Manifestive et occupation des arbres : un récit
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Samedi 19 mai 2007, centre ville de Dijon. La manifestive de soutien à
l’Espace Autogéré des Tanneries commence par la lecture d’un texte de
solidarité en provenance de Barcelone, où, au même moment, se tient une
manifestation de défense des espaces autonomes, clôturant quinze jours
d’actions mené·e·s par les squatteurs et squatteuses barcelonais·es.

Un cortège déterminé et festif d’environ 400 personnes parcours les rues
de Dijon, derrière une banderole « Défendons les espaces
autogérés ! » [1], au rythme d’une batucada hybride
parigo-freiburgo-lyonnaise [2] (« big up » aux samba kids !). Outre les
bulles [3,4,5] et pancartes [6,7,8] portées par les manifestant·e·s, des
affiches et détournements sont collés sur les murs et vitrines de la
ville tout au long du parcours [9].

[1] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[2] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[3] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17775…7.jpg
[4] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17775…8.jpg
[5] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17775…9.jpg
[6] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[7] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/P1010…l.jpg
[8] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/P1010…l.jpg
[9] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg

Au moment de la dispersion, le cortège se dirige vers le square situé
derrière la mairie. Sur place, des grimpeur·euse·s s’encordent et se
hissent rapidemment au sommet des arbres [10] avec hamacs, vivres,
bâches et banderoles, pendant qu’est distribué un tract intitulé
« cerise sur le tilleul » [11]. Il est annoncé l’occupation aérienne et
permanente du parc, soutenue par diverses activités au sol, dans
l’attente d’un engagement ferme de la mairie sur l’avenir des Tanneries.

De grandes banderoles sont suspendues entre les arbres [12,13], pendant
qu’en contrebas, sont installés un stand de frites « Do It
Yourself » [14], des tables de presse [15], ainsi qu’un grand nombre
d’affiches et photos représentant dix ans de mémoire des Tanneries, tout
le long des grilles du square.

Le soir venu, le maire demande à la police d’intervenir pour faire
évacuer le parc et mettre un terme à l’occupation des arbres, mais la
préfecture lui répond qu’elle ne dispose pas des forces nécessaires. Le
directeur de cabinet du maire et des élu·e·s [16] se rendent alors sur
place la nuit venue, pour demander la fin de l’occupation. Nous
refusons. Quelques minutes plus tard, promesse est faite de renouveller
la convention d’occupation jusqu’en 2011. À défaut de papier signé, les
occupant·e·s restent dans les arbres, et passent une première nuit en
hauteur pour maintenir la pression.

Le collectif se réunit, et accepte de quitter le parc à une condition : que la
convention signée ne puisse pas être cassée, si la Générale de Santé venait à
acquérir le terrain actuellement occupé par l’espace autogéré. Après avoir
obtenu un accord ferme sur ce point et avoir réceptionné, dimanche midi, la
convention prolongée [17] signée de la main du maire, nous mettons fin à
l’occupation.

[10] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[11] http://squat.net/tanneries/documents/Tanneries_-_Tract_…9.pdf
[12] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[13] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_1…l.jpg
[14] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17777…2.jpg
[15] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17777…0.jpg
[16] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/17776…6.jpg
[17] http://squat.net/tanneries/images/photos/20070519/IMG_0…l.jpg

Dernière rencontre au cabinet du maire
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Au lendemain de l’action, nous nous sommes rendus à la mairie, pour
discuter des termes de la garantie vis à vis de la Générale de Santé.
Nous avons obtenu qu’une clause soit ajoutée au contrat en cours de
négociation, indiquant que même si le terrain que nous occupons était
cédé, notre convention avec la mairie resterait valide.

Par ailleurs, la mairie, qui souhaitait de toute évidence calmer
l’affaire avant la fête de rue que nous annoncions pour le 9 juin,
veille des élections législatives, a annoncé sa volonté de négocier avec
nous sur l’après 2011. Sans nous montrer fermé·e·s au dialogue, nous
avons à ce sujet affirmé clairement que la nouvelle signature ne nous
engageait absolument pas à partir après 2011.

Après 10 ans de vie et construction sur un site, nous souhaitons
toujours y rester le plus longtemps possible, quelles que soit les
énormes pressions financières sur ce terrain ou les possibilités de
relogement.

Au conseil municipal du lundi 21 mars 2007
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La droite locale, qui, la semaine dernière, nous accusait dans la presse
d’avoir « organisé » les émeutes du 6 mai au soir et se plait à nous
voir depuis quelques années comme grand responsable de l’« insécurité »
à Dijon, n’a pas tardé à contre-attaquer.

En ouverture du Conseil Municipal, grand show politique depuis sa
retransmission sur internet, Yves Japiot de l’UMP, a demandé des comptes
au maire sur la prolongation de la convention, annoncée par voix de
presse le matin même [18], et a rappelé de quelle manière
« scandaleuse » une nous avions « squatté » le conseil municipal de mars
dernier. Il a ensuite interpellé le maire sur le fait que le
renouvellement de la convention encourageait un foyer de « subversion »
(citant nos tracts), et qu’il laissait en cadeau à la future mairie, par
un coup de force, une hypothèque sur l’avenir de ces locaux. Et de
continuer sa tirade en souhaitant que nous « trouvions du travail » (!),
« but de tout homme » et que la mairie ne permette la poursuite que des
activités jugées « utiles » dans des locaux qu’elle fournirait.

François Rebsamen lui a longuement répondu, confirmant qu’il avait pris
la responsabilité de proroger notre convention de 3 ans dans des termes
inchangés, jusqu’en juin 2011, poursuivant ainsi : « Maintenant, il faut
être un peu patient, M. Japiot, les élections auront lieu au mois de
mars de l’année prochaine. […] Mais, ce qu’un maire a fait, un autre
maire peut le défaire et donc vous pourrez largement faire campagne pour
annoncer que vous supprimerez le bail des « Tanneries » » avant de
conclure par « Je vous souhaite bien du courage ! ».

[18] http://www.bienpublic.com/actu/faitsdiv/20070521.BPA025….html

Conclusion (provisoire)
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Nous retenons pour notre part, après deux nouveaux mois de lutte, que
les occupations de Conseil Municipal et de la Générale de Santé, les
présences aux meetings électoraux, les centaines de mails et de coups de
téléphones reçus par la mairie, les pourparlers avec les divers acteurs
du projet d’urbanisme, les tracts et affiches dans toute la ville, les
nombreuses lettres de soutien de collectifs et d’associations, les
actions de solidarité internationales à Berlin, Barcelone ou Copenhague,
l’occupation des arbres devant la mairie n’auront pas été en vain.
C’est bien cette mobilisation massive aux stratégies multiples qui nous
aura permis de gagner de nouveau une relative tranquilité.

Cette lutte nous a aussi démontré à quel point les projets qui menacent
des espaces précieux devaient être surveillés et combattus le plus tôt
possible pour espérer pouvoir les contre-carrer. Aujourd’hui, nous avons
obtenu une victoire, temporaire certes, mais qui prouve, et c’est
primordial, que des rapports de force et actions directes peuvent
toujours aboutir et permettent de se faire entendre. Cela renforce notre
confiance dans notre capacité à lutter encore, avec vous, le jour où
l’avenir des « Tanneries » sera de nouveau menacé.

Nous n’aurions rien pu faire sans le soutien de toutes celles et ceux
pour qui « Les Tanneries » comptent et qui se sont bougé·e·s à Dijon ou
à des centaines de kilomètres. Nos pensées vont tout spécialement aux
autres espaces autonomes actuellement menacés, des squats barcelonais à
la Rigaerstraße et au Köpi à Berlin, en passant par le KTS à Freiburg,
ou Ifanet à Thessalonique, sans oublier les ex-occupant·e·s
d’Ungdomshuset à Copenhague. C’est vers eux que nous souhaitons
maintenant porter notre solidarité. Les temps qui viennent ne
s’annoncent pas faciles, alors profitons du répit accordé ici pour
multiplier subversions et solidarités.

Invitation à fêter ça, les 9 et 10 juin
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Dans la mesure où la mairie a cédé sur nos revendications, nous
conservons les concerts et portes-ouvertes annoncés pour les 9 et 10
juin, mais acceuillerons l’ensemble des activités aux Tanneries. Ce sera
pour nous l’occasion de fêter 10 ans d’espace autogéré, de présenter nos
activités et de visibiliser d’autres résistances en cours.

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| On reste et restera… parce qu’on aura toujours la rage ! |
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— le collectif de l’Espace Autogéré des Tanneries