Mr Sissoko Modibo a été expulsé le lundi 23 février.
Certains vous diront que c’est dégueulasse, que cela faisait 20 ans que Modibo vivait ici en France.
Qu’importe que Modibo ait vécu sur le territoire français 10, 15, 20 ans ou 3 mois. On sait surtout qu’il a été partie prenante d’une lutte et d’une grève de la faim menées avec d’autres prisonniers au centre de rétention de Palaiseau. C’est d’ailleurs pour ça que beaucoup le connaissent.
Pendant une dizaine de jours on a pu lire diverses informations concernant Modibo et la lutte menée dans le centre de rétention, informations véhiculées par l’association sos soutien ô sans papiers et par l’AFP.
Le vendredi 20 février, on a appris via resf que Mr Sissoko allait être expulsé. Le message du resf disait que le consulat du Mali avait délivré un laisser-passer à Mr Sissoko au prétexte que dans le centre il incitait à la rébellion ! Ce message précisait également que les choses étaient ou tentaient d’être médiatisées, mais ne proposaient pas de mode concret pour s’opposer à l’expulsion de Mr Sissoko. C’est tout naturellement que des gens ont décidé d’appeler à se rendre à l’aéroport.
Vers 18h, on a su que Mr Sissoko n’avait pas été expulsé mais les gens en contact avec lui ne savaient pas où il était.
Le soir même on pouvait lire un 1er communiqué des retenus et de sos soutien ô sans papier qui faisait état de cette tentative d’expulsion et qui présentait les doléances des retenus du centre, communiqué que sos soutien ô sans papiers démentira le lendemain, en proposant un autre disant la même chose mais agencé différemment, comprenne qui pourra… (voir archives pajol sur http://news.gmane.org/gmane.politics.activism.zpajol messages du 21 février 00h00 et du 20 février 23h47)
Le lendemain on a eu confirmation que Mr Sissoko n’avait pas été embarqué, les passagers et le commandant de bord s’y étant opposé. Des informations contradictoires circulaient, certaines expliquaient qu’il n’avait pas été présenté à l’avion suite à des interventions politiques, rumeurs démenties par Mr Sissoko lui même. (voir les messages circulant sur la liste Pajol via les archives : 23 février , 9h10 et 10h14 )

Toujours est il que Mr Sissoko était retourné au centre de rétention et que l’après-midi même le député socialiste de Massy Palaiseau, Mr François Lamy alerté par des militants resf sur sa situation particulière (20 ans en France, impliqué dans une lutte, muni d’une convocation à la préfecture en vue d’une régularisation…) lui rendait visite.
Mr Lamy, à l’occasion de cette visite se réjouissait par ailleurs que la situation était très calme dans le centre, que les grévistes de la faim étaient bien traités… Il déclarait également avoir pris des assurances auprès de la préfecture du 91 pour une suspension d’expulsion en attendant un réexamen de dossier.
Un nouvel avocat était mis sur l’affaire .
Ce même jour, l’association sos soutien ô sans papiers, lui rendait certainement aussi visite ou lui téléphonait puisque le soir même ses militant/es publiaient une interview de Mr Sissoko qui racontait sa tentative d’expulsion.
Nous constatons donc que Mr Sissoko était très entouré, qu’il avait semble t’il des « appuis » politiques officiels et que des militants de terrain étaient en contact régulier avec lui… Naïvement, nous avons été plusieurs à penser que les choses « roulaient » pour Modibo Sissoko, qu’on pourrait juste être là en cas de coup dur…

Or le lundi 23 février, on apprenait vers 15h qu’il allait de nouveau être présenté à l’avion Air France de 16h40. On l’apprenait trop tard pour aller à l’aéroport mobiliser les passagers, passagers qui d’ailleurs ont tout de même tenté en vain de s’opposer à l’expulsion de ce passager affaibli par une grève de la faim et sur lequel 6 policiers français s’acharnaient…
Outre le fait que cette expulsion nous fout la rage, peut être encore plus que les autres parce qu’il s’agissait là de quelqu’un qui était en lutte, de quelqu’un qui se battait, donc d’un camarade, on doit aussi dire qu’elle nous interroge… Comment Mr Sissoko a t’il pu être expulsé tout seul sans qu’il y ait du bordel à l’aéroport, sans qu’on le sache à temps ? Pourquoi ses soutiens ô sans papiers n’ont ils pas mis au point avec lui et ses camarades de rétention un système d’alerte téléphonique (les autres retenus préviennent que la personne est extraite)? A Palaiseau comme ailleurs, les flics et l’administration sont des spécialistes des multiples tentatives d’expulsion.
Comment a t’on pu se laisser bercer par les promesses d’un élu du parti socialiste, parti qui a ordonné la construction de plusieurs centres de rétention, parti qui a durci les lois régissant la liberté de circulation, parti dont les militants, en 2005 au Pré St Gervais ont gazé et aidé à arrêter les sans-papiers qui occupaient leur local ? Comment a t on pu accorder le moindre crédit à un élu qui se réjouit de trouver les retenus calmes et bien traités lors de sa visite au centre alors même que les prisonniers étaient en lutte depuis déjà une dizaine de jours ?
Pourquoi aucun appel à manifester sa solidarité aux sans papiers en lutte de Palaiseau, en se rendant par exemple devant le centre, n’a-t-il été lancé publiquement?
Ce soir on est beaucoup à s’interroger sur le sens et les méthodes de ce soutien…la naiveté n’excuse pas tout…

Quelques parmi d’autres, en lutte pour plus de papiers du tout et pour la liberté.