PROGRAMME

LUNDI 18

Cycle projections des Bonnets Rouges :

CHARLES MORT OU VIF, d’Alain Tanner. 20h, Bar LA BASCULE. 1969. Conte révolutionnaire. Désertion d’un chef d’entreprise.

MARDI 19

Présentation du livre de M. RIGOUSTE, L’ENNEMI INTERIEUR suivie d’une discussion.

20H, Bar LA BASCULE.

De «vigipirate» à la «culture de la sécurité», l’Etat français déploie depuis les années 1970 un arsenal techno-sécuritaire censé protéger la population des «nouvelles menaces» surgies en son sein – islamisme, immigration clandestine, terrorisme, violences urbaines, etc. On ignore le plus souvent que cette fabrique de nouveaux «ennemis intérieurs» reconduit l’histoire coloniale et militaire française, et en particulier la «doctrine de la guerre révolutionnaire» conçue par l’armée française durant les guerres d’Indochine et d’Algérie.

MERCREDI 20

CONCERT ROSA PARK (électro-techno punk / Nancy) et RICHARD DURN (punk synthétisé / Nancy), 20h, LA BASCULE

JEUDI 21

BAL MASQUE 22h place SAINT MICHEL.

Parce que la vie mérite d’être vécue. Et qu’elle n’a besoin, ni de visages, ni des murs de la tombe ouverte de notre époque. Danser l’espace à la hauteur de sa laideur. Depuis la joie de nos devenirs quelconques.

SAMEDI 23

FOOT’A CAGOULE, 15h. PARLEMENT, apporte des masques, des cagoules, des ballons….

Rennes Nécropole, entre musée et chantier, terrain de jeu idéal pour les insoumis. Pour ce foot, n’importe quel mobilier urbain pourra être réquisitionné en guise de cage de but. N’oubliez pas vos cagoules. Pensez à des signes de reconnaissance si vous venez en équipe.

Jouons au foot dans Rennes comme des éléphants dans un magasin de porcelaine.

DIMANCHE 24

JARDINAGE et PIC-NIC au Jardin collectif 12h. Discussion autour de la subsistance et de la réappropriation des terres. Entre le 272 et le 274 rue de Nantes.

BOUFFE et BOEUF 19h00 chez Ramon et Pédro.

LUNDI 25

LL de Mars, Serge Sarah, Joachim Clemence POLITIQUE DE L’ART

Discussion et poèmes sonores.

20h, bar LA BASCULE.

«Si la crainte d’être rattrapés par la machine est trop forte, rien de plus simple à conjurer: soyons violents, sales, impénétrables, obscènes, irrécupérables, indésirables, tout simplement impensables.»

MERCREDI 27

INTERVENTO SUR LE MOUVEMENT AUTONOME ITALIEN

20h, bar LA BASCULE.

Les «années de plomb», «le mouvement», «le camarade P38»… des images tantôt cultes, tantôt soigneusement effacées par la pouvoir. Dans tous les cas, une histoire singulière qui n’est pas lointaine, que nous ne voulons pas oublier. Nous proposons de la faire résonner grâce à des ambiances, grâce aux mots de celles et ceux qui ont mis leur vie en jeu dans la lutte, qui s’organisaient collectivement quand tout était possible. Attention : cette mémoire peut avoir des effets secondaires sur le présent.

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TEXTE DES COMITES

A la fin mars, près de trente comités de soutien aux inculpés de Tarnac se sont retrouvés à Limoges pour discuter des suites à donner à leurs actions. Ce texte a été élaboré au cours de ces rencontres.

C’est raté. Nous n’avons pas eu peur des terroristes «anarcho-autonomes » tissant des réseaux internationaux. Cette irruption si brutale, si grossière, de la police politique nous a poussés à mettre des mots sur nos amertumes, à sortir de nos isolements.

Dès le lendemain des arrestations, les comités de soutien ont fleuri comme des crocus après le dégel. Sans concertation ni mot d’ordre, la contagion a opéré : concerts, débats, rencontres, soirées… Partout, le soutien a réuni des dizaines, des centaines de personnes.

C’est raté. C’était trop gros, peut-être. Personne n’a voulu croire que celles et ceux qu’on accusait d’avoir débranché des TGV étaient des brutes sanguinaires qui fomentaient de terribles attentats. L’affaire de Tarnac a été un déclic. Parce que nous avions oublié qu’on traitait ainsi les ennemi-e-s politiques, oublié que quelques intentions radicales pouvaient mener si officiellement dans vos geôles. Nous ne savions pas non plus que ce qui représente à vos yeux un si grand danger était isolable dans une fantasmatique mouvance. Nous avons senti, différemment, de maints endroits, épidermiquement, que quelque chose clochait. Et si ces arrestations mettent à jour une volonté de terroriser, elle ne vient pas des personnes inculpées. Il y a une étrange résonance, partout où nous évoquons l’affaire qui ici nous occupe.

Et nous sentons bien que le soutien, au moins autant que dans le nombre des signataires d’une pétition, est dans le regard amusé de la passante qui observe une altercation entre des policiers et un groupe de jeunes en souhaitant secrètement que ces derniers l’emportent, qu’il est dans l’œil espiègle de celui qui consulte au bureau un pamphlet antisocial caché dans un manuel de management, dans le geste discret de l’administratif dissimulant les pièces qui justifieraient une reconduite à la frontière, dans la détermination de celles et ceux qui séquestrent leurs patrons, qui pratiquent les réquisitions de biens, ou dans la tension qui monte désormais systématiquement à chaque fin de cortège. L’« affaire de Tarnac » est un prisme efficace pour lire l’époque et les luttes qui la traversent. On reconsidère avec moins d’indifférence les arrestations – plus discrètes – qui avaient précédé. On voit plus clairement à quoi servent les lois antiterroristes. Et à quoi sert le fichage, et ce qu’il en coûte de vouloir s’y soustraire, et ce qu’il en coûte d’accepter de s’y soumettre. Ce qui était diffus, dans l’air, s’est cristallisé là de telle manière qu’il est devenu très difficile de ne pas prendre parti.

On saisit mieux la nécessité pour un gouvernement, dans une époque si explosive, d’inventer la figure d’un ennemi intérieur. Et l’on devine en filigrane le cauchemar inavoué d’un système qui perd pied : celui dans lequel les citoyens d’hier arrêtent de jouer le jeu, se défient de l’ordre établi, et s’organisent en conséquence. Il y a finalement bien des légendes auxquelles, en chemin, nous avons cessé de croire. Comment, dès lors, ne pas se sentir proche d’insoumis-es qui ont pris au sérieux la nécessité de s’organiser collectivement ? Comment, dans cette époque où ce qui se partage le mieux est l’amertume et le sentiment de passer à côté de sa vie, ne pas ressentir une complicité avec celles et ceux qui ont cherché à s’extraire de la tristesse ambiante, et à lutter contre ses causes ?

Comment ne pas percevoir dans leur défiance l’écho de celle que nous éprouvons tous ? Sans les arrestations du 11 novembre, L’insurrection qui vient n’aurait peut-être jamais été aussi lu – en tout cas, pas collectivement, et sans doute pas dans une perspective si évidemment pratique – ; comme n’auraient peut-être jamais eu lieu toutes ces discussions, toutes ces actions, toutes ces rencontres.

Nous éprouvons la force et la joie qu’il y a à mettre en commun nos doutes et nos colères, et nous voyons des « bandes » se former que vos récentes lois n’arriveront pas à dissoudre. Nous voyons combien les arrestations qui, pour des motifs plus ou moins oiseux, se succèdent, relèvent du réflexe panique d’un pouvoir affolé. Aussi, elles ne nous dissuadent plus de grand-chose. D’autres personnes sont encore en prison pour des motifs similaires à ceux de Tarnac. Cert aines y retournent, pour n’avoir pas scrupuleusement respecté l’interdiction qui leur était faite de se voir. Les contrôles judiciaires, la dispersion forcée de toutes les amitiés qui s’organisent, se multiplient. Vos prisons, et toutes celles que vous pourriez construire, ne suffiront jamais à enfermer tout ce qui sort de vos normes. Et où que nous soyons, les solidarités se tissent. Dans cette période de crise et de troubles, nous ne sommes qu’une voix dans le concert de celles et ceux qui ne s’accommoderont plus de rabibochages. Dans des pans entiers du territoire, dans des pans entiers du peuple, l’adhésion au système est en miettes. La désaffiliation devient un peu partout un chemin praticable. Et c’est tant mieux.

Rien ne nous console tant de ce que vous avez voulu infliger aux « neuf de Tarnac », que de constater que de toutes parts surgissent pour vous des menaces autrement plus nombreuses que ce que vous avez cru conjurer. Ce n’est plus de l’incompréhension que nous ressentons, à retracer le fil de cette affaire. Mais comprendre les logiques à l’œuvre n’apaise pas. Cela aiguise seulement la colère. Les inculpations doivent être levées, comme doivent être défaits les arsenaux antiterroristes, antibandes, antimasques, antirassemblements, qui visent à briser toute solidarité effective. Durant tout le mois de mai, dans chaque ville où ils se trouvent, les comités de soutien multiplieront les initiatives ; le 8 mai, se tiendront des réunions publiques afin que se pose partout la question de savoir ce que signifie réagir à hauteur de la situation qui nous est faite. Il n’y a pas neuf personnes à sauver, mais un ordre à faire tomber.