J’espère que ta conscience s’en tire bien, car avec une oeuvre « éminement politique » comme ta « chambre occupée, il n’y a guère que ça qu’on peut encore sauver.

Je ne pleurerai pas sur la poignéee d’étudiants privilégiés qu’on avait logés à  la résidence Santeuil et qu’on prie de partir à la faveur d’un hotel de luxe. Ceux-là  trouveront bien un autre appart au abords de l’éléphant , dans le nouveau centre fashion.

C’est bien mignon, Agnès, de « donner la parole aux déshérités », mais si le sort du petit peuple de Nantes te préoccupe tant, commence déjà par ne pas faire chier, et arrête de ramener des touristes chez nous. La parole ne se donne pas, elle se prend. Mais surtout elle ne saurait suffire à quoi que ce soit face aux agressions du pouvoir et du fric.

C’est si difficile d’entrevoir le rôle du « Voyage à Nantes » dans la transfiguration bourgeoiso-artistouille de notre ville ?
C’est si dur de comprendre qui en profite et qui se fait niquer ? Y’aurait-il un gros chèque qui te cache la vue ?

Vois-tu la ville s’étendre, s’ériger en « métropole d’avenir », developper les nouvelles technologies du contrôle, tout en multipliant les manifestations artistiques pour attirer les « classes créatives » et autres cadres dynamiques ?
La ville dore son image, et ça n’est pas sans violence. Cet été, certains parcourent gentiment la ligne rose, prompts à s’esbaudir. Pendant ce temps, les squats sont expulsés sans vergogne, et souvent sans délai. Pendant ce temps, on trouve de la javel dans les poubelles où on récupère notre bouffe. Pendant ce temps la communauté urbaine se prépare à envoyer au tribunal ceux qui glanent dans les déchetteries. Pendant ce temps, l’opération policière chlorophylle déporte en forêt les zonardes et zonards du centre-ville, en leur piquant leurs godasses pour éviter qu’ils reviennent trop vite faire tâche sur les trottoirs-vitrines.Pendant ce temps Nantes Habitat , bailleur social de la ville,mure des maisons en parfait état. Pendant ce temps, régulièrement des Rroms se font virer de partout, et tout le monde s’en fout puisqu’on est dans une ville de gauche. Pendant ce temps les curetons du social nous parlent comme à des chiures tandis qu’au restos on se soumet à un interrogatoire pour obtenir un kilo de nouilles et trois endives pourries.

La ville de Nantes, expulseuse notoire (via la Mairie, Nantes Habitat, la Samoa, Nantes métropole) te remercie pour la touche éthique que tu offres au séjour des touristes et aux yeux des bobos ébahis.

S’il y en a qui ont besoin de ta renommée pour se faire remarquer, c’est pas nous. On ne croit pas aux soubresauts d’indignation chronométrés des citoyens. Regarde plutôt du côté de ceux qui te paient, ceux qui brassent du vide pour faire resplendir leur cité cadavérique.

Le discours politique n’est pas à vendre, Agnès. La colère se hurle et explose, occupe la rue et fracture des portes, mais l’empaqueter de prétentions artistiques pour la vendre à Jean Blaise, c’est signer son impuissance et la livrer au service des bourreaux.
Alors quand on labellise son oeuvre au blason de Nantes Métropole, on ne peut plus, depuis longtemps, prétendre agir du côté des opprimées.

Avec ta caricature de squat aux murs explosés, tu n’as rien saisi de la vie des expulsés de tous horizons et c’est tant mieux.La galère n’a rien d’exotique, quel que soit le prétexte du voyage.

Merci Agnès, grace à toi le Voyage à Nantes s’offre un visage humain tandis qu’ici rien n’a changé.

Ceci dit tout commence, et ton squat c’est très bientôt qu’on va venir à trente pour l’occuper. On partira pas, et je frémis de savoir comment tu vas réagir.

Une expulsée
(ton fonds de commerce)

PS: Sur ton cachet , tu pourrais me filer trente balles pour un nouveau pied-de-biche? Les flics m’ont chipé le dernier.

JEAN BLAISE ET TA CLIQUE ON VOUS EMMERDE ET SOUS PEU VOTRE MUR TOMBERA PIERRE PAR PIERRE.