21 h – Après les résultats, direction place de la Victoire à Bordeaux. A peine quelques centaines de personne. La manif se met en marche vers la mairie où des militants UMP, bien à l’abris derrière les grilles et perchés en haut des murs, peuvent se payer le luxe de nous narguer, coupe de champ’ à la main. GRRRRR. On commence à s’étoffer : un bon millier. On s’arrête un moment, on gueule « SARKO AU KÄRCHER » et autres slogans d’une finesse imparable, on se parle, on se soutient. Ya surtout des jeunes (20-35 ans) mais pas que ça. Ya la LCR, CNT, les anarchistes, certes, mais pas que ça, ya nous aussi, et beaucoup d’autres qui sont pas du tout dans l’extrême gauche (contrairement à ce que relatent les médias). Direction Gambetta, Cours de l’Intendance, Rue Sainte Catherine – on s’étoffe encore et toujours, ils ont dit 2000 ? On était plus, promis. – Cours Victor Hugo… Une hésitation : va-t-on sur les quais, au siège de l’UMP, à Saint Mich’ ? Va pour Saint Mich’, on veut pas foutre la merdre. Ca défile tranquillement (sans violents, ni vandales) mais fermement et bruyamment (poubelles, mégaphones, klaxons, etc), vers le marché des Capucins puis Rue Elie Gintrac. Tout le long, des gens à leur fenêtre nous regardaient tantôt pour nous saluer, tantôt pour s’indigner, ou même pour se divertir. D’accord, certains ne pouvaient peut-être pas se joindre à nous mais les autres, je n’arrive pas à comprendre qu’ils ne soient pas venus… Retour à la Victoire. On est vraiment plus nombreux, c’est flagrant. Les CRS devant la porte ressemblent à des romains dans Astérix, ils font la tortue avec leur boucliers… Ca y est, les excités s’excitent et balancent des bouteilles, provoquent d’un peu plus près… Les CRS ne bougent pas. Quelques manifestants rentrent chez eux, les autres retournent à la mairie. – 23h30 – Cette fois ça va dégénérer. Les excités ne sont pas plus agressifs qu’auparavent mais les CRS trouvent que ça a assez duré. D’abord ils gazent : petit mouvement de foule vers l’arrière – ça tousse, ça pleure, ça éternue – mais tout se remet vite en place. Bientôt ils commencent à charger, tabasser tous ceux qu’ils peuvent. Une jeune fille à terre se prends des coups de pieds, on la tire vers le côté, elle pleure, elle arrive plus à respirer, elle avait rien fait ni provoqué ni bougé… Je ramasse une nana qui s’est cassée la figure (littéralement : les 2 dents de devant) dans un mouvement de foule. Elle pleure, elle comprend pas, elle a rien fait et elle se fait piétiner, elle a mal… Ses amis la récupèrent, la réconfortent. Je cherche les miens : 2 derrière à l’abris, 2 devant dont 1 abasourdie qui veut pas y croire, qui veut regarder pour réaliser que ça existe et 1 qui essaye de la récupérer. J’y vais. On lui explique qu’on lui laisse pas le choix : « tu viens avec nous, à l’arrière, t’es pas venue pour t’en prendre plein la gueule ! » Ca se calme. On applaudit la belle démonstration de force qu’on vient de subir. Les nerfs et les visages sont tendus. Et puis ça recommence. Panique. Violences. Courses. Révoltes. Cris. Moi aussi je hurle un peu, je tremble, je suis en colère. On reste derrière un bon moment, on accuse le coup en observant. On a mal aux pieds, mal au coeur, mal au nez et mal aux yeux. Ca suffit, on rentre. – 1h – Des amis qui sont restés nous ont dit que ça avait duré jusqu’à 4h du mat’…

Encartez-vous si vous voulez, portez le deuil si vous voulez, le principal c’est de réagir, chacun à sa façon.
Nous, on cherche comment on va résister, mais vu la partialité des médias et à quel point ils ont édulcoré les évènements de cette nuit, on se dit qu’on va commencé par relater la vérité de façon impartiale ou explicitement subjective, honnête quoi…

Haut-le-coeur… Hauts les coeurs : ne pas se laisser abattre et réagir.