Même si les médias (unanimes comme en Corée du nord, etc.) qui traquent sans relâche les « voyous » ont décrété le mouvement étudiant terminé (manière de ne pas dire que le mouvement étudiant en a peut-être enfin fini avec les médias, acteurs à l’avant-garde du combat de classe).
Si la fin est dans les moyens, c’est peut-être un début de victoire. la disparition des écrans qui consacrerait l’idée qu’un mouvement qu’on entend plus n’existe plus (donc qu’il ne peut exister que dans sa capacité à intéresser les médias, propagande ou marketing oblige) pourrait bien être le nouvel enjeu du mouvement : que les réseaux continuent et augmentent leur capacité à assurer la circulation de l’information concernant le combat actuel.

Et les réseaux tiennent bon. l’ampleur du mouvement n’a pas diminué et la coordination de l’information au niveau national est assurée notamment par les Indymédias. de plus, enfin, s’amorce une réelle mise en place de lieux d’élaboration collective pour une réforme de l’université impliquant une réflexion critique sur la société et la place de l’université (et de ceux qui n’y ont pas accès) et de la production des savoirs dans celle-ci.
Deux enjeux au moins pour le mouvement et sa capacité à s’affranchir de certains des rouages de la domination :

– Se plus habiliter le discours ambiant qui confère sa légitimité aux médias qui le véhicule et l’alimente (telle l’exaspération des usagers des transports, dimension évaluative qui forme les plis idéologiques du tolérable et de l’intolérable) pour s’ ancrer dans la réflexion sur l’avenir de l’université, de la recherche scientifique et, plus fondamentalement, des rapports du savoir et de la société. En finir avec la perte de temps qui n’opposerait que « bloqueurs » et « antibloqueurs »…avec ces discours parasites qui font écran à ce que à tout ce dont l’immanence de l’événement est porteur. « le possible de préexiste pas, il est créé par l’événement ».

– Se mettre alors en mesure de proposer les moyens d’une mise en oeuvre d’une réforme issue d’une telle concertation. sortir du simple refus et faire en sorte que ce travail du négatif soit l’amorce d’une transformation de l’université par l’énonciation partagée d’un nouveau mode d’organisation celle-ci. Programme ambitieux mais dans laquelle se lance déjà des collectifs de chercheurs, d’étudiants et de personnels universitaires.

Ce n’est pas tant viser l’autogestion ou la socialisation complète de la production des savoirs dont il s’agit ici en s’affranchissant de la tutelle de l’Etat mais, de faire en sorte que le terme d’autogestion – ou tout autre terme qui pourrait convenir aux susceptibilités identitaires – serve d’abord à désigner que ce qui en acte (le moyen et non la fin) devrait permettre d’aboutir à une autre idée de (la) réforme. C’est en cela que nous devrions penser le mouvement actuel comme un processus critique dans lequel converge a priori, et de manière transversale aux diverses organisations et aux non organisés, cette commune volonté de dépassement de la situation actuelle qui n’a pas encore forgé les termes de son énonciation. L’événement est irréductible…

La lutte doit continuer et construire, sinon les raisons de l’abandon ne seront in fine que ceux de notre propre incapacité à inscrire dans le réel ce qui demeurera alors de l’ordre du fantasmatique. contribuer à la ramification des réseaux sans exclusives (ça c’est pas gagné), favoriser les lieux et les temps pour la discussion, mettre en jeu les savoirs dans l’événement social même. Et plus largement s’ouvrir sur la société, puisque l’éducation concerne l’ensemble de la population, comme un pan (séparé !) de la production parmi d’autre d’ailleurs.