Mais au-delà de cela, plusieurs remarques peuvent être rapidement faites (à étayer) :

Déjà, la quasi-totalité des propositions se fixe sur les acteurs individuels, et non sur les industries (publiques et privées). Pourtant, nous savons très bien que les problèmes écologiques –dont le réchauffement climatique n’est qu’une infime partie- sont causés principalement par les grands appareils technocratiques.
Par ailleurs, ce Grenelle apparaît comme un vaste débat participatif « catharsistique », ou plutôt comme une technologie socio-culturelle de domination (S.Juan). Une grande manipulation. Un exutoire. D’ailleurs, c’est le lieu du lobbying le plus efficace. Lorsqu’on connaît la porosité entre les acteurs privés, publics, et même d’ONG, qui est de notoriété publique, cela ne rassure pas non plus. Les dirigeants des appareils, des services de contrôle, ou même d’ONG, sont très liés, voire sont les mêmes. Très largement, les parties sont aussi juges. Quant aux autres, ils n’échappent pas aux logiques politiciennes et au lobbying. Il en sortira une grande réjouissance suicidaire, davantage de déni, et une écologie politique définitivement morte.
Sur ce point, le Pacte du Hulot n’a fait que finir de tuer l’écologie politique (pour reprendre la phrase de C.Lepage, présidente du CRI-GEN et ancien ministre de l’écologie), ou plutôt le vaste mouvement social écologiste, qui s’était affaibli de lui-même. En s’institutionnalisant, les associations sont devenues gestionnaires, produisant une protestation bien soft, et participant au système productiviste.
Bref, le productivisme a de beaux jours devant lui. D’autant que la consommation, c’est-à-dire les modes de vie, est quasi-absente des questionnements de ce Grenelle. C’est pourtant, après la critique des logiques d’appareil, le point central qui devrait nous préoccuper. La décolonisation de l’avenir passe par un changement des modes de vie. Mais il est difficile de prendre conscience de notre devoir d’a-consommation (ou au moins de consommation alternative) et de la nécessité de sortir du productivisme. D’autant que pour tout travailleur de la matière, le productivisme est sa raison d’être.
Considérer que le sens de la vie est dans l’Avoir, et non dans l’Etre, est une caractéristique des sociétés modernes capitalistes –que l’on retrouve dans toutes les sociétés traditionnelles au capitalisme primaire à un bien moindre degrés. Cela ne peut conduire qu’à l’insatisfaction, puisqu’on peut toujours avoir plus. L’Avoir engage sur la voie de l’agitation et ne tolère jamais de repos. Les relations entre les individus et les choses sont privilégiées par rapport aux relations entre personnes. Bien sûr, le plaisir des uns se reporte principalement sur les « sacrifiés », les exclus, le « tiers-exclu » (Haesler). Mais la souffrance ne porte pas seulement sur celui qu’on croit, et de leur condition peut-être pourraient-ils mieux voir la grandeur du vécu qui n’est pas dans les artifices. L’Avoir, c’est la prison. Et il nous faut sortir d’une société de l’Avoir pour retrouver le bien-vivre. Octobre 2007. JV