vie artiste comme condition de l’œuvre d’art, authentification de l’œuvre d’art, œuvre d’art elle – même, est une manière de reprendre , sous un autre jour, aves un autre profil, ce principe cynique de la vie comme manifestation de rupture scandaleuse, par où la vérité se fait jour, se manifeste et prend corps »

Michel Foucault, Le courage de la vérité – Le gouvernement de soi et des autres II, Cours au Collège de France. 1984

———————–

L’instauration de la démocratie (l’égalité des droits, le droit pour n’importe qui de prendre la parole, de prétendre dire vrai par rapport aux affaires de la polis) va de pair avec la constitution d’un sujet « éthique », d’une forme de vie. Ce processus de production de subjectivité ne constitue pas un simple supplément moral, mais une nécessité structurelle de la démocratie.

La formation du sujet éthique a donné lieu à une alternative qui a marqué profondément le monde occidental : d’une part une métaphysique de l’âme représentée par le platonisme (et sa traduction chrétienne) qui donne à la connaissance et au souci de soi la forme de la contemplation en établissant un double clivage (de l’âme et du corps, du monde vrai et du monde des apparences) et, d’autre part, une « esthétique de l’existence » incarnée, selon Foucault, par les philosophes « Cyniques ». Cette tradition mineure de la philosophie grecque donne à la connaissance de soi et au souci de soi la forme de l’exercice, de la pratique et de la mise à l’épreuve de soi, de la vie et du monde. Avec les cyniques, l’« esthétique de l’existence » prend la forme d’une expérimentation qui est à la fois un combat dans le monde et contre le monde, pour une « vie autre » et pour un « monde autre ».

A partir des cyniques, Foucault dessine la tradition d’une « vie militante » qui traverse toute l’histoire de l’Occident : une militance qui prétend changer à la fois les institution, les lois et la vie, un militantisme « ouvert et agressif ». Le scandale de la vie cynique a un triple héritage : les mouvements religieux tout au long du Moyen-âge et avant et après la réforme protestante, le militantisme révolutionnaire du XIXe siècle et la vie d’artiste.

Dans le militantisme du XIX siècle ce qui intéresse Foucault est la manière dont a été définie, caractérisée, organisée, réglée la vie comme activité révolutionnaire ou l’activité révolutionnaire comme vie sous les différentes formes de « sociétés sécrètes », de l’organisation instituée (syndicale et politique) et le « témoignage de la vraie vie par la vie elle-même ».

Le thème de la vie autre, le scandale d’une vie de combat dans le monde et contre le monde, on le retrouve aussi, toujours selon Foucault, dans l’art et dans les modes de vie des artistes.

« L’art moderne, anti-platonicien et anti-aristotélicien ; réduction, mise à nu de l’élémentaire de l’existence ; refus, rejet perpétuel de toute forme déjà acquise. Cet art moderne, sous ces deux aspects, a une fonction que l’on pourrait dire anti – culturelle. Il y a opposer, au consensus de la culture, le courage de l’art dans sa vérité barbare. »

Que la révolution politique doive s’accompagner d’une révolution moléculaire est une thématique également portée par Félix Guattari qui l’exprime de façon différente. Il s’agirait donc de problématiser le rapport entre politique et mode de vie, à partir de notre expérience de la démocratie, celle que l’on pratique, par exemple, dans la Coordination.

On utilisera les deux derniers cours de Foucault au Collège de France et notamment la deuxième partie du cours « Le Courage de la vérité » (1984), où la question de la « vie militante » est problèmatisée (à partir de la page 163).

Le programme est encore en chantier. Il y aurait trois séances sur cette thématique de la « vie militante » (deux à partir des cours de Foucault qui traitent de la question, une séance à partir de Guattari sur le même problème).

Les autres séances proposées :

– Projection de « Die Kühle Wampe » réalisé par Bertolt Brecht et Slatan Dudow, en Allemagne pendant la grande crise, suite à un suicide de Chômeur, qui avait fait les premières pages de la presse sous le titre, « suicide d’un tel, un chômeur de moins ».

– Sur l’évaluation, de l’évaluation des choses, des fonctions à l’évaluation des hommes et de leur subjectivité, avec Bertrand Ogilvie.

– La politique et les oasis (art et amour), avec Bernard Aspe à partir du 1er chapitre de son livre, L’instant d’après, projectiles pour une politique à l’état naissant (ed. La fabrique).

– RSA /Nouveau modèle d’indemnisation du chômage des salariés à l’emploi discontinu ; mouvements sociaux et traduction étatique.

Les séances auront lieu en principe le 3e jeudi de chaque mois à partir du mois de novembre.

Commun et contre conduites : Pour ouvrir les séances de l’Université Ouverte nous partagerons un objet, en l’occurrence un extrait du film Reprise, à partir duquel chacun (intervenant-participant) pourrait axer son intervention.

Les séances ont lieu à la coordination des intermittents et précaires
14 quai de charente, Paris 19e, M° Corentin Cariou, Ligne 7

RDV à 18h30 les jeudi
19 novembre
17 décembre
14 janvier
18 février
18 mars
15 avril
13 mai