Rien ne sert de courir, il faut tout remettre à plat !

Chômeur(euses), précaires, entrons en résistance !

Comme chacun sait, la France et l’Europe sont maintenant officiellement, et depuis près d’un an, en récession. Voilà que « la Crise » qu’économistes et politiciens arborent depuis vingt cinq ans pour justifier les plans de rigueur, le creusement des inégalités et le développement de la précarité, entre dans une nouvelle phase. Plus de 600 000 nouveaux chômeurs en un an, le « remerciement » de presque tous les intérimaires des grandes entreprises, des centaines de milliers de salariés au chômage technique, une succession ininterrompue de « plans sociaux », la raréfaction des offres d’emploi : ils seront bientôt bien peu ceux qui pourront se croire à l’abri de la précarité.

Avant même cette nouvelle donne, nous étions déjà de plus en plus nombreux à en passer par des périodes de chômage ; dorénavant, un tel passage est destiné à devenir la règle. Il est d’autant plus nécessaire de tordre le cou à tous les discours moralisateurs sur les chômeurs « responsables de leur situation » : c’est un fait, en France, il n’y a plus que des miettes d’emploi, bien souvent de qualité médiocre, et il n’y en a plus, de loin, pour tout le monde. Il faut également faire un sort au sentiment de honte et d’humiliation dans lequel, chômeurs et précaires, nous serions sensés baigner, tant qu’un patron compatissant ne nous aura pas fait les yeux doux. Les allocations chômage, le RMI (aujourd’hui RSA), nous les considérons comme la reconnaissance, déjà insuffisante, du plus minimal droit à l’existence : qui s’y oppose manifeste seulement son désir de voir un plus grand nombre de pauvres mendier, crever de faim ou de froid dans la rue.

S’il y a de la honte parfois, c’est à devoir subir la suspicion, les contrôles, les « ateliers » bidon de Pôle Emploi, les tracasseries, les « dysfonctionnements » plus ou moins aberrants, les files d’attentes, les interminables délais de la machine bureaucratique, le mépris des patrons qui ne « retiennent pas votre candidature », quand ils daignent vous répondre ; bref, le sentiment que vous êtes, aux yeux des représentants de la société, un être défini par le manque, un être infirme, un assisté. Se retrouver au chômage, bien souvent, c’est connaître une forme brutale d’isolement. Les seules luttes visibles des derniers mois sur la question du chômage ont d’ailleurs été le fait des salariés qui ont mené des actions de séquestration de leurs dirigeants contre les plans de licenciement, c’est-à-dire de ceux qui étaient encore liés par le travail. Nous maintenir dans l’isolement –faire que la seule pensée de chacun soit : comment m’en sortir individuellement –est le seul et unique but du pouvoir actuel.

La fusion ANPE-Assedic, maintenue coûte que coûte malgré l’explosion du chômage, est un désastre : en moyenne, 150 chômeurs par conseiller, de nombreux salariés indisponibles pour formation, des délais d’attente qui ne cessent de s’allonger, des rendez-vous aux lance-pierres, une plate forme téléphonique déshumanisée, très coûteuse pour les usagers, complètement à côté des besoins des chômeurs… Avec la mise en place du RSA, qui pourrait concerner 3 millions de personnes, on voit mal comment la machine pourrait ne pas imploser car toutes ces personnes devront être inscrites au Pôle Emploi. A moins de sous traiter massivement au privé.

Comment la CAF, quant à elle, va-t-elle faire face à cet afflux de nouveaux allocataires ? Des retards massifs de paiement sont à prévoir. Et tout cela, pour mettre en place un RSA qui ne sera favorable financièrement que dans certains cas et défavorable dans d’autres (par exemple, si on trouve un emploi de moins de quatre mois, si l’on a des enfants…), qui fera perdre à la plupart de ses « bénéficiaires » certains droits connexes (CMU, baisse des allocations logement, transports gratuits), et qui sera assorti d’une obligation stricte à accepter n’importe quel travail si l’on estime que vous ne valez pas assez pour vous « permettre » de le refuser.

Aujourd’hui, dans de nombreuses villes, des collectifs de chômeurs et précaires se forment ou se reforment. Dès septembre 2009, l’ensemble des organisations ayant participé aux Etats Généraux du Chômage et de la Précarité en mai dernier prévoit des actions de protestation et des marches régionales contre la gestion de ces questions par le gouvernement et pour une politique de l’emploi réellement favorable aux chômeurs et précaires.

A Rennes, depuis mi-novembre 2008, le Mouvement des Chômeurs et Précaires en Lutte a occupé de nombreuses fois ANPE, ASSEDIC, nouveaux PÔLE EMPLOI, directions régionale ou départementale de PÔLE EMPLOI, CAF et autres Commissions Locales d’Insertion. Depuis la même période, il n’a eu de cesse de créer des liens avec d’autres mouvements de lutte (estudiantins, électriciens et gaziers, salariés de la restauration rapide…) et de participer à la mise en commun de pratiques d’auto-organisation susceptibles d’inscrire ces liens dans la durée (cantine populaire, jardins collectifs, collectif anti-répression, auto-réductions…).

Si la certitude qu’un mouvement de chômeurs ne tiendra que dans la mesure où il construit cette transversalité des moyens d’organisations comme des revendications, il n’en reste pas moins vrai qu’il n’existera qu’à travers la prise en compte des difficultés liées à la question du chômage et à son traitement. La situation catastrophique qui est réservée aux institutions du chômage (Pôle Emploi, CAF, CLI) et par conséquent à ceux qui en sont les salariés et les « bénéficiaires » implique une réaction à l’endroit même des problèmes et des urgences qui en découlent. En parvenant à s’opposer à une radiation et en obtenant la réintégration des droits d’une chômeuse au mois de mai lors d’une occupation, qui n’a pas duré 2 heures, à la CLI de Ploërmel, nous nous sommes rendu compte de la fragilité de ces institutions devant la moindre des pressions (10 personnes qui menacent de rester manger et dormir tant qu’ils n’auront pas de réponse satisfaisante).

Alors que les retards de versement se multiplient et se prolongent de manière exponentielle, alors que les radiations s’accélèrent, alors que la paupérisation des chômeurs et des salariés précaires galopent, nous refusons de pâtir du bordel monstre que les nouvelles réformes du chômage créent. Autant nous soutiendrons les agents de Pôle Emploi ou de la CAF en lutte, autant nous ne serons pas les victimes de leur impuissance à répondre aux missions qu’on leur impose. La multiplication des réactions collectives à des problèmes de dossier individuel saura imposer nos exigences à leur stratégie impersonnelle bien qu’individualisante de lutte contre le chômage.

Voilà pourquoi nous appelons tous ceux et celles dont les versements tardent, tous ceux et celles qui sont menacés de radiations et autres sanctions, tous ceux qui sont confrontés de quelque manière aux institutions, à s’organiser pour exiger la régularisation de leur situation et à participer au rassemblement suivant :

RDV DEVANT LE PÔLE EMPLOI RENNES-SAINT LOUIS

LE MARDI 23 JUIN À 9H30

22 Boulevard Saint Conwoïon

Mouvement des chômeurs et précaires en lutte

22,rue de Bellevue

35000 RENNES

mcpl2008@gmai