Jeudi 22 Janvier à Rennes vers 18 h 30, un groupe d’une trentaine de chômeurs et précaires a bloqué la chaîne de restauration rapide Speed Rabbit Pizza, place Sainte Anne. Les scooters de l’établissement ont été enchaînés. Le collectif voulait par cette action manifester une forme de solidarité effective entre chômeurs et travailleurs précaires. Ils revendiquaient une prime de 150 euros pour tous les employés de l’enseigne à Rennes, ainsi que l’abrogation des réformes actuelles renforçant les sanctions et le contrôle des chômeurs. Le patron de Speed Rabbit à Rennes, contacté, a refusé toute négociation et a fait appel à la police. Vers 20 h 10, une trentaine de policiers a expulsé les manifestants, non sans donner quelques coups de matraque. Les chômeurs et précaires ont quitté les lieux aux cris de « flics, pizzas, même combat ! »
La lutte continue. Le Mouvement des Chômeurs et précaires organise des permanences- réunions les lundi à 18 h et jeudi à 17 h au 22 rue de Bellevue, à Rennes (bus 3 Arrêt Jeanne d’Arc )

Le tract suivant a été distribué durant l’action :

Desserrons nous la ceinture !

Prologue
Nous voulons d’abord dire ceci : le coup de « la Crise », ça ne marchera plus. Le problème, c’est que nous n’avons jamais connu autre chose. Tout le monde en connaît les symptômes : stagnation des salaires, chômage de masse, travail en miettes, délocalisations, relégation des pauvres. Tout le monde connaît les « remèdes » gouvernementaux, cent fois pires que le mal : privatisations, baisse des pensions, radiations des chômeurs, expulsion massive de sans-papiers, occupation militaire des « quartiers difficiles » : bref, le « maintien de l’ordre » et des privilèges comme seul horizon politique.

L’absurdité de ces pseudo-remèdes, avérée par le creusement des inégalités et l’appauvrissement de la majeure partie de la population, conduit la « crise économique » à dégénérer visiblement en une crise de l’économie, c’est-à-dire en une crise politique. L’économie sensée nous réunir tend à se fissurer en deux partis : d’un côtés, ceux qui ont intérêt à ce que l’économie soit « relancée », c’est-à-dire ceux qui sont prêts à toutes les restructurations que l’on voudra, pourvu qu’ils restent aux commandes ; de l’autre, ceux qui ont intérêt à son effondrement, dégageant un horizon où la décision politique appartienne à tous, où soit mis fin, inséparablement, à l’exploitation de l’homme et de la nature.

Des emplois tellement « raisonnables »
Ici, dans la restauration rapide, on sait bien comment ça marche. Tu veux de l’argent ?. Sois zélé, rapide, efficace, souris et ferme ta gueule. Ceux qui n’ont pas d’autre choix s’habituent, finissent même par y prendre goût, et deviennent « managers », c’est-à-dire gagnent le droit de faire trimer les autres, tout en restant à peu près aussi exploités qu’eux. Quant aux échelons supérieurs, on ne les verra pas sur une mobylette, par tous les temps. On ne les voit d’ailleurs jamais : c’est à croire qu’ils n’existent pas. Détrompons-nous.

Nous sommes ici pour dire : entre les chômeurs, étudiants, précaires qui viennent ici gagner pauvrement leur vie et ceux qui possèdent les capitaux et dirigent l’entreprise, il n’y a pas d’intérêt commun. Notre intérêt, dirigeants invisibles mais bien réels, c’est de vous contraindre à augmenter les salaires, à augmenter les temps de pause, à baisser les cadences, à moduler les horaires comme nous l’entendons.

Cette action s’adresse aussi bien à ceux qui travaillent ici qu’à tous les collectifs de chômeurs précaires existants et à venir, qui veulent dire tant leur refus d’accepter n’importe quel emploi que leur présence résolue aux côtés de ceux qui refusent l’ordre managérial. Voilà bien en effet le type de travail qu’on veut rendre obligatoire pour les pauvres : se tenir disponibles pour exercer n’importe quelle tâche standardisée, en flux tendus selon les aléas du marché, sans le moindre rapport avec nos attachements, avec nos convictions. De quoi se sentir en règle avec la « société »…

Attaquer le pouvoir non là où il semble se concentrer dans des personnes qui n’en font que relayer la logique, mais là où il se dissémine dans des flux, bloquer ces flux (ce qui est facile à réaliser quand on n’a pas à craindre de licenciement) constitue une forme de solidarité offensive parmi les précaires, employés ou non, pour qui la succession des petits boulots et des périodes chômées est le lot quotidien.

L’autonomie aujourd’hui
Dirigeants, vous ne nous ferez pas pleurer en invoquant la concurrence, le risque de faire faillite, etc… Notre intérêt est de gagner en force, en autonomie, ce qui ne peut que vous affaiblir. Au fond, notre intérêt est d’apprendre à nous passer de vous. Ce ne sont pas vos pizzas et autres Big Mac qui nous nourrirons longtemps si la crise s’approfondit et met au chômage des millions de salariés, ou si, comme nous l’espérons, des grèves conséquentes s’appliquaient à bloquer durablement les flux de marchandises. Ce sont des cantines populaires qu’il nous faudrait, accessibles à tous, approvisionnées par des paysans de la région, et s’appuyant sur des communautés de lutte inédites entre chômeurs, précaires et salariés qui, comme nous, en avons assez de se serrer la ceinture.

NOUS EXIGEONS AUJOURD’HUI UNE PRIME DE 150 EUROS PAR EMPLOYE TRAVAILLANT DANS UN DES RESTAURANTS DE L’ENSEIGNE A RENNES
prime de début d’année qui serait une contrepartie minimale à toutes les heures supplémentaires, ainsi qu’aux heures effectuées les jours fériés, particulièrement importantes en période de Noël, et payées au même salaire que les autres dans la restauration rapide.

MAIS CETTE ACTION S’INSCRIT PLUS GENERALEMENT DANS LE COMBAT MENE PAR LE MOUVEMENT DES CHOMEURS ET PRECAIRES EN LUTTE DE RENNES,QUI REVENDIQUE NOTAMMENT :
-l’abrogation de la loi sur les Droits et Devoirs du demandeur d’emploi, en particulier l’offre raisonnable d’emploi, l’arrêt des radiations et autres sanctions envers les chômeurs,
-l’abandon de la fusion ANPE-Unedic,
-l’abrogation du RSA, le maintien des allocations à toute personne à qui n’est pas proposé un emploi conforme à ses aspirations,
-la possibilité pour les étudiants de suivre leurs études sans avoir à se salarier.

Mouvement des Chômeurs et précaires en lutte de Rennes, le 22 janvier 2009