– Jeudi 24 Avril 2008 20h30 : « Putain d’usine » de Jean-Pierre Levaray
Projection débat autour du film en présence du réalisateur

Prix libre et / ou partage nourriture-boisson

– Vendredi 25 avril 2008 20h30 : « Et pourtant ils existent ».
Projection – discussion sur l’histoire du syndicalisme d’action directe

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Texte de présentation du film « Putain d’usine ».

Les ouvriers et les ouvrières sont absents, ou tout comme, des médias, sauf dans certains rôles préétablis : à la télé, seulement, lorsqu’une boite ferme et surtout, sans volonté d’écouter leurs explications de la politique sociale et économique de l’entreprise. Ce que montrent les journalistes, c’est, surtout, des ouvriers désespérés, acculés, face au chômage. Juste une manière de faire comprendre à ceux qui bossent encore : « fermez-la, vous, vous avez encore la chance de bosser ».

De même, sauf les luttes finales, je veux dire celles de la dernière chance avant la fermeture, on montre très rarement des ouvriers ou ouvrières en lutte. Pire, lorsque, par exemple, les salariés de la SNCF sont en grève, est-ce que la télé les interroge ? Non, elle fait parler les usagers en colère. Pour savoir quelles sont les revendications des grévistes, il faudra se rendre auprès des piquets de grève. (…)
À la radio, c’est pire. Pour savoir ce que pense une caissière d’Auchan sur les 35 h, inutile d’allumer la radio. De même, pourquoi celle-ci, sauf cas spectaculaire ou particulièrement meurtrier, ne parle-t-elle, jamais, des accidents du travail ? Pourtant, chaque jour, des ouvriers meurent au travail.

Dans la presse écrite quotidienne, les conflits ont quitté les pages dites sociales pour atterrir dans les pages économiques ! Quant aux news magazines, comme on dit, la classe ouvrière ne fait pas du tout partie de son « public cible », alors cherchez ailleurs… Au cinéma on peut citer Guédiguian ou Ken Loach… mais c’est vraiment marginal d’y voir le quotidien du boulot. Et côté littérature, hormis, peut-être, la littérature prolétarienne, c’est sans doute pire : Pour y trouver ceux qui pointent chez Renault, vous repasserez. C’est la première raison pour laquelle j’ai écrit Putain d’usine. Je me suis dit : ces gens-là, qui tiennent les médias, parlent pour leur classe. Si on veut parler de la classe ouvrière, il faut que ce soit les prolos eux-mêmes qui en parIent. Il se trouve que j’écris assez souvent, alors je me suis pris par la main.

La deuxième raison, c’est que cette forme de salariat, ouvrier de fabrication dans la chimie, est en train de disparaître d’Europe. Il y a une forte restructuration dans ce secteur, d’abord à cause des nouvelles techniques qui nécessitent de moins en moins de personnel, d’autre part parce que les produits fabriqués n’ont pas assez de valeur ajoutée et ne sont plus suffisamment rentables pour les actionnaires, enfin parce que, avec une certaine prise de conscience écologique, suite aux nouvelles contraintes environnementales et de sécurité, les gros trusts vont accélérer le transfert vers les pays de l’Est et l’Asie qui, en plus de proposer une main d’œuvre, pour l’instant, moins chère, sont directement producteurs de matières premières nécessaires aux fabrications d’engrais. Ces métiers disparaissent donc d’ici. Il restera, pour un temps, l’industrie pétrolière et quelques produits rares et vite rentables. Mais n’allez pas croire, vous consommerez toujours les mêmes cochonneries.

Pour info, car on n’en parle nulle part, en ce qui concerne le groupe où je travaille (Total) : l’an demier Atofina a supprimé 500 emplois, et annonce que ça va recommencer cette année pour un nombre équivalent ; Grande Paroisse, suite à la catastrophe de Toulouse, annonce un plan social pour le printemps, en sachant que d’ores et déjà GP met 175 salariés en pré-retraite à Toulouse, ferme un site à Waziers, dans le Nord (75 personnes), et ferme un dépôt à Brest ; enfin, Hutchinson, autre filiale de Total, annonce 1 8OO suppressions d’emplois d’ici la fin de l’année.

C’était ma deuxième raison d’écrire Putain d’usine : témoigner sur un boulot qui va disparaître. Je ne me suis pas senti investi d’une mission, j’ai simplement voulu raconter les conditions de travail, telles qu’on les vit quotidiennement à l’usine, notamment l’aspect mortifère du salariat. Montrer vraiment qu’on perd sa vie à la gagner. Le déclic a sans doute été un accident du travail de trop à l’usine. Ça m’a choqué et il a fallu que je prenne la plume.

Enfin, la troisième raison, elle est politique. Ça fait un moment que je veux écrire un bouquin politique à la première personne. Avec la brochure Suzana (1), j’avais déjà commencé puisque, pour parler des sans-papiers, j’avais préféré le faire sous la forme d’un entretien avec une femme originaire de Sao Tomé qui avait croisé quelques temps les militants du Groupe de Rouen de la FA. Le parcours de Suzana résumait tous propos sur la vie des immigrés en France. Donc, partir du vécu, de l’expérience et de ce qui vient de l’intérieur. Je ne voulais pas, du moins j’ai essayé, ce sont les lecteurs qui le diront, avoir un discours militant, qui pour des lecteurs non-avertis peut friser la langue de bois. Putain d’usine, c’est comme je l’ai dit, pour montrer le côté mortifère du salariat, mais c’est aussi pour montrer les aspirations véritables des travailleurs : ce n’est aucunement de prendre le pouvoir, mais bien de ne plus travailler. Il y a actuellement, dans les milieux d’extrême et d’ultra-gauche, dans le milieu libertaire, mais aussi sur différents sites internet (comme celui d’AC !, par exemple), un important débat sur le travail, sur le combat pour son abolition. Même plus un combat pour l’abolition du salariat, mais bien du travail. Cela relève certes de l’utopie, mais c’est bien de cela que rêvent tous les travailleurs et cela mérite qu’on s’y intéresse.

(1) Suzanna, chronique d’une sans papiers, édition du Monde Libertaire, 2001.
Jean Pierre Levaray
École émancipée, 06/05/2002

Texte de présentation « Et pourtant ils existent »

Combien de personnes savent que la CGT, quand elle s’est constituée, était différente des syndicats dits représentatifs actuels.

Entre 1895 et 1914, le syndicalisme révolutionnaire mise sur l’efficacité de la grève générale pour renverser d’un seul coup la démocratie bourgeoise et le régime capitaliste.

En 1906, la Charte d’Amiens est largement influencée par les partisans de l’action directe. Cette influence vient de la 1ere Internationale, de la Commune, de la Fédération des bourses du Travail lancée par Fernand Pelloutier et traversée par le courant anarcho-syndicaliste.

Cet héritage sera revendiqué par la CGT-SR de 1926 à 1939 et la CNT depuis 1946.

Avec les interventions de :

David Rappe, Franck Mintz , Michel Fabre, Stéphane Dinard

Durée : 64 mn