« La Loi du Marché »

De « l’autorégulation des marchés » au capitalisme d’Etat, la mondialisation « financiarisée » nous aura tout « offert ».

En 3 ans les salaires, parachutes dorés et bonus des dirigeants et autres traders responsables de l’actuelle faillite des marchés financiers, s’élevaient à une bonne centaine de milliards de dollars. Pendant la même période, les pertes provoquées par ces « surdoués de la finance » dépassaient les 500 milliards. Les dégâts sont aujourd’hui bien plus importants et le bilan définitif est bien loin d’être chiffré, si tant est qu’il le soit un jour. Les plus « méritants » et les plus « doués » parmi eux ont rejoint le club sélect des milliardaires ultra-riches après avoir placé l’essentiel de leurs fortunes à l’abri dans des paradis fiscaux. La portion congrue de l’impôt qui leur était demandée, ils ont pu la placer dans des fondations charitables ou culturelles, plus désintéressées les unes que les autres, mais toujours à leurs noms tout de même, leur permettant ainsi de se poser en grands bienfaiteurs de l’humanité. On s’inquiète beaucoup ces temps-ci, pour les moins « clairvoyants », condamnés à s’entre-dévorer en spéculant à crédit alors même qu’ils sont de moins en moins crédibles. Tels des joueurs dépendants criblés de dettes sur le point d’être interdits de casino ils ont la prétention de se refaire à n’importe quel prix en multipliant les mises hasardeuses toujours plus risquées, alors même que rien ne va plus dans le monde-casino de la finance. Tout leur semble encore permis pour y arriver : que leurs spéculations frénétiques sur les matières premières et les denrées de base condamnent à la misère des millions d’êtres humains et provoquent des émeutes de la faim à travers le monde leur est parfaitement indifférent. Pris dans leur élan ils en sont rendus à miser sur la pénurie organisée à venir, en achetant des terres agricoles en grande échelle au Brésil, au Kazakhstan, en Ukraine, au Pakistan, en Ouganda, en Ethiopie, au Soudan,… pariant sur de juteux profits en perspective associés à Monsanto et consorts ?

Pendant que nous assistons à une nationalisation massive des pertes aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, des dirigeants de banques aux pertes colossales sont remerciés pour leurs exploits et partent avec des parachutes dorés de millions de dollars (cf. ex-patron de HBOS,…).
La crise des « subprimes » aura déjà coûté 3 000 milliards de dollars (autant que le coût de la guerre en Irak, évalué par Joseph Stieglitz).

La prolifération des « produits dérivés sophistiqués », rebaptisés « actifs toxiques pourris », qui contaminent la planète-finance représenterait aujourd’hui, selon « l’optimisme » des analyses, de 15 000 à 60 000 milliards des mêmes « dollars-papier ». Cela peut paraître énorme mais ne représente en définitive dans le pire des cas, qu’un effet de levier de facteur 20 par rapport aux pertes déjà comptabilisées. Les banques d’affaires déjà en faillite, pratiquaient des effets de levier de cet ordre, voire supérieurs. Quant aux fonds spéculatifs, les fameux « hedge funds » qui ne sont en fait rien d’autre que des banques d’affaires qui n’obéissent à aucune règle et qui pensaient ne devoir de comptes à personne, ils employaient des effets de levier plus importants encore. Dirigés à partir de Londres et de New York, l’écrasante majorité de ces fonds spéculatifs (plus des deux tiers) sont installés dans des paradis fiscaux. La prochaine déferlante de faillites les touchera de plein fouet. Les analyses les plus optimistes tablent sur plus de 1000 faillites rien que pour 2008.

L’annonce du plan miracle concocté par les autorités monétaires des Etats-Unis suffirait à elle seule à effacer tous les dégâts provoqués par cette crise systémique, nous rassurent les média et les boursicoteurs à travers la planète. On nous refait le coup des scénarios merveilleux d’HollywooDysneyWallStreetland. Dans leur génie créatif, les autorités monétaires des Etats-Unis auraient donc inventé l’éponge magique qui transformerait des titres pourris et toxiques en dollars-or ? La longue quête de l’alchimie aurait atteint son but ?

Regardons-y de plus près avant de nous émerveiller du miracle annoncé.

La seule dette nationale des Etats-Unis représenterait aujourd’hui, selon les comptes officiels, 11 300 milliards de dollars. En réalité, après la nationalisation des dettes de Fannie Mae, Freddie Mac, AIG, … elle dépasse déjà 125 % du P.I.B. des Etats-Unis……c.a.d. 17 000 milliards…

En lieu et place d’un banal ministère des finances, les Etats-Unis prétendent encore avoir un Trésor au crédit inépuisable et illimité. La « toute-puissante FED » vient de faire appel au Trésor pour se re-financer en liquidités « dollar-papier » pensant ainsi sauvegarder l’apparence de crédibilité qu’il lui reste… Et le Trésor lui-même, comment se finance-t-il ?

Le consensus médiatique ambiant nous présente les contribuables des Etats-Unis comme ceux qui paieraient la facture finale. On ne pourrait qu’être admiratifs devant la capacité de financement, l’abnégation et l ‘esprit de sacrifice de ceux-ci si c’étaient effectivement eux qui payaient cette exorbitante facture. En y regardant de plus près, on constate aisément qu’il n’en est rien. En guise de sacrifices, les contribuables ont bénéficié de cadeaux fiscaux de plusieurs centaines de millions de dollars (cf. plan Bush) censés redonner du pouvoir d’achat à des consommateurs déjà sur-endettés et ainsi relancer la consommation aux Etats-Unis, dont les experts de l’économisme ambiant nous assènent depuis des années qu’elle constitue l’incontournable moteur de la croissance de l’économie mondialisée.

La campagne électorale aux Etats-Unis nous a permis d’apprécier des candidats à la candidature qui se battaient à coups de surenchères, promettant des baisses d’impôts toujours plus importantes afin d’être investis par leurs partis respectifs.

Ceux qu’on nous présente comme les contribuables appelés à régler la facture de cette crise sont en réalité des ménages dont le taux d’endettement dépasse les 100 %. Cela signifie tout simplement que, pris dans leur ensemble, les potentiels contribuables états-uniens ne disposent pas d’un cent de dollar d’épargne.

Si à la dette nationale des Etats-Unis nous ajoutons celles des différents Etats, des municipalités, des ménages, du secteur financier et des entreprises on aboutit à une dette cumulée qui défie l’entendement du commun des mortels, mais on comprend mieux pourquoi depuis bientôt trois décennies on essaie de nous convaincre qu’il est naturel et même indispensable à la bonne marche de l’économie mondiale que l’ensemble de l’épargne de la planète finance la sur-consommation, le gaspillage, le complexe militaro-industriel, les aberrations environnementales et les déficits récurrents, aujourd’hui institutionnalisés, de l’économie des Etats-Unis.

En termes d’endettement global per capita, la Grande-Bretagne fait presque aussi bien… Il est intéressant de noter que, comme par hasard, les piliers du marché financier globalisé, qui aujourd’hui cèdent sur leurs fondations, se trouvent être précisément Wall Street et la City, qui pensent encore et toujours pouvoir redéfinir les règles du jeu à leur avantage…

La dictature des marchés financiers anglo-saxons touche à sa fin ! Et alors ? Tant mieux pour l’écrasante majorité de L’Humanité qui se bat pour un autre monde, qu’il ne s’agit plus aujourd’hui de revendiquer comme une possibilité mais plutôt comme une nécessité impérieuse, devenue évidente pour préserver notre planète dont les grands équilibres et la survie-même sont menacés par ce modèle économique. Assez de dégâts ! Plus jamais de ce monde-la ! La facture et la rigueur que l’on voudrait nous imposer sont les profits obscènes et le luxe cynique des milliardaires ultra-riches. A eux d’abord de rembourser leur dette à la planète qu’ils détruisent. Donnons-nous les moyens d’exiger des comptes, même s’il faut pour cela dénoncer et détruire leurs paradis fiscaux. Le catastrophisme ambiant véhiculé par les media n’est rien d’autre que le reflet de la panique de leurs propriétaires, relayée par des journalistes dont le souci premier est de reproduire la voix de leurs maîtres. L’immense majorité d’entre nous a tout à gagner de la redéfinition des règles du jeu économique, actuellement à l’œuvre, et, d’ores et déjà irréversible. Plus rien ne sera jamais comme avant et, même si rien n’est gagné d’avance, il dépend de chacune et de chacun d’entre nous – de nos refus, de nos choix, de nos exigences, de nos luttes et de notre capacité de mobilisation – que le rapport de forces soit définitivement inversé. Aucune logique suprême ne condamne l’Humanité à la fin de l’Histoire ni à l’asservissement par le diktat du Marché. Par sa cupidité frénétique irresponsable l’ultra-libéralisme s’est mis de lui-même hors-la-loi. Profitons-en pour le condamner définitivement et sans états d’âme aux poubelles de l’Histoire. Plutôt que d’accepter la socialisation des pertes, socialisons plutôt notre révolte et laissons les responsables du pillage des ressources de notre planète, de la dégradation de nos vies et de l’explosion des inégalités, assumer leurs contradictions et régler leur facture.

La roulette financière tourne, et rien ne va plus, l’Humanité refuse dorénavant les paris à crédit sur son avenir. Victor Hugo ne s’était pas trompé lorsqu’il affirmait que « d’ordinaire, les empires meurent d’indigestion » . Tous les misérables, les pauvres, les affamés, les « illégaux », les sans-droits qui vivent l’enfer quotidien de la survie pour financer les milliardaires et leurs paradis fiscaux, commencent à comprendre ce qu’a voulu signifier Victor Hugo lorsqu’il écrivait : « C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches ».
N@ndo