En tout cas, quand je suis arrivé, il y avait déjà pas mal de monde en soutien dans la rue, le croisement des rue des Bois et rue de l’Orme était toutefois bien occupé par les flics et les pompiers, deux cordons d’anti-émeutes « protégeant » l’opération d’expulsion.

Les flics ont semble-t-il mis des heures à franchir les portes du rez-de-chaussée, les pompiers ont d’ailleurs été plus efficaces, en entrant par une fenêtre du deuxième étage, à l’aide d’une grande échelle.

Mais ce qui a le plus retardé l’expulsion, c’est qu’un squatteur s’était réfugié sur le toit (l’immeuble faisait trois étages donc la potentielle chute carrément mortelle). Pendant longtemps (des heures), j’ai cru que les flics et leurs collabos de pompiers allaient lâcher l’affaire pour ce soir-là, mais ils ont été aidés par le fait que le reste du squat était déjà vide et que personne n’a pu empêcher la pose de l’échelle. Des pompiers sont entrés par là, ont vraisemblablement ouvert aux flics au rez-de-chaussée (l’entrée était salement « protégée » par les flics donc on ne voyait pas bien). Toujours est-il que le copain sur le toit n’a pas réussi à empêcher les pompiers-flics de l’attraper sur le toit et de le faire descendre. Il est a priori le seul à avoir été interpellé, en tout cas à ce moment-là.

Parce que tout cela ne s’est pas passé sans encombres pour les flics ! Les dizaines de personnes rassemblées en solidarité se sont largement fait entendre, gueulant des slogans à longueur de temps: de nombreux slogans hostiles à la police et aux pompiers (notamment « Police/Pompiers, dégage », « Flics, porcs, assassins »), « Pouvoir assassin » et bien sûr des slogans relatifs aux questions de logement (de mémoire, « Non aux expulsions », « Les loyers sont trop chers, occupation ! Les maisons sont vides, occupation ! »). Un certain rapport de force physique s’est mis en place, tout le monde refusant de reculer quand les flics l’ordonnaient, les insultes ont fusé à plusieurs reprises en direction des flics et des pompiers. Et parmi les dizaines de personnes réunies pour faire face aux flics et aux pompiers, il n’y avait pas que des « militant-e-s autonomes », mais aussi des mal-logé-e-s de diverses origines, directement concernées elles-aussi par les expulsions de squats. Et il y avait aussi pas mal de gens du quartier, notamment des jeunes, tout aussi hostiles à la police.

D’ailleurs, quand à plusieurs reprises ça a chauffé, quand les flics ont gazé dans le tas, frappé et tenté ici et là d’arrêter des gens (en vain, personne ne s’est fait arrêter, même un mec qui s’est fait attraper à un moment a finalement réussi à s’enfuir), lors des échauffourrées et après, des projectiles ont volé vers les flics et les pompiers, et la plupart des projectiles en verre venaient des fenêtres des habitant-e-s du quartier ! Le premier jet de projectile en verre est même tombé au milieu d’un groupe de pompiers, les faisant fuir pendant un bon moment !
Sans rien fantasmer, je signale quand même que cette solidarité était grandement spontanée vu que le squat n’était ouvert que depuis 24 heures, et ça faisait plaisir de sentir cette dynamique collective mêlant différentes « catégories » de gens contre l’autorité des flics.

On est donc resté des heures en bas du squat, avant que le copain sur le toit ne se fasse descendre, achevant ainsi l’opération d’expulsion. Là, malgré un sentiment de déception, on a réussi à retrouver un élan collectif pour partir en manif sauvage à plusieurs dizaines de personnes, en direction de la place des Fêtes. Et la colère s’est vite fait sentir !

Les slogans hurlés dans les rues (y compris par les jeunes du quartier qui faisaient partie du cortège eux aussi) faisaient bonne impression, on n’avait pas de banderole ni rien mais quelques tracts étaient diffés et surtout, les slogans favorables aux occupations, contre les expulsions, se faisaient entendre tout du long de la manif.

Toutes les poubelles et autres éléments de mobilier urbain disponibles étaient mis en travers de la route dans un joyeux chaos. « A chaque expulsion, on foutra le boxon ».

Arrivé-e-s sur la place des Fêtes, on pensait que les flics ne tarderaient pas à nous mettre la pression, et malheureusement on s’est arrêté là pendant un long moment, à discuter, se demander quoi faire, etc.

Il a fallu de longues, très longues minutes, avant qu’un groupe plus restreint, peut-être d’une trentaine de personnes au départ, ne se décide à repartir en manif sauvage en direction du commissariat du 19e arrondissement, où se trouvait peut-être le copain arrêté sur le toit (on n’avait pas d’info précise là-dessus).

La petite manif a donc emprunté la rue de Crimée assez longtemps, renversant un paquet de trucs sur son passage (toute sorte de mobilier urbain, beaucoup de poubelles, des barrières de chantier, un siège de bureau, des planches de bois, etc.) au son des slogans de la soirée, plus quelques nouveaux, dont le très bon « Grève, grève des loyers ! Et crève, crève les flics et les huissiers ! ». Des pompiers ont été croisés de retour de leur sale boulot et on peut dire qu’ils avaient bien mérité les injures qui leur étaient adressées.

Arrivé-e-s sur la place Francis Poulenc, au pied du commissariat situé rue Erik Satie, les slogans hostiles aux flics ont repris de plus belle, un maximum de bruit a été fait, notamment en tapant contre des tôles de métal, en solidarité avec le copain arrêté sur le toit et possiblement enfermé dans ce même commissariat. Mais des flics anti-émeute nous attendaient au pied de leur poulailler, et on apercevait des gyrophares depuis différentes rues, ça commençait à sentir le roussi…

La mini manif a donc repris en vitesse, par l’allée Darius Milhaud puis par la rue d’Hautpoul, où tout a été renversé également (enfin, « tout », pas les voitures, mais le reste, mobilier urbain, poubelles, etc.) pour retarder l’arrivée des flics et de leurs véhicules à gyrophare qui arrivaient derrière nous dans la rue d’Hautpoul. Et comme d’autres véhicules de flics nous attendaient rue Jean Jaurès, c’est là que nous nous sommes dispersé-e-s, je crois sans encombres, sans arrestation.

A suivre, en tout cas.
Et que chaque expulsion soit suivie par une explosion de rage, ça ne peut être que bénéfique !

Une assemblée est déjà prévue ce mardi à 19h au 260 rue des Pyrénées, Paris 20e, pour discuter des suites à donner à la lutte.