! Le deuxième tour des présidentielles et les législatives qui suivront vont être utilisées pour diffuser à plus haute dose encore l’intoxication électoraliste selon laquelle le vote est le (seul) moyen pour faire changer les choses, le seul moyen pour s’opposer aux attaques bourgeoises – ou au moins pour peser sur la politique suivie par les dirigeants du pays.

Le système politique bourgeois démocratique repose en réalité sur un double mensonge : le mensonge selon lequel tous les citoyens étant « libres et égaux en droit » ils disposent tous de la même parcelle de souveraineté politique, qu’ils soient patron d’une multinationale ou chômeur en fin de droit ; et le mensonge selon lequel l’Etat (avec tout son appareil politique, judiciaire, répressif, etc.) est une institution « impartiale » au dessus des classes et au service de tous.

En réalité la société capitaliste est divisée en classes aux intérêts opposés, divisée entre deux pôles entre les quels gravitent des couches intermédiaires : la classe dominante de la petite minorité de ceux qui s’approprient toutes les richesses – les capitalistes – et la grande masse
de ceux qui ne possèdent rien – les prolétaires, obligés de se vendre aux patrons pour vivre.
L’Etat est avant tout l’organe de défense du mode de production capitaliste et de la domination politique de la minorité bourgeoise. Grâce aux différentes institutions étatiques, aux grands moyens de communication aux mains des capitalistes, comme au poids des organisations collaborationnistes que ces derniers ont achetées, « les idées dominantes sont les idées de la classe dominante » (Marx) : autrement dit, ce sont des forces bourgeoises qui façonnent l’ « opinion publique » et déterminent le prétendu « libre arbitre » de l’individu électeur.

Mais en dépit de leur domination économique et politique, les capitalistes ne peuvent empêcher que les antagonismes entre exploiteurs et exploités ne débouchent sur des luttes, des affrontements au cours desquels les exploités sur la base de l’expérience concrète de leur force collective peuvent s’émanciper de leur sujétion aux forces bourgeoises.
Pour les capitalistes comme pour leurs valets réformistes attachés au maintien de leurs privilèges dans le système existant, il est donc essentiel de détourner les jeunes et les prolétaires de la seule voie réaliste et efficace de se défendre , la lutte ouverte ; pour ne pas mettre en difficulté le capitalisme national, et pour éviter qu’une lutte défensive puisse déboucher sur une lutte frontale contre l’ordre bourgeois. C’est pourquoi lors des luttes contre le CPE, le chef du PS Hollande déclarait que le CPE serait appliqué puisque la loi avait été votée et que la seule chose à faire était d’attendre les prochaines élections. Les jeunes et les salariés ne l’ont pas écouté et ils ont obligé par leurs luttes le gouvernement à retirer cette mesure votée (même si les directions syndicales ont réussi à stopper le mouvement avant qu’il aille plus loin) !

En 2002, une formidable campagne d’opinion, menée par à peu près tous les médias, tous les partis, toutes les associations, avait ramené en masse les moutons électeurs vers les urnes afin de soutenir le politicien bourgeois escroc en chef, Chirac.

Aujourd’hui une campagne d’opinion différente mais tou aussi funeste veut assurer la réussite d’une nouvelle escroquerie : le renforcement du PS en tant qu’alternative à la droite sarkozyste. Après avoir réussi à ramener vers les urnes pas mal de travailleurs et de jeunes des milieux populaires qui s’en détournaient, cette campagne cherche à créer , derrière la candidate fabriquée par les médias, un rassemblement autour du PS au nom de l’anti-sarkozysme. Lorsque Bayrou a déclaré que de « puissants intérêts » se trouvaient derrière la prise de position du « Monde » en faveur de la présence de Ségolène Royal au 2e tour, il ne visait sans doute pas seulement le groupe Lagardère , mais les secteurs bourgeois les plus influents qui préparent cette solution depuis de longs mois.
En effet dans une situation où le capitalisme français rencontre des difficultés importantes sur le marché mondial, tous les capitalistes réclament grands cris l’accélération des attaques contre les travailleurs, la remise en cause plus nette des « acquis sociaux » concédés autrefois (et Bayrou, Royal comme Sarkozy sont d’accord sur ce point).

Mais les responsables bourgeois savent que des réactions prolétariennes à de nouvelles attaques sont inévitables ; à défaut de pouvoir les prévenir , ils ont besoin qu’il y ait à gauche un parti suffisamment fort pour les maîtriser et les canaliser de façon inoffensive. En raison de la déliquescence du PC et de l’immaturité de l’extrême gauche électoraliste, seul le PS peut agir comme garde-fou de l’ordre capitaliste. C’est là l’objectif fondamental du front unique anti-Sarkozy derrière le PS : non obtenir une plus qu’improbable victoire électorale de Royal, mais reconstituer à gauche une force anti-prolétarienne suffisamment solide pour maintenir le calme sur le front social.

L’union en cours autour d’un parti qui ( avec ses compères de la « gauche plurielle »), a servi fidélement le capitalisme et l’impérialisme français depuis l’élection de Mitterrand il y a plus d’u quart de siècle et qui promet de le servir encore mieux ; cette union à laquelle sans honte l’extrême gauche électoraliste, doit donc être combattue par tous ceux qui veulent réellement défendre les intérêts des travailleurs et résister à l’ordre bourgeois.

Il faut refuser le piège grossier de l’union anti-Sarkozy : l’adversaire n’est pas tel ou tel politicien bourgeois, car les politiciens bourgeois, de droite ou de gauche, ne sont que des exécutants des intérêts capitalistes ; l’adversaire, c’est précisément le patronat, la bourgeoisie, le système capitaliste qui utilisent tour à tour la gauche ou la droite pour endormir les prolétaires et les réprimer ; l’adversaire, c’est l’Etat bourgeois et son système politique avec tous ses politiciens vendus , c’est aussi tous ceux qui préconisent les éternelles voies sans issue du « moindre mal », de la politique soi-disant « réaliste » des compromissions avec l’ennemi de classe.

La seule solution, la seule voie réaliste est celle de la rupture avec le social-libéralisme, avec le collaborationnisme, celle de la désertion du crique électoral pour revenir sur le terrain de la lutte ouverte, de la lutte de classe intransigeante contre les intérêts capitalistes.

Non à l’union sacrée derrière le PS ! Non au cirque électoral !
Ni Sarkozy, ni Royal !
Lutte de classe anticapitaliste !

Parti Communiste International, 26/4/2007

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