Nous, soussignés, sommes solidaires avec les millions de Syriens et Syriennes qui luttent pour la dignité et la liberté depuis mars 2011. Nous appelons les peuples du monde à faire pression sur le régime syrien pour mettre fin à son oppression et à sa guerre contre le peuple syrien. Nous exigeons que Bachar el-Assad abandonne le pouvoir, immédiatement et sans excuse, afin que la Syrie puisse initier un prompt redressement dans la perspective d’un avenir démocratique.
Depuis mars 2011, le régime d’Assad a régulièrement augmenté sa violence contre le peuple syrien, en lançant des missiles Scud, en utilisant des armes interdites par la Convention de Genève telles que les bombes à sous-munitions et des incendiaires, et en utilisant les bombardements aériens. Le régime a arrêté et torturé des dizaines de milliers de personnes et commis des massacres indicibles. Il a rejeté les règlements politiques du conflit qui ne comprenaient pas le maintien d’Assad au pouvoir, et il a polarisé la société par des actes stratégiques de violence et en semant des graines de division. Le régime a aussi, depuis les premiers jours de l’insurrection, cherché à internationaliser la crise afin de la placer dans des batailles géopolitiques qui ne feraient que le renforcer. Fidèle à la logique d’un régime autoritaire, Assad ne pourra jamais accepter les demandes légitimes du peuple syrien pour la liberté et la dignité. Dès lors, il n’y a pas d’espoir pour une Syrie libre, unifiée et indépendante tant que son régime se maintient au pouvoir.
Il s’agit d’une révolte qui a été déclenchée par les enfants de Deraa [la bourgade où la révolte a commencé], les sit-in et les manifestations de la jeunesse dans les villes, par les paysans des zones rurales, et les déshérités et marginalisés de la Syrie. Ce sont eux qui se sont mobilisés de manière non violente par des protestations et des chants, avant qu’intervienne la répression brutale du régime. Depuis lors, le régime a poussé à la militarisation du mouvement non-violent en Syrie. En conséquence, les jeunes hommes ont pris les armes, tout d’abord pour l’autodéfense. Mais, par la suite, ce processus a donné lieu à des tentatives de la part de quelques groupes qui luttent contre le régime de créer un climat de bipolarisation  et de négation de l’Autre en termes politiques, sociaux et culturels. Ces actes sont en tant que tels des actions contre la révolution pour la liberté et la dignité.
Néanmoins, la révolution pour la liberté et la dignité continue fermement. C’est la raison pour laquelle nous, soussignés,  lançons un appel à la société civile mondiale et non aux gouvernements inefficaces et manipulateurs pour qu’elle défende les conquêtes des révolutionnaires syriens et pour défendre notre point de vue: la libération du joug de l’autoritarisme et l’appui à la révolution syrienne comme parties intégrales des luttes pour la liberté et la dignité dans la région et dans le monde.
La lutte en Syrie est une extension de la lutte pour la liberté aussi bien au niveau régional qu’à l’échelle mondiale. Elle ne peut être séparée des luttes de la population de Bahreïn, d’Egypte, de Tunisie, de Libye, du Yémen et d’autres peuples qui se sont rebellés contre l’oppression et l’autoritarisme; au même titre que des luttes contre ceux qui cherchent à usurper ou à détruire les soulèvements et à les dévier de leur propre programme. Ce combat se lie à celui des Palestiniens pour la liberté, la dignité et l’égalité. La révolution en Syrie est une partie fondamentale des révolutions du nord de l’Afrique; mais elle est aussi une extension de la révolte zapatiste au Mexique, du Mouvement des sans-terre au Brésil, des mobilisations en Europe et en Amérique du Nord contre l’exploitation néolibérale. Elle fait aussi écho aux mouvements pour la liberté en Iran, en Russie et en Chine.
La révolution syrienne s’affronte à un monde sens dessus dessous où les Etats qui étaient prétendument amis des peuples arabes, comme la Russie, la Chine et l’Iran, ont maintenu leur appui au régime syrien malgré les massacres perpétrés contre la population, cela alors que des Etats qui jamais n’ont réellement appuyé la démocratie et l’indépendance, spécialement les Etats-Unis et leurs alliés du Golfe, sont intervenus pour appuyer les révolutionnaires. Ils l’ont fait de manière claire et cynique dans leur propre intérêt. De fait, leur intervention a visé à faire plier et à subvertir le soulèvement tout en diffusant des illusions et des mensonges trompeurs.
Prenant en considération que les puissances régionales et mondiales ont laissé seul le peuple syrien, nous vous demandons d’assurer de votre appui les Syriens et Syriennes qui continuent à lutter pour la justice, la dignité et la liberté et qui ont résisté aux résonances assourdissantes de la bataille, au même titre où ils rejettent les illusions  propagées par les ennemis de la liberté.

Comme intellectuels, académiciens, militants, artistes, citoyens engagés et en tant que mouvements sociaux nous nous solidarisons avec le peuple syrien afin de souligner la dimension révolutionnaire de sa lutte et pour éviter les batailles géopolitiques et les guerres de pouvoir qui se développent dans son pays. Nous vous demandons de donner votre appui à tous les Syriens qui réclament une transition pacifique vers un pouvoir, une transition où tous les Syriens et Syriennes puissent avoir la parole et décider de leur propre destin. De même, nous rejetons toute tentative d’un quelconque groupe de monopoliser le pouvoir et d’imposer son propre programme, ou encore de dicter des identités uniformisées ou homogènes au peuple de la Syrie.  Nous vous demandons d’appuyer les personnes et les organisations de base qui défendent toujours les idéaux d’une société syrienne libre et démocratique. (Traduction A l’Encontre)
 
Frederic Jameson (Duke University, United States)
Tariq Ali (British Pakistani writer, journalist, and filmmaker, United Kingdom/ Pakistan)
Ilan Pappe (University of Exeter, United Kingdom)
Etienne Balibar (Columbia University, United States/ France)
 Nigel Gibson (Emerson college, United States/ Britain)
 Norman Finkelstein (American researcher and writer, United Sates)
 John Holloway (Benemérita Universidad Autónoma de Puebla, United States/ Mexico)
Vijay Prashad (Trinity College, United States/ India)
Salameh Kaileh (Intellectual, Syria/Palestine)
Bill Ayers (University of Illinois at Chicago, United States)
Bernardine Dohrn (Northwestern University, United States)
Rashid Khalidi (Columbia University, United States/Palestine)
Lieven de Cuater (Philosopher, Belgium)
Jihane Sfeir (l’Université Libre de Bruxelles, Lebanon/ Belgium)
Jean-Pierre Filiu (Institut d’études politiques de Paris, France)
Farouk Mardam Bey (Intellectual, Syria)
Faraj Bayrakdar (Poet, Syria)
Ziad Majed (American University of Paris, Lebanon/ France)
Kamal Bandara (Intellectual, Tunisia)
Francois Burgat (CNRS, France)
Adam Shapiro (Activist, United States)
Razan Ghazzawi (Activist, Syria)
Yassin el-Haj Saleh (Intellectual, Syria)
Thierry Boissière (Institut français du Proche-Orient, France)
Olivier Le Cour Grandmaison (universitaire, France)
Jens Hanssen (University of Tornoto, Canada/ Germany)
Ghassan Hage  (The University of Melbourne, Australia/ Lebanon)
Hani al-Sayed (American University of Cairo, Syria/ Egypt)
Hazem al-Azmeh (Intellectual, Syria)
Sadri Khiari (Intellectual, Tunisia)
Oussama Mohamad (Film maker, Syria/ France)
Jihad Yazigi (Journalist, Syria)
Saad Hajo (Cartoonist, Syria)
Wendy Brown (UC Berkeley, United States)
R. Radhakrishnan (UC Irvine, United States/ India)
Ann Ferguson (Philosopher, United States)
Samir Aita (Le Monde Diplomatique editions arabes, Cercle des Economistes Arabes)
Santiago de Rico Alba (Philosopher, Spain)
Gilbert Achcar (SOAS, London University)
Asef Bayat (University of Illinois, USA)
Chela Sandoval (University of California, Santa Barbara)