La créativité surgit rapidement devant la préfecture : nombreux tags, slogans et de la peinture qui s’étale jusque sur les CRS, qui sont repeints en jaune derrière leur grillage. Cours Saint Pierre, gros coup de chaud : la ligne de policiers qui empêche d’accéder à l’arrière de la préfecture recule de plusieurs dizaines de mètres sous une pluie de projectiles et de feux d’artifices. L’asphalte devient multicolore, et l’esplanade est noyée sous les gaz. La situation se corse à Duchesse Anne : la tentative d’atteindre la gare est avortée par les nombreuses salves de lacrymogènes. Bloquer la gare était pourtant l’objectif de la journée. Une partie du cortège est refoulé jusqu’à la Cité de congrès avant d’être repoussé en sens inverse, vers le château, par des charges de gendarmes. Des incendies démarrent dans la pelouse de la métropole « verte », allumées par les palets incandescents de lacrymogène. Retour à Commerce. La BAC colle trop la foule, et se retrouve repoussée, tenue en respect rue des petites écuries.

Elle se venge, par des charges à Bouffay. Gros moment de confusion. Beaucoup de groupes sont éparpillés, mais un deuxième tour se met en marche. Un grand père, visage découvert et vêtu d’une chemise casse tranquillement un panneau de pub en disant « y’en à marre », sous les acclamations.

Peu après, la BAC charge et coupe le cortège pour arrêter un manifestant, puis s’exhibe en haut des marches arc en ciel de Place du Cirque, fière d’être une milice. Charge et contre charge dans ces escaliers, avec un feu d’artifice. Départ vers Commerce, puis Médiathèque, pour remonter dans les rues cossues. Mais la voie est verrouillée par un grand nombre de policiers qui descendent la rue Jean Jacques Rousseau. Les manifestants sont repoussés vers le CHU, sous un déluge de grenades.

Comme souvent, la manifestation est totalement éparpillée, et des groupes se retrouvent au point de ralliement habituel : la croisée des trams. C’est à cet endroit que plusieurs feux d’artifice sont envoyés sur les gendarmes. Les abribus et banques sont cassés, notamment lorsqu’un groupe parvient à atteindre la Place Royale. Plusieurs fois, les forces de police, désorganisées par leur propre nombre, sont encerclées. Un gradé se retrouve même seul au milieu de la foule et doit partir en courant. Peu après, les clients du bar le Chat Noir, attablés en terrasse, sont attaqués par la BAC à coup de grenades de désencerclement. Un adolescent de 13 ans est arrêté à cette occasion.

Le petit commerce est gravement perturbé par les manœuvres policières chaque samedi. Des clients boivent leurs bières avec des masque à gaz. Les terrasses se vident au rythme des charges et des gaz. Même des nantais lambda sont consternés : « on s’est pris la lacrymo en sortant de la tour LU, on a été obligés de rentrer à l’intérieur en urgence avec un groupe de personnes en situation de handicap. » Personne n’est épargné.

La nuit tombe, et la manifestation continue. Une grenade lacrymogène fait démarrer un feu sur un balcon de la rue Kervegan. Les pompiers débarquent avec la grande échelle, mais l’habitant des lieux a déjà éteint les flammes à leur arrivée. Il semble que des actions aient eu lieu plus tard, puisqu’une buvette a été installée jusqu’à 20H sur la Place du Bouffay, mais finalement écourtée par les CRS, et qu’un incendie s’est déclenché à Duchesse Anne, sur un chantier. 14 interpellations et beaucoup trop de blessés – notamment des médics – sont à déplorer.

Ailleurs dans l’ouest, quelques tension ont eu lieu à Pontivy pour la manifestation régionale bretonne, et la permanence En Marche ! Du Mans a été intégralement saccagée.

A Nantes, la répression extrêmement violente et rodée aura empêché aux manifestants d’atteindre les lieux symboliques, mais n’aura pas émoussé la détermination, au contraire. Il y avait ce samedi deux fois plus de monde que la semaine précédente, et au moins autant d’énergie supplémentaire.

Comme l’affirme un tag aperçu dans une rue, leur répression n’arrêtera pas la rébellion.