Début août 2005, les squats de la traverse des 400 couverts et de la rue des bergers (la Kanaille) étaient expulsés en toute hâte, projets urgents obligent, des dizaines et des dizaines de flics armés aidant.

Plus d’un an après, la traverse des 400 couverts est en friche, cernée de palissades déglinguées, les travaux commencent à peine… Une urgence bien lente, en somme.

L’ex-hôtel Lakanal, squatté pendant trois mois en 2005 (la Kanaille), est toujours muré et vide de vie.

Bien sûr, nous n’étions pas dupes, c’est toujours la même histoire… Si la mairie, Actis ou la Métro expulsent, ce n’est pas pour des raisons de projets de logements sociaux ou autres balivernes, non, ces expulsions sont essentiellement politiques: l’ordre doit régner. Aucune initiative collective ne doit sortir du rang autorisé, légal et « rentable ».

Si les expulsions des 400 couverts et de la Kanaille avaient donné lieu à une résistance mémorable et à de nombreuses actions directes de protestation avant et après les expulsions, on regrettera que cet été, en plein centre-ville de Grenoble, le squat Parad Is Yack soit mort sans même que la préfecture n’ait eu à envoyer ses flics… Plusieurs autres squats, moins publics car dédiés essentiellement à loger leurs habitant-e-s, ont été expulsés sans grand fracas. La loi de la sacro-sainte propriété privée suit son cours.

Plus récemment, à Sassenage, un squat nommé le Bokal (qui en à peine trois mois d’existence avait quand même eu le temps d’organiser quelques concerts) a été expulsé par la flicaille en nombre au début du mois de septembre.

Au Percy, dans le Trièves, la Colo squattée est passée en procès car la mairie « communiste » de Fontaine, propriétaire, veut vendre au plus offrant… Dans le genre « communiste-capitaliste », on se souviendra avec émotion de la mairie de Saint-Martin-d’Hères, toujours en place, qui avait expulsé lors de l’été 2003 le squat de la Charade.

Toujours à Fontaine, la Masure Ka est passée en procès et a obtenu les deux mois de delai de base (ce qui leur donne automatiquement droit à la trêve d’hiver, c’est-à-dire que l’expulsion ne pourra légalement pas avoir lieu entre le 1er novembre et le 15 mars). L’expulsion est cette fois demandée par l’Etat.

A Grenoble, rue Ponsard, le squat de la Mèche, dont le propriétaire n’est autre que le bailleur social Actis, est actuellement menacé d’expulsion. Alors que le recours à la force publique a été accepté par la préfecture dès le 23 octobre, Actis affirme que l’expulsion n’aura pas lieu tout de suite, en tout cas pas avant le 6 novembre puisqu’un rendez-vous entre les squatteureuses de la Mèche et Actis est prévu ce jour là. Aura-t’elle lieu en plein hiver ?

Les expulsions de squats organisant des activités publiques font souvent pas mal de bruit et c’est tant mieux, mais à côté de ça, combien d’expulsions locatives en loucedé cet été sur l’agglomération grenobloise ? Et combien cet hiver, au mépris de lois qui semblent n’avoir pour but que de soumettre les pauvres (l’autorité ne subit pas la loi, elle la commet) ? Combien de sans-papiers logé-e-s dans des conditions pires que déplorables sous le prétexte qu’ils n’ont pas la carte d’identité qu’il faut ?

Nous appelons à une solidarité active généralisée, pour que personne ne puisse se faire expulser sans réaction collective, pour qu’aucun lieu ne ferme sans soulèvement immédiat.

Ce jeudi 26 octobre [2006] à Toulouse, le squat d’activités le Clandé (ouvert il y a une dizaine d’années) a été expulsé. Dans la foulée de l’expulsion, des dizaines de personnes se sont rassemblées dans la rue où il se situe. Des échauffourées entre les flics et les personnes venues protester contre l’expulsion ont eu lieu. Le tout s’est transformé en manifestation sauvage lorsque tout le monde a été repoussé par les flics, des barricades et des poubelles en feu ont bloqué la circulation dans le quartier pendant une partie de l’aprèsmidi. Puis, le soir, environ 200 personnes ont repris le Clandé ! Le squat a été re-barricadé et l’occupation continue de plus belle ! Les activités prévues pourraient bien ne pas être annulées…

A Dijon, le squat du Toboggan, ouvert en août dernier, était menacé d’expulsion imminente par la mairie… Quelques actions de soutien ici et là ont permis il y a quelques jours d’obtenir l’assurance qu’il n’y ait pas d’expulsion avant le 15 mars prochain.

Pour finir, nous voudrions aborder des travers dans lesquels certains squats « d’artistes » ou autres lieux « alternatifs » tombent parfois… que cela soit volontaire ou non. Le copinage que certains squats artistiques pratiquent avec la mairie de Paris dans l’espoir de gagner des délais est abject, quand cette même mairie a pour objectif principal l’épuration sociale dans les quartiers populaires (la « boboïsation », la

gentrification

à l’anglaise, afin de « civiliser » les quartiers comme l’indiquaient il y a peu les panneaux de travaux à la Goutte d’or, dans le XVIIIème arrondissement), en réattribuant les logements sociaux aux classes moyennes plutôt qu’aux pauvres, et n’hésitant pas à expulser à tour de bras les squatteur-euse-s dont l’utilité sociale n’est pas « agréée » institutionnellement, les locataires sans le sou, etc. L’ironie de tout ça, c’est que ces squats d’artistes qui se font légaliser et accepter par les pouvoirs locaux le sont bien souvent pour servir de paravent à la mairie, en contrepartie de la politique d’expulsion et de rejet que la mairie adopte pour les autres squatteur-euse-s (les bon-ne-s d’un côté, les mauvais-es de l’autre).

La politique « socialiste » de Paris ressemble pas mal à celle menée à Grenoble, vous ne trouvez pas ?

Autrement dit, avancer de concert avec la mairie, en co-organisant des événements culturels ou en laissant la mairie se vanter de sa politique culturelle grace à ses subventions et autres aides, c’est la laisser se donner le beau rôle alors que sa « politique du logement social », on n’en voit pas la couleur (on voit surtout arriver des panneaux « résidences de standing » et des dossiers de demande de logement social qui s’empilent et prennent la poussière année après année…). Quand on est dans la quasi impossibilité de s’exprimer et d’agir à l’encontre des intérêts de la mairie (sous peine de se faire couper les subventions, par exemple), que fait-on de plus que de la pub gratos à Destot et consorts ? Il y a bien un danger de devenir les bouffons culturels qui permettent de dépolitiser la question du logement et de pacifier la ville alors que le logement à Grenoble n’a jamais été aussi cher, qu’on expulse et qu’on mure tous les squats et que les quartiers populaires sont détruits petit à petit par la mairie de Grenoble.

Un jour, une affreuse terroriste communiste allemande a dit « 

on fait partie du problème ou de la solution, entre les deux, il n’y a rien

« . Plus tard, un rappeur rebelle qui appelle désormais la jeunesse à poser son gun et à mettre son bulletin dans l’urne a dit: « 

on fait pas partie de la solution, mais plutôt du problème

« . Tout dépend de quel côté on se place, de quel point de vue on parle. Ce qui est sûr, c’est que le système s’accommode très bien de personnes ou de mouvements qui ont le cul entre deux ou trois chaises…

Soyons de purulentes plaies pour le système et menons-lui la vie dure !

Grenoble, le 28 octobre 2006

Des squatteur-euse-s et locataires en colère

(toujours)

P.S: A bas le PS !

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Concernant les luttes locales, nous conseillons bien sûr

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