Ci-joint le texte lu pendant la prise de parole et une photo prise lors de cette même prise de parole. Une vidéo sera bientôt dispo sur le blog du collectif http://untoitpourtoutesettous.overblog.com

Ouest France et Nantes ma ville relatent l’action ici : http://www.nantes.maville.com/actu/actudet_-3-Continent…u.Htm

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Nantes, ville où il fait si bon vivre ! Ville ouverte sur l’extérieur, ville au rayonnement international, ville soucieuse de l’environnement (capitale verte européenne en 2013), mais surtout, ville culturelle par excellence. Toute ville-entreprise ayant besoin de sa propre communication-propagande, cet été, chacun a été amené à découvrir Nantes en suivant la fameuse ligne rose du parti. Une orchestration incroyable était ainsi visible pour mettre en lumière une vision uniforme de la culture de notre ville. Qui n’avait pas rêvé de jouer un jour le rôle de Truman Burbank, de devenir acteur malgré lui du Trunantes Show ? Vous en avez rêvé, nos collectivités locales l’ont fait.
Pourtant, beaucoup de personnes venant d’ici ou d’ailleurs, jeunes ou moins jeunes, hommes ou femmes, françaises ou non, mais souvent en situation de précarité, n’arpentent pas les rues de Nantes pour admirer cette belle vitrine culturelle socialiste mais pour espérer vivre ici dans des conditions dignes d’existence. Quel voyage à Nantes est réservé à toutes ces personnes qui ne vivent pas sous les feux de la rampe ? Si l’on s’écarte de la ligne rose en faisant enfin un « pas de côté », on découvre l’envers du décor, la triste réalité bien gardée derrière les caméras. La misère, si belle et touchante au cinéma, est belle et bien présente et ignorée dans nos propres rues.
Nantes, ville où il fait si bon vivre, sur les trottoirs !

Face à la volonté des pouvoirs publics de laisser impunément vivre des centaines de personnes à la rue, des individus, membres ou non d’organisations, avec ou sans logement, ont décidé d’agir collectivement pour mettre en lumière le cynisme de la situation actuelle, et exiger des pouvoirs publics la mise à l’abri inconditionnelle de chaque personne vivant à la rue contre son gré, ou autrement dit, le respect de la loi et de la dignité humaine.

Depuis 2 mois maintenant, le collectif ‘un toit pour toutes et tous’ mène une lutte intense. Face au silence des pouvoirs publics, celui-ci n’a cessé par diverses moyens d’exiger l’application de ses revendications : occupation du Lieu Unique pendant plus de deux semaines, tentative d’occupation du foyer d’hébergement Gustave Roch et de la Manufacture aussitôt réprimée ; manifestations dans les rues de Nantes rassemblant plusieurs fois des centaines de personnes (la prochaine aura lieu samedi à 15h place Bretagne) ; mais aussi actions diverses pour mettre la pression publiquement sur les collectivités locales  : à chaque fois, la seule réponse des pouvoirs locaux n’a été que de réprimer notre mouvement par la force.

Nous condamnons l’emploi automatique des forces de l’ordre, qui plus est de manière démesurée, et l’intimidation que nous subissons depuis le début de notre mouvement.
OUI, l’argent public dépensé pour réprimer notre collectif mais aussi pour déloger les opposants à l’aéroport de Notre-Dame des Landes aurait sans doute pu régler à lui seul le problème du logement dans le département pour un bon bout de temps. Notre lutte s’inscrit dans un contexte global de mépris des mouvements sociaux et de répression à outrance par un pouvoir qui semble n’avoir de socialiste que le nom.
NON, nous ne faisons pas d’amalgame entre notre mouvement et ce qui se passe du côté de Notre Dame des Landes. Ici et là-bas on remet des gens à la rue ; ici et là-bas, on méprise les plus pauvres au profit des quelques privilégiés qui profitent de ce système en crise ; ici et là-bas, des individus ont décidé de reprendre leur vie en main pour ne plus être assujettis par quelques grands décideurs ne protégeant que les intérêts de leur classe.

Nous condamnons aussi la manipulation de la population réalisée en chœur par la mairie et la préfecture par le biais de coups d’annonces médiatiques , à savoir:
NON la situation actuelle ne découle pas de l’arrivée d’un flux important de personnes immigrées dans notre ville. L’amalgame fait entre manque de places d’hébergement et immigration n’a pour but que de déplacer l’objet du débat. Notre lutte s’attaque bel et bien à un problème d’ordre national. Rennes, Angers, Brest, Lorient, Rouen, Dijon, Lille, Marseille… la mobilisation à ce sujet ne cesse de s’amplifier partout en France. Demain matin, 250 personnes seront expulsés du squat de Pacé à côté de Rennes.
NON, les pouvoirs publics n’ont pas répondu à nos revendications sur l’accueil inconditionnel des personnes sans abris. Ils n’ont fait que manipuler l’opinion publique pour faire taire notre mouvement.
NON le 115 ne dispose toujours pas de moyens supplémentaires pour loger les sans abris, dont beaucoup sont désillusionnés face à l’idée de se retrouver un jour à l’abri dans un endroit digne et stable.
OUI, le foyer Gustave Roch est de nouveau vide, et les familles qui y avaient été logé il y a un mois sont depuis ballotées de nuitées d’hôtel en nuitées d’hôtel aux quatre coins de la ville, sans prise en compte des lieux de scolarisation et de travail.
NON l’annonce la semaine passée du plan hivernal par le préfet ne va pas remédier à la situation actuelle. Comme chaque année, le plan « grand froid » ne servira qu’à éviter les mauvais effets électoraux causés par un nombre trop important de morts sur nos trottoirs. Comme chaque année, les personnes sans abri seront ensuite remises à la rue. Comme chaque année, les pouvoirs publics répètent, sous le feu des caméras, ce funeste et cynique spectacle. Le droit au logement pour tous doit être appliqué quelle que soit la température et quel que soit le sexe, l’âge, le statut ou la nationalité de la personne sans abri. Le temps où ce droit fondamental ne servait qu’à embellir des discours politiques à visée électoraliste doit être révolu.

Comme nous venons de l’illustrer, la vie politique relève d’une véritable mise en scène cinématographique, laissant place à des interprétations dignes des plus grands rôles. Ainsi, organisateurs de ce festival, réalisateurs et publics ici présent, vous conviendrez que du fait de l’actualité, nous avons du réadapter la remise des prix de ce soir. Nous allons donc procéder à la remise exceptionelle de ces prix. N’ayant pu départager les trois nominés, la montgolfière d’or du festival des « 3 cons qui mentent » est ainsi remise conjointement à:

Mr le préfet Christian Gaillard de Laverné pour « Laverné si je mens  »
Mr le maire Patrick Rimbert pour « Cachez moi ces pauvres que je ne saurai voir »
Mr le premier ministre pour « Y a t-il un Ayrault dans l’avion ? »

Nous aurions du nous douter plus tôt que cinéma et politique ne faisaient pas bon ménage. Nous devons ainsi nous rendre à l’évidence : la crise civilisationnelle que nous traversons n’est donc pas du au hasard mais résulte bel et bien d’une ingénieuse réalisation digne du Truman Show, produite par une classe dirigeante embourgeoisée ignorante de la réalité sociale. Ainsi, à l’image de Truman Burbank qui a su trouver l’escalier de sortie du monde qui lui était imposé, nous vous proposons de vous échapper symboliquement de l’orchestration cynique de notre société  en empruntant ces grands escaliers vers la sortie!