Christian est sorti de prison au bout d’un mois en raison de ses lourds problèmes de santé ; pour le moment, il est soumis à un contrôle judiciaire strict : il doit pointer deux fois par semaine au commissariat.
Sonja, elle, reste en prison. Elle est l’une des personnes les plus âgées qui soit enfermée dans une prison européenne.

Soupçonnés d’avoir appartenu au RZ* (cellules révolutionnaires), Sonja et Christian sont accusés de deux attaques contre le nucléaire : la première contre la compagnie allemande MAN qui collaborait à la construction de la bombe atomique pour le régime raciste d’apartheid sud-africain ; la seconde contre la compagnie KSB, qui, à cette époque, était le plus gros fabricant de pompes utilisées dans les centrales nucléaires.

Trente ans après, le gouvernement allemand fait un procès à Sonja et Christian pour ces actions. En revanche le fait que rien n’ait été entrepris contre les industriels qui ont soutenu le régime d’apartheid, rien non plus contre les entreprises qui ont exporté le matériel nucléaire permettant le développement de l’industrie nucléaire, montre bien que l’acharnement à poursuivre des gens comme Sonja et Christian n’est en rien « neutre », et objectif.
Sonja et Christian sont également accusés d’avoir participé à une attaque incendiaire contre le château d’Heidelberg. Cette action dénonçait la rénovation et la restructuration urbaines qui mettaient en oeuvre la destruction de quartiers entiers de la ville, chassant ainsi les plus pauvres de leurs logements pour satisfaire au tourisme et au profit.

Concernant ces accusations, l’implication de Christian et Sonja s’est basée sur les « témoignages » extorqués à Hermann F. au cours de l’été 1978, à Munich. Hermann F. avait transporté une bombe destinée au consulat de la dictature argentine. Cette bombe a explosé sur ses genoux. Hermann F. a survécu, mais il a perdu les yeux, les jambes et a été brûlé au 3e degré sur tout le corps.
Après avoir été emmené à l’hôpital, il a très vite été placé en isolement total dans un bâtiment de police. Des témoignages lui ont alors été extorqués dans des conditions et par des traitements ayant des effets de la même nature que la torture.
Hermann F. est resté 18 semaines dans cette situation d’impuissance absolue et de perception limitée sous l’emprise de puissants sédatifs, privé d’avocat, avec pour seuls contacts les gardes des renseignements généraux, les procureurs et le juge. Ses déclarations ont ainsi été construites par la police et Herman F. les a désavouées dès sa sortie de l’isolement.

A l’automne 78, alors que l’Etat allemand mène une chasse contre les activistes des mouvements radicaux, Sonja et Christian décident de partir. C’est plus tard seulement qu’ils auront connaissance des accusations portées contre eux.

En 2000, longtemps après avoir pris des distances avec son groupe, Hans Joachim Klein arrêté pour avoir participé à l’action d’un commando germano-palestinien contre la conférence de l’OPEP de 1975 à Vienne, Hans Joachim Klein accuse Sonja d’avoir participé à la logistique de cette action. Il est rapidement relâché et gracié.

Bien que des allégations du même type de celles contre Sonja aient été déclarées « non crédibles » par la cour de justice allemande de Francfort, elles serviront tout de même de prétexte pour délivrer un mandat d’arrêt. C’est ainsi que Sonja et Christian seront arrêtés à Paris en 2000. A cette époque, une cour française a statué et s’est prononcée contre leur extradition en Allemagne et le couple a pu rester en France.

En 2007, la justice allemande avait renouvelé la demande bien que ce mandat d’arrêt ne contienne aucune nouvelle preuve. Néanmoins, cette extradition a été rendue possible sur la base du mandat d’arrêt européen et, en 2010 , la justice française et le gouvernement de Sarkozy ont répondu positivement à cette requête.
Après 33 ans passés en France, c’est seulement grâce au fait que le droit européen est construit au détriment des immigrés et de ceux qui cherchent l’asile que Sonja et Christian sont en prison.

Quand, il y a 10 ans, le parquet allemand leur a proposé une suspension de peine contre un retour volontaire en Allemagne et une confession, Sonja et Christian ont refusé ce marchandage. Leur extradition et leur procès a été et sera mené d’une manière d’autant plus acharnée qu’ils ont refusé toute collaboration mais aussi toute forme de chantage et de témoignages comme il est demandé aux militants allemands depuis deux ou trois ans par la justice d’Etat. Le parcours de vie de chacun d’eux montre comment il est possible de ne pas trahir ses idéaux, de rester fidèle à ses idées.

Comme dans tous les procès contre celles et ceux qui luttent contre l’Etat et le capitalisme, la résistance de Sonja et Christian a été transformée en un acte criminel.
Pourtant le crime n’est il pas d’avoir armé le régime raciste d’apartheid, de nous avoir imposé le nucléaire, de détruire des quartiers populaires et d’exclure les pauvres des zones agréables à vivre ?

La détermination de Sonja et Christian est restée intacte et les raisons pour lesquelles ils ont lutté sont, hélas, toujours d’actualité.
Contre le nucléaire, la chasse aux pauvres, le racisme et la prison, ne nous résignons pas. Solidarité et liberté pour Sonja et Christian !

*Les Cellules révolutionnaires (RZ) ont, à partir de 1973,participé aux mouvements révolutionnaires voulant renverser l’Etat. Ils ne prétendaient pas être une avant-garde mais agissaient à l’intérieur même du mouvement de gauche non clandestin et ils menaient comme tant d’autres à leurs côtés une offensive contre le capitalisme. Vers la moitié des années 70 naîtra de leur mouvance l’organisation féministe Rote Zora. Les RZ comme la Rote Zora cesseront leurs actions au début des années 90.

Pour en savoir plus :
stop-extraditions.org – www.secoursrouge.org – www.linter.over-blog.com – www.rote-hilfe.de – www.verdammtlangquer.org