Ceci n’est pas en soi étonnant : ruses, mensonges, tromperies et dissimulations ont toujours été les armes favorites de Lénine, des bolchéviques et de leurs successeurs.

Pour mémoire, voici un bref rappel de faits historiques, toujours opportun quand quelques apprentis dictateurs veulent se parer du vernis « libertaire » :

–* Le parti bolchevik (de Lénine et de Trotski), a créé, dès décembre 1917, les premières Tchékas. C’est Djerzinsky, un bolchevik, qui se charge d’organiser cette police politique sanglante, ancêtre du KGB. Dans ses rangs, on retrouve Iagoda, le bourreau qui officiera sous Staline.

–* Première action de ces Tchékas : briser la grève des fonctionnaires de Pétrograd.

–* En avril 1918, pour préparer ce qui va suivre, les tchékistes attaquent les locaux anarchistes de Moscou. Ils font 25 exécutions sommaires.

— * Mai-Juin 1918 : durcissement de la dictature de Lénine , répression contre les grévistes, interdiction de 205 journaux socialistes, dissolution des soviets non-bolcheviks (conseils ouvriers) par la force armée.

–* 14 Juin 1918 : à Kolpino, la Tchéka tire sur une marche de la faim et assassine 10 ouvriers. A Ekaterinburg, 15 ouvriers sont tués par les « Gardes Rouges », lors d’un meeting contre la répression…

Cette liste sinistre n’a pas de fin. Elle démontre que le point de départ de la dictature est la lutte des bolcheviks contre les éléments révolutionnaires et populaires de Russie pour asseoir la domination de leur parti malgré les luttes sociales, contre ceux qui les mènent et contre l’énorme majorité de la population peu convaincue par les arguments de Lénine.

Les bolcheviks, à une époque où la réaction blanche tsariste n’est pas encore organisée, organisent, quant à eux, sous l’impulsion de Lénine et de Trotski, la lutte contre les véritables révolutionnaires. On retrouve ainsi Léon Trotski, prescrivant l’ouverture des premiers camps de concentration pour les éléments douteux, c’est-à-dire les grévistes, des paysans, les opposants de gauche.

Trotski est, avec Lénine et… Staline, un partisan inconditionnel de la dictature dite du prolétariat et de la Terreur Rouge qui seule permit de l’imposer. En récompense, il devient Maréchal de l’année rouge. En tant que maréchal, Trotski va diriger les massacres à grande échelle, lors des révoltes de marins, de paysans et d’ouvriers qui luttaient contre les privilèges que s’étaient octroyés les bolcheviks. Les anarchistes, les anarcho-syndicalistes, furent parmi les premières victimes de l’extermination de toute opposition commencée sous la houlette de Lénine et mise en oeuvre par Trotski.

Le piolet qui allait tuer Trotski fut à Staline ce que fut la nuit des longs couteaux à Hitler une manière de se débarrasser de complices devenus des rivaux.

Le fait d’avoir été assassiné par Staline ne fait pas de Trotski un anti-stalinien, pas plus que le fait, pour Rhöm, d’avoir été assassiné par Hitler n’en fait un antifasciste. Car il ne faut pas oublier que Rhöm a d’abord été le chef des SA, persécuteur de juifs et d’opposants politiques, avant d’être assassiné par un courant fasciste concurrent. On retrouve le même cas de figure dans les « disparitions » sous Franco de certains chefs phalangistes ; … et la lutte fratricide de Mégret contre Le Pen ne saurait faire ni de l’un ni de l’autre un antifasciste, même si l’un d’eux venait à décéder dans un « accident ».

A la mort de Lénine c’est la lutte pour le pouvoir qui allait opposer, après une longue cohabitation, Trotski à Staline. Mais, sur le fond, tous les trois étaient parfaitement d accord pour organiser la dictature. Il n’y a aucun doute historiquement possible là-dessus. La fable qui consiste à laisser croire que le trotskisme fut une réaction au stalinisme sur le fond (et non une lutte entre deux ambitieux pour le pouvoir) et qu’il est innocent des crimes bolcheviks constitue une nouvelle forme de négationnisme historique. En effet, chacun peut vérifier que de 1918 à 1924, période pendant laquelle Lénine, Trotski et Staline agissaient main dans la main, il y a eu une répression terrible contre le peuple russe et contre les révolutionnaires.

Rappelons à tous ces  » politichiens » qui voudraient cacher leur complicité idéologique avec les massacreurs derrière un vernis libertaire, qu’un anarchiste, un libertaire, un anarcho-syndicaliste se reconnaît justement au fait qu’il ne soutien aucune dictature, fut-elle « du prolétariat », et que, à l’inverse du capitalisme et du communisme étatique, l’anarchisme n’a pas sur ses mains le sang de travailleurs.
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CQFD Le Combat syndicaliste, été 1999

samedi 12 janvier 2002

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« Nous sommes des hommes libres, sans dieu, sans maître et sans patrie, les ennemis irréconciliables de toutes les dictatures, y compris celle du prolétariat. »

Fernand Pelloutier ( 1867 – 1901 ) (fondateur des bourses du travail — NDT)