Nicolas,

Tu remues, tu t’agites, on te voit partout : En virée chez les flics, en safari dans les quartiers populaires, à expliquer à la France d’en bas et du milieu tous tes chouettes projets pendant que la France d’en haut ricane, à te donner du mal à essayer de devenir président.
_ Et pourtant, Nicolas, tes efforts frénétiques pour juguler le « forsentimendinsécurité » fait augmenter une autre statistique : Le pourcentage des gens qui éprouvent un autre sentiment, celui d’être pris pour des imbéciles.
_ Oh, bien sûr, pas mal de compatriotes (de drouate ou de gôche) s’accommodent finalement assez bien de tes mesures tristement démagogiques et morositaires. Mais tu flattes là de bien bas instincts, et nous ne t’en félicitons pas …!
_ Tout de même, Nicolas, cela ne vous suffit pas de toujours faire payer les pauvres ? Tu voudrais peut être qu’ils vous en remercient ? Tu sembles en tous cas bien décidé à mater leur révolte. Il est pourtant plus noble de toujours préférer l’ « incivilité », voire l’outrage, à l’injustice. Mais nous voilà en train de porter des jugements de valeur ! Evitons donc tout argument moral, car en ce domaine, chacun voit bien évidemment midi à sa porte.
_ Le problème est que ta logique elle-même semble des plus étranges… Enfin, Nicolas, comment faire en sorte que des gens vivent ensemble s’ils ont tous peur les uns des autres? Par quel mystère les croquants favorisés, assurés, protégés, vidéo filmés, intégrés et bien soignés devraient-ils se sentir plus vulnérables que les adolescents révoltés, les paumés, les fauchés et autres discriminés ? Ne serait-il pas plus courageux de s’attaquer au nerf de la guerre (l’argent impunément blanchi) pour démanteler des réseaux terrrrrrrroristes ou mafieux , plutôt que de traquer la pute qui heurte l’œil du bourgeois, pardon, de la bourgeoise ou le jeune a casquette qui se réchauffe dans un hall? La corruption, la complaisance mafieuse des paradis fiscaux, le secret bancaire, la délinquance en col blanc: Voilà de vrais problèmes, qui pour une fois ne nous viennent pas des « quartiers difficiles ».
_ Il y a déjà un certain nombre d’années, tu avais promis, je cite, de « débarrasser la France de la délinquance». 2 gamins morts, 3000 arrestations, 9000 voitures brûlées, 3 semaines d’émeutes plus tard, pour toi, et tous les journalistes à qui tu fais vendre du papier, ce bilan est bizarrement un succès éclatant.
Vous n’avez, toi et tes amis, que les mots « rétablir l’ordre républicain » à la bouche…Grand bien vous en fasse ! Mais dis-nous, Nicolas, t’es tu déjà demandé à quoi ressemble la devise républicaine « liberté, égalité, fraternité », que l’on soit noir, blanc, marron ou bleu, quand elle est vue d’un appartement insalubre, entre deux CRS ? Tu es à la Fraternité et à la justice ce que M. Bush est à la paix dans le monde, et son « simplisme », que tu as un temps dénoncé, est aussi le tien. Car tu sais bien au fond, Nicolas, qu’à force d’injustices, tu es en train de fabriquer du terrorisme. Mais tu sais aussi que ces terroristes ne viendront pas de Neuilly…
_ Après tout, Nicolas, votre démarche semble cohérente et logique. Depuis quelques années que le vieux monsieur qui nous sert de président est au pouvoir ,vous vous employez avec acharnement à faire taire tous ceux qui protestent. Quand les associations citoyennes sont étranglées, les manifestants méprisés, les syndicalistes criminalisés, les lycéens brutalisés et condamnés, les plus précaires incendiés ou expulsés, quelle contestation reste possible ? Le vieux Monsieur restera dans l’Histoire comme président de la reprise des essais nucléaires, d’une dissolution ratée et des bagnoles qui crament, mais on dirait, Nicolas, que tes idées sont déjà plus vieilles que lui.
_ Mais au fait, combien coûtent ton couvre feu et ton état d’urgence ? Ces millions ne seraient-ils pas mieux utilisés si tu aidais les habitants des quartiers populaires à mieux vivre ensemble ? Mais ta touchante compassion s’arrête là où commence le calcul politique. Il suffit que les braves gens aient peur et le tour est joué.
_ Comme tous ces braves gens le pensent, tu n’es peut-être pas si méchant que ça, Nicolas, mais nous sommes pour notre part convaincus que tu te trompes. Comment crois-tu pouvoir te passer de toute cette jeunesse, de tous ces talents, de toute cette vie qui explose, quand la vieille France transpire la névrose ? Tu le dis toi même, Nicolas : la vie est une jungle et il faut être capable de s’en sortir quand on est discriminé, d’accepter les règles de la compétition, même quand on ne les a pas fixées et qu’on part avec beaucoup de retard… Mais tu n’as pas de chance, Nicolas, les émeutiers sont aussi des gens normaux, qui ne demandent qu’à vivre « comme tout l’monde ». Ils savent d’ailleurs très ce qu’est la loi du plus fort puisque tu passes ton temps à la leur apprendre. Evidemment, ils deviennent dangereusement anormaux à partir du moment où ils se révoltent…
_ Tu veux devenir président depuis que tu es tout petit , et tu n’hésites pas à instrumentaliser la peur pour parvenir à tes fins …C’est étrange, Nicolas, tu nous rappelle quelqu’un…. A la différence que toi, tu n’as pas torturé en Algérie et que tu es même fils d’immigré. Rassure-toi, Nicolas, comme tous les enfants d’étrangers qui ont fui l’arbitraire ou l’injustice, tu es le bienvenu en France, alors, s’il te plaît, arrête de faire du mal à ton pays.
_ Nous te remercions pour l’intérêt que tu auras porté à notre courrier et te prions de ne rien agréer du tout.

Comité de vigilance contre les idées moisies