Nous avons passé ces derniers jours entre les trêves, la prolongation de ces trêves et des bombardements entre une trêve et l’autre. Le 19 août, les israéliens ont bombardé la maison de la famille Aldalou en essayant d’assassiner Mohamed al-Dhaif, le commandant général des Brigades d’al-Qassam, la Branche militaire du mouvement du Hamas. Notre maison a tremblé et le bruit était très fort alors que nous sommes à 2 Km de la maison ciblée ! La peur, de nouveau, a repris sa place aux cœurs de mes deux enfants. Comme si ce qui arrivait aujourd’hui est une quatrième offensive et pas une reprise des bombardements.

J’aurais dû vous écrire durant les trêves qui devaient, normalement, nous rendre plus tranquilles et calmes. Mais contrairement à mes prévisions, cette période était plus difficile et plus triste pour moi : je suis sortie de chez moi, comme tous les Gazaouis, pour rendre visite à mes parents et à des proches qui avaient perdu ou leurs parents ou leurs maisons si ce n’est pas les deux ! Leurs histoires, leurs visages, leur tristesse m’ont fait revivre la guerre mais avec leur tristesse et leur peur.

J’ai retrouvé Line, 4 ans, elle a perdu son papa et leur maison de 7 étages partagés entre ses oncles et son papa, J’ai vu dans ses yeux des impressions ambigües : elle était contente que son papa soit parti au ciel pour lui apporter des jouets et de nouveaux vêtements, mais elle était triste d’avoir perdu sa maison et sa chambre où se trouvent ses jouets et ses vêtements. J’ai pleuré quand elle a dit à mon fils qu’elle attendait son papa qui allait reconstruire la maison dans deux jours. Quel espoir !

Durant la trêve, les bombardements cessent, les F16 disparaissent, mais il reste tous ces milliers de drones dont le bruit nous transperce le crane. Tout a changé à Gaza, pas seulement les quartiers bombardés, les maisons détruites, mais aussi les visages des habitants de Gaza : avant l’offensive, le sourire des Gazaouis ne quittait jamais leurs lèvres, malgré le blocus imposé depuis 2006, malgré l’offensive de 2008/2009 et celle de 2012. Aujourd’hui, plus personne n’a la force de sourire.

Durant la trêve, j’ai pris la décision de ne plus suivre les informations pour ne pas être victime des nouvelles laissaient croire que les négociations au Caire allaient réaliser le rêve des palestiniens. Depuis la reprise des bombardements, je ne ferme jamais les sites d’information, quand on a le courant. Je n’éteins pas la radio rechargeable quand on n’a pas d’électricité ! Je vis dans cet état d’angoisse et d’inquiétude, mes enfants ont peur à chaque fois qu’il y a des bombardements, mon fils ainé dort moins et j’attends que mon mari rentre de son travail avec impatience.

Il est vrai que la trêve a permis aux les gens de sortir pour compter les nouveaux martyrs et les blessés. A mes yeux, la trêve ressemble à pub qui coupe parfois les films d’horreur et permet d’en retarder un peu plus le dénouement.

Chers amis,

Dans mes témoignages, j’ai évité de vous demander d’aider concrètement les familles touchées par les attaques israéliennes. J’ai juste accepté d’aider des amis qui voulaient faire quelque chose pour ces familles. Quand j’ai discuté avec les familles, elles m’ont dit qu’elles n’avaient pas besoin de nourriture, mais de sûreté et de tranquillité, d’une maison ou d’un appartement où elles pourraient sentir qu’elles sont encore en vie. Il faut savoir que ces familles qui avaient leurs propres maisons ou appartements sont obligées aujourd’hui de payer un loyer pour occuper un logement temporaire ce qui est très difficile pour elles.

Personnellement, je vous assure que nous avons surtout besoin de psychologues qui pourraient nous aider à sortir de notre souffrance.

Il me semble que mon texte est désordonné, il est comme nous, perdu entre la trêve et les bombardements !!

Priez pour qu’une paix durable couvre le ciel de notre patrie, nous n’avons plus rien, nous sommes privés de tout, tout ce que nous voulons c’est retrouver une paix perdue depuis tellement de temps.