Non à la banalisation de l’extrême-droite et de ses idées en Bretagne où ailleurs !

Depuis sa création en 1982, la gauche indépendantiste bretonne (Emgann) a toujours eu une pratique claire et une attitude sans équivoque à l’endroit des idées racialistes et des mouvements d’extrême-droite, qu’ils se réclament de la France ou de la Bretagne.
Cela s’est traduit par notre participation active à des manifestations antifascistes contre le Front National et ses avatars, des affrontements, du travail de contre-information et une vigilance permanente.
Les différents mouvements d’extrême-droite ont dans les années 80 et 90 et jusqu’à nos jours connus peu de succès dans leurs tentatives d’implantation en Bretagne si l’on regarde comparativement ailleurs en Europe et l’immense majorité de ceux et celles qui oeuvrent pour la langue et la culture bretonne ont toujours refusé la présence de l’extrême-droite dans leurs manifestations.
Dans un contexte de montée des droites les plus extrêmes en Europe et suite à certains évènements récents en Bretagne nous tenons à informer nos sympathisants de notre analyse et de nos décisions.

1) Depuis quelque temps on commence pourtant à entendre parler d’une nouvelle mouvance d’extrême-droite en Bretagne : le bloc identitaire constitué d’anciens militants MNR de Bruno Mégret en déshérence et de cadres d’ADSAV (dont nous reparlerons plus bas).
A Nice cette mouvance a littéralement confisqué la problématique nissarde et occitane. Ici nous ne les laisserons pas faire.

Les militants de cette mouvance tentent de s’implanter en Bretagne (tractage à St-Malo et Carquefou, présence lors d’un cercle du silence à St-Brieuc, tentative d’intimidation bidon d’une réunion antifasciste à Vannes initiée par des militants anticapitalistes et anarchistes et dernièrement ouverture d’une maison de « l’identité » dans le Trégor à Guerlesquin récupération de la fête du premier mai à Fougères).

Qui sont les « Identitaires »? Les « Identitaires » ont été fondés par les anciens « d’Unité radicale », groupuscule dissous après la tentative d’assassinat de Jacques Chirac par l’un d’entre eux. Les « Identitaires » défendent une Europe blanche sans mosquée fondée sur une pseudo-civilisation européenne et l’exaltation des trois patries « locale » (ici la Bretagne), nationale (la France !) et l’européenne. On voit d’ailleurs combien cette organisation se réclamant de la cause bretonne est en réalité au service de l’impérialisme français et européen.

Rassemblés pour la défense d’une Bretagne blanche sans mosquée ni kebab et sans rave-parties, les « Identitaires » exaltent, comme leurs camarades d’ADSAV, le souvenir d’une Bretagne majoritairement rurale, catholique, réactionnaire et récupèrent sur leur blogs le travail et les logos des associations culturelles bretonnes (notamment linguistiques) qui, regroupées au sein du Conseil Culturel de Bretagne, ont dénoncé ces pratiques et condamné l’idéologie raciste de ces mouvements. Outre l’identité bretonne (langue et culture), les thématiques mises en avant par ces néo-fascistes sont l’écologie et les droits sociaux.

L’acquisition d’une maison à Guerlesquin, opération derrière laquelle on retrouve Philippe Milliau, est une insulte et une provocation dans le Trégor, terre de guérilla antifasciste qui se souvient de ses résistants torturés ou déportés.

Tel le martyr de 6 résistants à Plougonveur torturés et tués par la Bezenn Perrot, milice nazie issue de la frange national-socialiste du mouvement breton des années 30.

Pour finir sur les « Identitaires » qui, outre Nice, récupèrent et confisquent grâce à une scission du Front National l’identité alsacienne, voici une courte biographie de Philippe Milliau (membre de la direction nationale des « Identitaires »).

« Militant de la Fédération des étudiants nationalistes, puis cadre dirigeant du GRECE, Philippe Milliau est la première personnalité de la Nouvelle droite à rallier le Front national dont il devient conseiller régional d’Ile-de-France.

En 1998, il prend le parti de Bruno Mégret et participe à la fondation du Mouvement national républicain dont il devient membre du bureau national, secrétaire départemental de Seine-Saint-Denis et délégué national à la formation, et pour lequel il se présente à diverses élections (européennes, législatives et cantonales).

Au printemps 2008, il se rallie au Bloc identitaire, qui le nomme coordinateur en Bretagne, chargé de la formation au plan national et l’intègre à son Conseil fédéral. A cause de cela, il est exclu du MNR, le 3 septembre 2008, au motif que « la double appartenance n’est pas autorisée par les statuts » de cette organisation. Cependant, le 23 septembre 2008, il participe au Bureau national du MNR et – réintégré dans ses fonctions par l’équipe favorable à Bruno Mégret – vote à son tour l’exclusion du secrétaire général (Nicolas Bay) et du secrétaire général adjoint (Jacques Gaillard) de ce parti.
En septembre 2008, Philippe Milliau a été à l’initiative de la création du Bloc breton. »

Une belle biographie d’extrême-droite, non ?

Il est secondé dans ses basses œuvres par Yann Valerie, plus jeune et originaire de Saint-Malo, qui fût l’un des jeunes poulains d’ADSAV, le parti fantoche nationaliste d’extrême-droite breton qui veut relever la nation bretonne de la décadence, c’est lui qui coordonne le travail d’activisme.

2) Le deuxième petit événement qui contribue à banaliser les idées d’extrême-droite est l’interview complaisante du grand leader d’ADSAV (Frédéric Bouder) réalisée par Philippe Argouarc’h rédacteur en chef et journaliste autoproclamé de « l’agence Bretagne presse » (ABP).

Depuis quelques années, cette agence de communication est animée par le très droitier Philippe Argouarc’h, membre jusque très récemment du « Parti Breton » et de son bureau politique, parti associé au Modem, notamment à Rennes, dans le cadre d’alliances électorales.

Le principe était simple, après accréditation, n’importe quel groupement ou association pouvait publier ses communiqués sur l’ABP, qui connut un succès certain. Grisé par ce succès, son unique animateur, qui n’a jamais caché son admiration pour Margaret Thatcher et Ronald Reagan, s’est proclamé journaliste. Il s’est mis à réaliser des interviews, un de nos militants a d’ailleurs eu a s’expliquer dans le cadre des élections municipales sur les crimes de Pol Pot au milieu d’une interview sur les municipales de Rennes ! Toutefois Argouarc’h prenait toujours soin de préciser qu’il ne partageait pas les idées racistes et suprémacistes. C’est pourquoi nous, comme d’autres, avons publié sur l’ABP.
Jusqu’au 28 avril dernier, date à laquelle nous avons cessé de publier en raison de l’interview dont nous avons parlé plus haut.
Cette interview révèle combien certaines idées sont communes à Philippe Argouarc’h et à ADSAV.
Interviewer le parti ADSAV, qui – prétendument – regroupe 700 membres et qui n’a jamais été foutu de prendre part à une manifestation culturelle bretonne en cortège sans se prendre une bonne trempe et sans être dénoncé par l’ensemble du mouvement culturel breton, n’est pas condamnable en soit, si tant est que l’on se démarque clairement des réponses de l’interviewé.

Frederig Ar Bouder, président d’ADSAV qui vit à Londres (c’est dire s’il connait le quotidien des travailleurs bretons) et qui ne parle pas breton, tout comme Philippe Argouarc’h, s’est engouffré dans la tribune inespérée que lui offrait l’Agence Bretagne Presse en débitant les sornettes habituelles de n’importe quel militant d’extrême-droite : discours anti-Turquie en Europe, incantations diverses et variées sur l’écroulement de la France… et sur son attachement à la « patrie charnelle » (terme commun aux « Identitaires »).

Mais attardons-nous plutôt sur les questions de Philipe Argouarc’h et sur ses non-commentaires suite à certaines réponses :

Voici une question « objective » de l’ABP : « Olier Mordrel, le co-fondateur du PNB, qui certes a écrit certains textes intéressants et toujours actuels, et de qui ADSAV se réclame souvent, avait adopté dans sa revue Stur, des principes national-socialiste et racistes » !
Oui, vous avez bien lu, Philippe Argouarc’h estime que Olier Mordrel (idéologue nazi breton) dont il n’ignore rien des idées, a écrit « certains textes intéressants et toujours actuels »

Ce n’est pas de la banalisation d’idées d’extrême-droite ça ?

Et suite à une réponse sur la seconde Guerre mondiale, voici la réponse d’Ar Bouder : « Pendant la seconde guerre mondiale des nationalistes bretons se sont retrouvés dans tous les camps. Quels que soient les choix des uns et des autres, l’immense majorité des nationalistes ont maintenu en toute circonstance une attitude chevaleresque qui tranche avec l’indécence de comportement généralement observée en France. La vérité c’est que la Bretagne a eu trop de martyrs et pas assez de bourreaux et que c’est justement ce qui dérange. »

Cette réponse, où ADSAV regrette que la Bretagne n’ait pas produit assez de bourreaux et de tortionnaires, n’inspire aucune prise de position de Argouarc’h pas plus qu’il ne s’offusque de ça : « l’immense majorité des nationalistes ont maintenu en toute circonstance une attitude chevaleresque ».

« Chevaleresques », les militants nationalistes bretons qui ont collaboré, torturé et dénoncé ? Argouarc’h n’y retrouve rien à redire. Ainsi grâce à Argouarc’h, les militants nationalistes qui ont marché au pas de l’oie sont mis sur le même piédestal que ceux qui choisirent la résistance antifasciste. Ce silence complice est à vomir.

Tout comme le silence suite à cette réponse relative aux relations internationales d’ADSAV : « Je me dois de citer la Lega Nord qui a montré un grand intérêt pour notre combat, et nous a donné accès à ses relais et médias pour promouvoir la cause bretonne. Ce qui est appréciable, puisqu’il s’agit d’un poids-lourd actuellement au pouvoir. Des adsaverion assistent régulièrement aux congrès du Voorpost flamand ».
Pas la peine de s’étendre sur le fait que pas grand’monde de sensé en Bretagne ne souhaite que les néofascistes de la Ligue du Nord défendent les intérêts du peuple breton mais la référence à Voorpost mérite que l’on s’y arrête. Voorpost est une organisation racialiste se réclamant du nationalisme flamand intégral, qui entretient sans aucun complexe des liens avec l’extrême-droite sud-africaine suprémaciste blanche. Voorpost, qui, en plus d’une idéologie royaliste et orangiste (la même que celle des loyalistes en Irlande du Nord), entretient des liens assumés avec des animateurs connus du courant qui nie la réalité de l’holocauste et des chambres à gaz.

Le « journaliste » Argouarc’h a-t-il au moins pris le temps de vérifier ce qu’était Voorpost ?

Suite à la réponse de Bouder, Argouarc’h se tait et deux mois après il se tait toujours, alors qu’il sait, qu’il pourrait pondre une note éditoriale mais non, Argouarc’h par son silence complice, banalise sans s’en démarquer le fait qu’ADSAV entretienne des liens avec Voorpost, fréquente des individus qui nient le fait que des millions d’hommes et de femmes ont été scientifiquement et méthodiquement déportés, torturés et exécutés en raison de leurs origines, de leurs orientation sexuelle ou de leurs engagements antifascistes ou communistes.

Nous savons comment Argouarc’h se défendra en lisant ce texte, il dira qu’il a aussi donné la parole à des « extrémistes de gauche » (c’est-à-dire nous !), comparant ainsi ce qui n’est pas comparable.

C’est exactement le raisonnement de Bouder lorsqu’il qualifie indistinctement de « chevaleresques » les militants nationalistes bretons qui ont collaboré, ceux qui ont rasé les murs et ceux qui ont résisté les armes à la main contre les nazis tels les militants du PNB du groupe Liberté de Saint-Nazaire.

C’est comparer les bourreaux et les résistants !

Enfin, Argouarc’h, si servile avec ses nouveaux amis d’ADSAV, a oublié de reparler de la biographie du si singulier militant d’ADSAV, Gérard Hirel, ex-gendarme, ex-MNR, ex-FN bien connu des militants indépendantistes et de gauche qu’il fiche comme il a appris à le faire dans les services d’ordre du FN et du MNR et dans l’armée française :

« Ancien lieutenant colonel de gendarmerie, qui réside à Pleubian. Vétéran de la guerre d’Algérie ou il a servi en tant que parachutiste. Ancien responsable du DPS (service d’ordre du FN) pour les Pays de la Loire. Il appelle en 2000 à la « destruction du Réseau Voltaire ». Il dirigera aussi le Département Protection Assistance (DPA), version mégrétiste du DPS, qu’il quitte pour être proche de l’organisation nationaliste bretonne ADSAV. Il se revendique de deux groupuscules, le Comité de défense de l’Europe des nations (CODEN) et l’Organisation bretonne des renseignements (OBR). Il a expédié le 27 septembre 2002 des télécopies à des mairies du Finistère, du Morbihan et des Côtes-d’Armor où Il annonçait « une invasion de 1 850 000 personnes en Bretagne, composée de musulmans-Maghrébins, de noirs d’Afrique générant des maladies, une délinquance et une déliquescence de l’identité bretonne ». Il appelait à « activer des unités d’autodéfense » pour faire face à ce « déferlement ». La cour d’appel de Rennes a aggravé en 2003 la peine à laquelle le tribunal correctionnel de Guingamp l’avait condamné pour provocation à la haine raciale. Il fut condamné à payer 1.500 euros d’amende et à verser 1.500 euros de dommages et intérêts au MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples), partie civile dans l’affaire. »

Notons qu’à chaque fois qu’ADSAV se présente aux élections, le MNR n’est jamais présent là où se trouve ADSAV et très rarement d’autres formations d’extrême-droite.
Récemment à Redon un candidat « Solidarité et Progrès » était présent comme ADSAV pour cette élection cantonale. Cette candidature d’extrême-droite à ramené ADSAV à quelques dizaines de voix et son candidat a peiné pour dépasser les 1%.

Enfin ADSAV s’est, il y a peu, illustré en insultant et menaçant des militants NPA à Redon et son président a évoqué la possibilité de poursuivre les animateurs du collectif 44=BZH devant les tribunaux en raison de leurs convictions anti-fascistes. Le collectif 44=BZH qui lutte pour l’unité territoriale de la Bretagne est notamment animé par des militants de la gauche indépendantiste.

Argouarc’h, comme ADSAV, évoque l’éventualité de poursuivre devant la justice française ses détracteurs suite à cette interview.

Suite à cette interview beaucoup de contributeurs de l’ABP se sont senti floués et abusés, beaucoup comme nous ont cessé de publier sur le site d’Argouarc’h.

D’autres par ignorance continuent de le faire, nous allons les informer.

D’autres, en connaissance de cause et par facilité, continuent de publier. En voici quelques exemples : Ai’Ta, la section UDB centre Bretagne (l’Union Démocratique Bretonne nationale a cessé de le faire), le PARTI BRETON, les Alternatifs, le NPA Centre-Bretagne, le Conseil Culturel de Bretagne… qu’attendent-ils pour prendre position ?

Que les ennemis du droit à l’autodétermination nationale du peuple breton se saisissent de l’affaire pour jeter l’opprobre sur tous ceux et celles qui défendent l’idée d’une Bretagne libre et solidaire ou tout simplement le fait culturel ou linguistique breton ?

Nous sommes disponibles pour toutes les mobilisations antifascistes et antiracistes à venir.

Nous estimons que, si l’extrême-droite se saisit de la thématique de l’identité bretonne, c’est parce que ceux qui prétendent incarner la gauche ici en Bretagne ont globalement déserté ce terrain et se refusent à aborder la problématique des droits nationaux du peuple breton en ces termes.

L’extrême-droite a toujours été notre ennemi, mais ce n’est pas dans l’immédiat notre priorité. La priorité c’est de s’opposer, ici en Bretagne, à la politique impérialiste, ultralibérale, anti-ouvrière et anti-populaire de Sarkozy et sa clique. Toutefois, dans le contexte actuel, il est important d’informer sur les manigances de l’extrême-droite. Le manque de crédibilité des forces de gauche et la crise financière peuvent, au sein des masses populaires, créer un climat favorable à l’épanouissement des idées d’extrême-droite et risquent de donner à ces groupuscules une audience sans rapport avec leurs forces.

Il n’est jamais trop tard pour résister et débattre ensemble. Nous sommes là aussi disponibles pour de tels débats.

Vive la Breizhistance antifasciste !

Les militants du comité de la gauche indépendantiste Bretonne de Rennes.