Nous avons reçu du Pérou et nous publions ci-dessous une prise de position sur le « Sommet social alternatif » organisé par les syndicats, la gauche et quelques groupes libertaires, en réponse au Ve sommet UE-Amérique latine et Caraïbes du 16 mai à Lima.

Nous saluons ce texte qui dénonce, très justement, les « orgies mercantiles » que sont les sommets organisés par la bourgeoisie mondiale et qui ne sont que le théâtre des luttes impérialistes les plus sordides. Il met aussi à nu la nature bourgeoise des sommets alternatifs « de gauche » qui prétendent être une réponse aux plans des capitalistes. En réalité, cette fausse alternative au capitalisme, ce prétendu socialisme, ne prétend être, comme disent les camarades, qu’un capitalisme « à visage humain ». C’est donc un faux socialisme, un « socialisme bourgeois », comme le dénonçait déjà le Manifeste communiste :

« Une partie de la bourgeoisie cherche à porter remède aux anomalies sociales, afin de consolider la société bourgeoise.

« Dans cette catégorie, se rangent les économistes, les philanthropes, les humanitaires, les gens qui s’occupent d’améliorer le sort de la classe ouvrière, d’organiser la bienfaisance, de protéger les animaux, de fonder des sociétés de tempérance, bref, les réformateurs en chambre de tout acabit…

« Les socialistes bourgeois veulent les conditions de vie de la société moderne sans les luttes et les dangers qui en découlent fatalement. Ils veulent la société actuelle, mais expurgée des éléments qui la révolutionnent et la dissolvent. Ils veulent la bourgeoisie sans le prolétariat…

« Une autre forme de socialisme, moins systématique, mais plus pratique, essaya de dégoûter les ouvriers de tout mouvement révolutionnaire, en leur démontrant que ce n’était pas telle ou telle transformation politique, mais seulement une transformation des conditions de la vie matérielle, des rapports économiques, qui pouvait leur profiter. Notez que, par transformation des conditions de la vie matérielle, ce socialisme n’entend aucunement l’abolition du régime de production bourgeois, laquelle n’est possible que par la révolution, mais uniquement la réalisation de réformes administratives sur la base même de la production bourgeoise, réformes qui, par conséquent, ne changent rien aux rapports du capital et du salariat et ne font, tout au plus, que diminuer pour la bourgeoisie les frais de sa domination et alléger le budget de l’Etat…

« Car le socialisme bourgeois tient tout entier dans cette affirmation que les bourgeois sont des bourgeois – dans l’intérêt de la classe ouvrière. » (Marx-Engels, le Manifeste communiste)

Courant Communiste International

« Tous les sommets sont capitalistes »

Une fois de plus, nous sommes les témoins d’une réunion des grands pontes du capitalisme latino-américain avec leurs pairs européens et asiatiques (ALCUE- APEC), et ce spectacle d’orgie mercantile entraîne aussi sa réponse alternative avec le « Sommet des peuples », faite par toute la gauche du capital (ONG, syndicats, fronts communs, partis politiques, libertaires, etc.), qui prétend être l’alternative populaire, la voix des exclus. Notre groupe dénonce tous ces bourgeois philanthropes, ces philistins, pour ce qu’ils ont toujours voulu représenter, c’est-à-dire le bon côté de la bourgeoisie à la recherche d’un capitalisme à visage humain, qui ne vise en rien à détruire ce système putréfié mais plutôt à l’améliorer ou le réformer afin de le rendre acceptable aux prolétaires. Voyons d’ailleurs point par point ce qui se dissimule derrière les thèmes de cette première réunion.

1. Contre le « néo-libéralisme »

Comme si le capital avait quelque chose de nouveau (en ajoutant le terme néo) ! Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est le capitalisme de toujours, le même système imposé il y a plus de 500 ans, assassin, exploiteur et barbare. Avec ces jeux sur les mots, les sommets sociaux (et toute la social-démocratie) veulent faire croire à un capitalisme à visage humain, sans mauvais côté. Ils dissimulent, ce faisant, que tout capital implique une exploitation de travailleurs, une plus-value, des profits et par conséquent la division de la société en deux classes antagoniques (bourgeoisie et prolétariat). Qu’il soit privé ou étatique, le capitalisme est un seul et même système qui utilise l’exploitation pour se reproduire.

2. Stratégie de compétitivité Amérique latine-UE

Ces messieurs les philanthropes ne cherchent pas à détruire ce système pourrissant. Ils veulent une Amérique latine transformée en bloc capitaliste capable d’être compétitif, qui puisse traiter d’égal à égal avec les autres. Le Sommet des peuples et tous ceux qui le soutiennent veulent que tous, des chefs d’entreprises aux travailleurs latino-américains, nous oublions les différences de classes pour entrer ensemble dans la concurrence impérialiste, pour conquérir des marchés et réaliser des profits, comme tout bloc bourgeois ; bien évidemment, tout ceci reste dans le cadre de notre exploitation, celle des prolétaires.

3. Intégration régionale et alternative

Ils cherchent à créer des organisations, et des mouvements alternatifs dont l’objectif serait de sauver cet ordre bourgeois qui s’effondre par pans entiers. Ils tentent pour cela d’embobiner notre classe avec des propositions du type « assemblées constituantes », totalement opposées à l’organisation du prolétariat en classe, pour nous conduire sur la voie réactionnaire de la défense de la démocratie et affaiblir la lutte révolutionnaire. Le « bolivarisme », la « pensée autochtone latino-américaine », « l’indigénisme » et autres pièges idéologiques utilisés par les marionnettes Chávez, Correa, Evo, Lugo, Humala, avec lesquels le capitalisme tente de procéder à un lifting sur sa vieille et horrible gueule, sont du même tonneau.

4. Les changements climatiques et leur impact sur les ressources naturelles

Les sociaux-démocrates, en bons charlatans, rejettent en mentant et falsifiant la responsabilité du désastre climatique sur quelques mauvaises entreprises transnationales, poussant le ridicule jusqu’à proposer de créer un Tribunal des peuples chargé de les juger. Ils dissimulent la vérité : le destructeur de l’environnement n’est autre que le mode de production capitaliste, c’est-à-dire le système basé sur la production de marchandises et la génération de profits. Tant qu’on ne détruira pas cette logique criminelle, le réchauffement de la planète se poursuivra, avec la hausse du prix des aliments, la destruction des écosystèmes, la famine mondiale, etc. Aucun stupide « procès », aucune « exploitation rationnelle », aucun « contrôle démocratique des peuples » ne peuvent arrêter la barbarie sauvage dans laquelle plonge chaque jour davantage le capital, qui se moque de tout type de règlement ou « d’appel à la conscience » du style Greenpeace ou Forum social mondial.

5. Les peuples indigènes, la souveraineté alimentaire, la terre

C’est la position philanthropique typique consistant à « défendre » l’Indien tout en niant sa condition d’exploité, sa classe. En ce sens, elle revendique le « droit à la terre » c’est-à-dire le droit à être propriétaire, chef d’entreprise. La défense des droits (économiques, culturels et sociaux) revendiquée par ces canailles est la défense de l’individu entravé dans les filets du capital, pulvérisé et séparé de ses frères exploités comme lui, atomisé comme unité marchande, nié comme classe et comme prolétaire ennemi du capital. La bourgeoisie essaie de calmer les contradictions et les intérêts antagoniques entre les classes pour freiner toute tentative de lutte révolutionnaire.

6. Travail, migration, logement, droits du travail et syndicaux

C’est-à-dire la défense de l’emploi, du travail salarié, de l’esclavage du prolétariat et du droit des capitalistes de nous exploiter dans ses entreprises. Ces capitalistes vont plus loin : ils proposent la création de travail comme moyen de contrôle des migrations vers les villes pour que celles-ci n’explosent pas à cause de la surpopulation de prolétaires insatisfaits qui peuvent se soulever et devenir incontrôlables. Le syndicalisme, en bon partenaire des capitalistes, est lui aussi revendiqué par le Sommet social, pour son rôle historique de médiateur au service du capital et d’éternel traître contre les luttes prolétariennes qui tentent de détruire le capitalisme.

7. Migration, discrimination ethnique, criminalisation de la protestation

Le but est de démontrer à l’Etat bourgeois que les mouvements sociaux sont démocratiques et pacifiques, respectueux de la paix sociale (c’est-à-dire qu’ils prônent la conciliation entre les exploités et les exploiteurs), qu’ils ne sont pas un danger pour le capitalisme et que par conséquent l’actuelle vague de répression menée par le gouvernement « apriste » (1) est injustifiée.

Les capitalistes d’ALC-UE et d’APEC peuvent faire confiance au Sommet social, car c’est l’aile gauche de la bourgeoisie mondiale. Tout leur spectacle populaire fait de débats sociaux, de drapeaux, d’affiches et de mobilisations n’exige et ne revendique rien d’autre que les mots d’ordre révisionnistes, opportunistes et sociaux-démocrates : un commerce équitable, davantage de citoyenneté, de l’écologisme, le respect des droits humains bourgeois, etc. Rien dans ce paquet philanthropique bourgeois ne nie le capitalisme, tout aspire au contraire à « l’améliorer » et à le maintenir en vie.

La seule issue pour notre classe est la destruction du mode de production capitaliste et l’instauration de la dictature prolétarienne, des nécessités humaines.

Aucun sommet ou anti-sommet n’est opposé au capitalisme !

Destruction
du mode de production capitaliste !

Le communisme
est notre objectif !

Des prolétaires internationalistes – Liga-comunista@hotmail.com

1) L’APRA (Alianza Popular Revolucionaria Americana) est le plus ancien parti politique péruvien fondé par Víctor Raúl Haya de la Torre en 1921 sur une base idéologique du nationalisme « anti-yankee » et partisan d’un Front commun américano-indien en Amérique latine. Il est l’actuel parti gouvernemental dirigé par le président Alan Garcia Perez déjà au pouvoir entre 1995 et 2000 et revenu à la tête de l’Etat depuis les élections de 2006. Ce parti est traditionnellement situé dans la mouvance social-démocrate. Il mène depuis des années une lutte farouche envers les groupes terroristes (comme les maoïstes du Sentier lumineux) ou gauchistes.