J’étais à Poitiers le weekend du 10 et 11 octobre au festival d’art de rue Les Expressifs qui se déroulait dans le centre ville. Dans la ville, des affiches placardées un peu partout annonçaient une journée anticarcérale : débats, manif et soirée-concerts. Lorsque je suis tombé par hasard sur le lieu de rassemblement pour le départ de la manif (enfin pas réellement au hasard puisque ce rendez-vous était sur la place centrale de Poitiers, en plein cœur du festival d’art de rue), quelque chose m’a tout de suite fait réagir : pas de flics à l’horizon! Je ne suis pas un amoureux de l’encadrement policier, mais j’étais tout de même habitué à voir les rangées de fourgons CRS dans ce genre de manif…

Je continue donc à me promener de places en places, de spectacles en spectacles pendant quelques temps… J’étais loin de me douter qu’à quelques centaines de mètres de là, « deux cents émeutiers » étaient en train de « saccager le centre de ville de Poitiers » (selon la une de la presse régional le lendemain).

Arrivé sur la place du marché peu après la manif, j’ai pu me rendre compte que les casseurs ont été très sélectifs : seuls les banques, les assurances, le local du journal régional La Nouvelle république, l’agence de Bouygues télécom et un magasin de vêtements de luxe ont eu des vitrines cassées. Les médias locaux ont essayés de faire croire par la suite que ces brutes sanguinaires avaient tout détruit tous les commerces sur leur passage, c’est faux.

Après un moment d’incertitude, les informations concernant le festival tombent les unes après les autres : les spectacles de la place du marché sont annulés pour le moment, puis, ceux-ci sont ensuite annulés pour toute la soirée (par arrêté préfectorale, me dit une bénévole) mais le festival continu sur les autres sites, et enfin, le festival est annulé pour toute la soirée sur l’argument « qu’ils pourraient revenir ».

En colère contre les manifestants « Ils ont tout pourri et c’est nous qui prenons », les spectateurs du festival ont passés la soirée à vagabonder dans les rues de Poitiers, la bouteille à la main. J’ai donc vite fui le centre ville morose de Poitiers pour me diriger en voiture vers le 23 avenue de Paris, lieu culturel ou devait se dérouler la soirée à la suite de la manif afin de comprendre ce qu’il s’est passé quelques heures auparavant. L’avenue est condamnée à ses deux extrémités par la police, impossible de se rendre au 23 (des témoignages relatent de la présence policière dans le lieu culturel). Fin de la soirée…

Je ne soutiens pas les casseurs car je pense que leur action a fait plus de tort que de bien à leur lutte et aux mouvements de résistances en général, mais après quelques jours de réflexions, j’essaye de comprendre pourquoi les médias insistent tellement sur ces incidents (en une du journal local depuis 3 jours). Je me pose aussi beaucoup de questions sur la logique de la préfecture et de la police ce soir-là : pourquoi n’y avait il pas d’encadrement policier de la manif? Pourquoi avoir annulé le festival, en sachant très bien la colère que cela allait provoquer sur ces jeunes et moins jeunes qui n’ont ensuite pas hésité à critiquer les casseurs (et aussi les manifestants en général) dans les médias. Pour ma part je pense qu’il y avait plus de danger à laisser des centaines de personnes se bourrer la gueule dans les rues faute de festival plutôt que de continuer le festival,les casseurs n’ayant aucunes raisons de revenir.