J’ai arrêté la fac et c’est tant mieux.
J’ai arrêté la fac et son gros savoir, ses ouailles ingurgitant anonymes la sainte parole du prof ou du tribun des AG.
La fac où l’apprentissage est centré non sur l’individu mais sur de bedonnants mandarins surpayés.
La fac et son élite militante – alcoolique, où Lucie devient « Lucie FSE », « Lucie NPA », « Lucie CNT »… Les bergers marquent leur troupeau.
Des heures de rage perdue à faire des « comptes rendus de CF », des « réus internes », à préparer les élections, et on se rassure en se disant que si, les syndicats servent à quelque chose puisqu’ils réservent les amphis pour les AG.
De l’autre coté, les « totos » couleur locale, étiquette de paria autoproclamé consistant à cracher sur SUD et la CNT tout en squattant leur local et à boire des bières avec plus de convictions encore.
En même temps, tant que « la lutte » en milieu étudiant restera ce gloubiboulga vague, lutte pour la lutte, mouvement pour le mouvement, y aura pas grand chose à faire d’autre que se saouler la gueule et de temps en temps, fait ultime, organiser une projection ou un débat bière à 20 convaincus, en en profitant pour adosser quelques tags folkloriques au murs des amphis (« ici on est chez nous »… pauvre con).
Combien, parmi tout ceux là, syndiqués ou non, qui répondent quelque chose comme « sbilidipib » quand on les questionne sur leurs convictions ? Un petit monde de lutte séparée, où la konigsbacher résonne comme un P.38…

La réalité, c’est que la fac c’est à chier en soi, de son fonctionnement aux rôles qu’elle engendre pendant et après les études, en passant par sa fonction économique de renouvellement de la petite bourgeoisie intellectuelle.
L’impression que jusque dans les rangs des plus « radicaux », la position sociale « étudiant » est niée au prétexte de la galère économique. Ce n’est pas parce qu’on galère pour payer ses études qu’on n’a pas une position séparée et privilégiée.
C’est en tournant le dos à ce petit monde mesquin qu’on s’aperçoit que, hors les murs des facs, personne n’en a rien à foutre du local de l’UNEF.

Aux montagnes russes, y a ceux qui se foutent devant et qui kiffent, et ceux qui se mettent derrière et qui hurlent.
Combien de fois lors de manifs « chaudes » j’ai ressenti le dilemme… Et combien de fois j’ai reculé, flippé, combien de fois les keufs ont gagnés dans ma tête avant même que dans la rue ?
La bleusaille nous accompagne, chaque jour à nos cotés, fidèles compagnons du néant.
En même temps, souvenez vous de la maternelle, de ces repas pris à toute vitesse dans le stress et ces cris que tu ne comprends pas : « arrête de bouger », « arrête de crier », « reste à ta place »… Tout un programme de pacification sociale.
Comment voulez vous que les individus se révoltent, s’insurgent quand on leur dit de ne pas bouger et de se taire à longueur de journées, pendant 14, 15, 20 ans de leur vie ?
L’école, les cours, la récré et la cantine nous apprennent la peur du surveillant et du prof, les normes et la normalité de la sanction pour excès de vie. Reste dans tout corps, petit homme.
Et les devoirs qui te poursuivent jusqu’à chez toi, qui voudrait juste, jouer ou se reposer.
Tout ça me semble particulièrement présent dans nos comportements face à l’Autorité et et à la Loi.
A la rentrée, il y aura probablement un nouveau mouvement dans l’éducation, avec ses grosses manifs pacifiées et ses revendications de larbins.
Mais de la maternelle à l’université, il n’y a rien à sauver.

L’apprentissage scolaire est un dispositif visant à ce que trente petits d’Hommes regardent la prof plutôt que les Autres, écoutent ses mots plutôt que d’observer le monde…
Combien d’enfants qui répètent que la mer est bleu avec des poissons dedans et qui n’ont jamais pu y aller ?
L’individu doit être au centre de son propre apprentissage, dans lequel « devoirs » et « discipline » n’ont plus aucun sens.
Les enfants ne sont pas des êtres inférieurs, et l’apprentissage est pratique sans fin ni limite d’âge.
Les enfants ne sont ni des esclaves, ni des objets. Ce qu’on leur apporte ne nous donne pas le droit à plus de respect que l’on en attend de chacun.

Il y en a, des choses à détruire, pour que ce monde devienne respirable…